Seydou Gueye sur le nouvel avion: « Notre pays doit toujours tenir son rang et sa place dans le concert des Nations

par Dakar Matin

Les locations d’avions coûtent excessivement chères. Et se faire prêter un avion par des pays amis, pour des missions présidentielles ou officielles du Sénégal, n’est pas un gage d’indépendance. Acquérir dès lors un nouvel aéronef participe d’une question de sécurité pour des missions présidentielles et ministérielles. Pour moi, il s’agit d’une question de souveraineté et de sécurité pour le Sénégal, au-delà des impératifs liés à la mise à jour des dispositifs de navigation eu égard à la rapidité de l’obsolescence en la matière »

Monsieur le ministre, l’acquisition d’un nouvel avion de commandement par l’État du Sénégal suscite beaucoup de commentaires. Que pouvez-vous en dire ?

Notre pays doit toujours tenir son rang et sa place dans le concert des Nations. Le Sénégal a toujours disposé d’un avion de commandement ; c’est un principe de souveraineté. Cela, tout le monde peut bien le comprendre. « Pointe Sarène » va être remplacée parce qu’étant devenue vétuste. Elle a occasionné régulièrement des visites techniques onéreuses et de longues périodes d’immobilisation. Les locations d’avions coûtent relativement chères. Et se faire prêter un avion par des pays amis, pour des missions présidentielles ou officielles du Sénégal, n’est pas un gage d’indépendance. Acquérir, dès lors, un nouvel aéronef participe d’une question de sécurité pour les missions présidentielles et ministérielles. Pour moi, il s’agit d’une question de souveraineté et de sécurité pour le Sénégal, au-delà des impératifs liés à la mise à jour des dispositifs de navigation eu égard à la rapidité de l’obsolescence en la matière. Il faut rappeler que « Pointe Sarène », après deux décennies d’opérations- l’avion a été fabriqué en juillet 2001, acquis en seconde mains par notre pays en 2010 et mis en circulation en 2011- sera remplacée par un aéronef neuf plus performant. Et la vente annoncée de « Pointe Sarène se fera en toute transparence ».

Quelle lecture faites-vous du Sommet sur le Financement des économies africaines ?

Je voudrais d’abord me féliciter de l’écho qui a été réservé à l’appel du Président Macky Sall pour des réformes profondes de la coopération entre l’Afrique et le reste du monde. Le Président de la République a plaidé, dès les premières heures de la pandémie de la Covid-19, pour l’annulation de la dette publique et la renégociation des dettes privées des pays africains. Cet appel a été accueilli favorablement par toute la communauté internationale et suivi de plusieurs décisions salvatrices pour nos économies. Le Fonds monétaire international (Fmi) a immédiatement épuré la dette de 25 pays. Le paiement de la dette de tous les autres États a été suspendu. Les institutions de Bretton Woods et l’Union européenne ont également entrepris une vaste mobilisation de fonds. Après cette étape plutôt conjoncturelle, il fallait aborder des réponses structurelles. À ce titre, le Sommet sur le Financement des économies africaines marque une étape déterminante pour le continent, car il faut relancer nos économies dans un contexte de marasme sans précédent avec de nouveaux mécanismes. Et il est heureux de voir que les Présidents, Chefs de Gouvernement et autres dirigeants d’institutions qui ont pris part à la rencontre se sont accordés sur la nécessité d’un « New Deal » entre l’Afrique et ses partenaires. En d’autres termes, il s’agit d’un nouveau départ du point de vue de la gouvernance économique et financière mondiale. À ce niveau, l’allocation de nouveaux Droits de tirage spéciaux (Dts) et la levée des brevets sur les vaccins anti-Covid-19 constituent un succès éclatant qui conforte le leadership du Président Macky Sall sur les questions et les enjeux pour le continent et le reste du monde.

Après des reports, le chef de l’État a fixé les locales pour le 23 janvier 2022. Votre parti est-il prêt pour aller à ces élections ?

L’Alliance pour la République (Apr) fait partie de la coalition Benno Bokk Yaakaar (Bby) qui, depuis sa création, a pris part à différentes élections. De la présidentielle aux locales en passant par les législatives, Benno a remporté toutes les élections auxquelles elle a participé. Donc, nous sommes prêts ! Pas uniquement pour aller aux élections, mais pour les remporter parce que notre coalition est à la tête de 530 communes sur 557. Elle dirige également une quarantaine de départements. Le challenge de la victoire nous semble plus pertinent que celui de la participation. Nous y travaillons à la base.

Dans la mouvance présidentielle comme dans l’opposition, beaucoup de candidatures sont déjà annoncées. Ne pensez-vous pas que lorsqu’elles ne sont pas bien managées, elles peuvent conduire à l’éclatement de partis ou de coalitions ?

Les candidatures sont l’expression de notre vitalité démocratique et de l’ouverture de notre organisation. Les Sénégalais qui aspirent à participer à la gestion de leurs collectivités ont le droit d’afficher leurs ambitions. La spécificité des élections locales, c’est qu’au-delà des dynamiques de parti, c’est une rencontre entre un acteur et ses concitoyens locaux pour le développement de leur localité. Autrement dit, ce sont des ambitions locales qui sont en jeu. Et cela pourrait expliquer la floraison de candidatures annoncées. Ce n’est pas nouveau. Ici, le rôle de l’État, c’est de veiller à la préservation des conditions optima les de l’expression démocratique étant entendu que l’animation interne de ces organisations revient aux membres, évidemment dans le respect de la loi. Ces aspects d’encadrement pourraient être discutés dans le cadre des instances de dialogue politique. En ce qui concerne l’avenir de Benno, je le disais tantôt, la coalition a capitalisé beaucoup d’expériences au fil du temps. Elle a réussi à consolider son élan unitaire. Je ne dirais pas la même chose de l’opposition arc-en-ciel que nous avons en face. À chaque rendez-vous électoral, nous assistons à la création d’une nouvelle coalition. Gageons que celle qui se mettra en place pour les locales ne survivra que le temps d’une rose.

Certains pensent que le nouveau découpage, notamment celui de Dakar, à des soubassements politiques. Qu’en pense l’Apr ?

Il faut faire preuve de mauvaise foi pour ne pas se réjouir de la nouvelle carte administrative de Dakar qui vient corriger plusieurs incohérences territoriales. À titre d’exemple, à Keur Massar, les populations réclamaient l’érection de la localité en département. Aujourd’hui, la nouvelle carte administrative prend en charge la promesse que le Président Macky Sall leur a faite en septembre 2020. Nous avons également tous vu comment Sangalkam a été saucissonné en 2011. Nous avons été témoins des violentes manifestations qui ont suivi ce découpage inique et nous nous sommes tous émus de la mort du jeune Malick Ba. La dernière carte répond à un souci de cohérence et d’équité, pour un développement durable de pôles territoires viables. Elle est plus conforme à l’esprit de l’Acte III qui veut consolider la décentralisation par une territorialisation des politiques publiques et la cohérence dans l’organisation des territoires en vue d’une meilleure articulation des échelles de la gouvernance locale. Il n’y a aucun calcul politicien dans ce que je viens de vous dire.

La communication de l’Apr a été jugée plus que réactive suite à la sortie du Professeur Bathily. Qu’est-ce qui explique cette nouvelle démarche ?

Je ne voudrais pas être juge et parti, mais je pense que la communication de l’Alliance pour la République a toujours été dynamique. L’Apr se donne les moyens de ne plus laisser prospérer les mensonges, les contrevérités, les affabulations et le poison de la rancœur ou de la haine dans le cadre de notre débat démocratique. C’est notre nouvelle doctrine. En ce qui concerne la sortie du Professeur Bathily, il a manqué d’honnêteté et de rigueur pour un historien. Le Président Macky Sall n’a aucun problème par rapport aux Assises nationales, mais il ne faut pas pour autant en faire un dogme. Les Assises étaient une excellente réflexion au moment où elles se tenaient, mais le contexte a considérablement changé. Le Président Sall a été élu par les Sénégalais sur la base d’un programme, « Yoonu Yokkuté », et réélu sur la base de « Ligeyyal Euleuk ». Notre position sur les Assises a toujours été constante. Et c’est vouloir nous faire un mauvais procès que de chercher à la brouiller ou nous mettre en conflit avec les Assises. Si c’est cela l’intention du Professeur Bathily, je voudrais le rassurer : c’est peine perdue. Et si c’est pour autre chose, nous lui apporterons la réplique sans trembler. De démocratie chahutée à l’époque, le Sénégal est devenu une démocratie modèle. C’est ce que le parti a rappelé à M. Bathily en lui disant en prime que beaucoup d’eau a coulé sous les ponts, que les temps ont changé et que la dictature de la pensée unique a laissé place à la pluralité et à la diversité des opinions et des idées.

L’actualité porte également sur la question de la criminalisation de l’homosexualité au Sénégal. Quelle lecture en faites-vous ?

C’est une question essentielle pour notre modèle de société et notre système de valeurs que nous voulons garder intact. À ce sujet, il n’y a rien de nouveau sous le soleil. La loi, dans notre pays, n’a pas changé et la position maintes fois répétée du Président Macky Sall et du Sénégal n’a pas varié. Par contre, je trouve préoccupante l’attitude de certains acteurs politiques, très au courant de notre législation et de notre position sur le sujet, qui veulent faire de cette question un axe majeur de leur communication au moment où nous mettons 450 milliards de FCfa pour l’emploi et l’insertion socioéconomique des jeunes et des femmes, au moment où le Sénégal fait partie des rares pays au monde qui ont échappé à la récession économique, au moment où nous devons saluer la décrue dans la courbe des contaminations à la Covid-19 et au moment où nous lançons des travaux d’infrastructures et réceptionnons de nouveaux hôpitaux au grand bénéfice des populations.

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