Gabon: ce que contient la charte de transition, document crucial pour l’avenir du pays

par Dakar Matin

Au Gabon, le général Brice Clotaire Oligui Nguema, chef des putschistes, a prêté serment le 4 septembre dernier sur une charte de transition, un document central dont RFI s’est procuré une copie. On y découvre comment le pouvoir va se partager dans le pays et comment ce processus va se dérouler, même si ce texte soulève encore de nombreuses questions.

On ne sait pas comment, ni par qui cette charte de transition a été rédigée. Elle est signée par le général Oligui Nguema, nouvel homme fort du Gabon, et six autres officiers. Selon un observateur, les rédacteurs « se sont inspirés de la charte de transition du Burkina [où deux coups d’État ont eu lieu en 2022, NDLR] et de quelques projets qui circulaient sur les réseaux sociaux ». Un texte a priori écrit en moins d’une semaine, entre le coup d’État et la prestation de serment. Il semble avoir été rédigé dans la précipitation : on relève des coquilles et des erreurs comme un drapeau gabonais décrit avec des « bandes verticales » alors qu’elles sont horizontales…

Dans le contenu, 7 pages, 62 articles. Des valeurs, des libertés et des droits y sont reconnus et rappelés. Les missions de la transition sont également listées.

Le texte prévoit un programme très large sur une durée inconnue

La tâche est lourde, puisqu’elle doit refonder l’État, bâtir de nouvelles institutions, engager des réformes majeures dans tous les domaines, renforcer l’indépendance de la justice, lutter contre l’impunité…

Elle devra aussi élaborer une nouvelle Constitution adoptée par référendum. Et elle se terminera par des élections générales libres et transparentes.

Tout cela sur une durée inconnue, puisque la charte ne donne pas de calendrier.

Des détails sur les organes de la transition

Le texte que RFI a pu consulter donne des précisions sur les organes de la transition et sur le partage du pouvoir. Sont prévus : un président et un Conseil national de la transition qui doit aider ledit président à déterminer sa politique, mais au sujet duquel on ne sait pas grand-chose.

À côté de cela, un gouvernement, un Parlement et une Cour constitutionnelle. Voilà les principaux organes.

Le président est par ailleurs également ministre de la Défense. Il nomme le gouvernement.

L’Assemblée nationale, elle, se composera de 50 membres, dont 20 hauts cadres ainsi que des gens issus des partis qui proposeront des noms.

Le texte prévoit en outre 50 sénateurs. Parmi eux, des personnalités qualifiées, des chefs d’entreprise, des syndicalistes, des religieux…

Une charte qui confère des « pouvoirs considérables » au président, selon un universitaire

Ce document n’est pas toutefois sans susciter des interrogations. Un universitaire sondé par RFI parle d’une « omnipotence » du président, avec des « pouvoirs considérables » et « des pouvoirs de nomination sans partage » : il est ministre de la Défense, il nomme les ministres qui sont responsables devant lui, il nomme les membres de l’Assemblée, du Sénat, de la Cour constitutionnelle.

Ensuite, il n’est dit nulle part qu’il ne peut pas se présenter à la prochaine élection, alors qu’il est précisé que le président de la Cour, les présidents des deux chambres du Parlement et les ministres ne peuvent pas être candidats. « Un principe juridique dit : ce que le droit n’interdit pas est autorisé. Il pourra donc être candidat », confirme un professeur de droit.

À noter qu’une immunité totale est prévue pour les auteurs du putsch sur les quelques jours entre le coup d’État et la prestation de serment.

Un chapitre est consacré au Conseil national de la transition. L’organe doit assister le président pour déterminer la politique du pays, mais dont on ne sait rien, à part qu’il sera composé uniquement de militaires…

Enfin, cette charte a une valeur supérieure à la Constitution : elle est au-dessus de tous les autres textes.

Par :Sébastien Németh

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