Après les polémiques et autres interprétations consécutives des résultats de l’enquête de la ANSD (Agence nationale de la statistique et de la démographie), le Ministre de l’économie a fait une sortie pour apporter des éclaircissements sur l’interprétation des chiffres qui selon lui sont mal lus. Pourtant, en se focalisant sur le vécu quotidien des ménages, les propos du ministre ne riment pas avec la condition de vie des populations.
En collaboration avec la Banque Mondiale, la ANSD a sorti les résultats sur l’enquête harmonisée sur les conditions de vie des ménages. Ce qui a poussé le très réservé Ministre de l’économie, du Plan et de la Coopération Internationale, Amadou Hott a effectué une sortie pour donner une meilleure lisibilité des résultats de l’enquête qui, d’après plusieurs interprétations et exploitations notamment de la presse, le traduisent par une augmentation de la pauvreté. Pourtant les ménages ne prennent pas le contrepied de l’ANSD. Au contraire !
Les personnes interrogées affirment que leurs conditions de vie sont de plus en plus difficiles. Ce, nonobstant les efforts fournis par l’Etat avec notamment les bourses familiales. Entre les trois repas, la prise en charge des enfants, le loyer, la vie chère entre autres, les chefs de famille peinent à subvenir à tous les besoins. Philippe. B soutien de famille et par ailleurs, tradipraticien nous confie que «il n’y a pas d’avancement, la vie est très difficile. Les gens n’ont pas de travail. Ici, dans cette maison, nous sommes 8 hommes et seul mon neveu et moi travaillons».
Avec son statut qui le met en contact avec différentes personnes, il poursuit «beaucoup de gens viennent vers moi pour me demander de les aider à avoir un travail. J’en ai eu tellement de cas, et avoir un travail reste la plus grande préoccupation des populations». Un autre constat est que dans beaucoup de familles, les femmes s’occupent des dépenses. C’est ce qui les pousse à faire de petits commerces, des travaux de ménage. C’est le cas de cette dame d’une soixantaine T. S, de blanc vêtue trouvée sous le soleil en train de séparer à l’aide d’un tamis des bétons destinés à la construction du sol. Avec un sourire forcé elle confie: «la vie est très dure. Je fais ce travail pour venir en aide à ma famille. J’ai des enfants qui ont fini d’étudier et qui n’ont toujours pas trouvé un travail».
Si les uns mettent l’accent sur le manque de travail, Amy Séne, elle, se plaint de la vie chère. «Tout est cher. La viande et l’huile ont augmenté. J’ai peur que nous en venons à un stade où manger deviendrait un luxe. En plus, les riches s’entraident entre eux, les pauvres deviennent de plus en plus pauvres. Il n’y a pas assez de solidarité alors que ces conditions devraient nous encourager davantage à plus de solidarité», lance-t-elle.
Parler de la réalité de la pauvreté pourrait se justifier par l’incapacité d’assurer les trois repas habituellement servis notamment le diner où désormais chacun se débrouille à sa façon, selon plusieurs témoignages. Sans occulter la transformation des céréales pour préparer et vendre de la bouillie dans différents quartiers de Dakar. Même dans certains quartiers dits résidentiels où des vendeuses de coucous ont fini par élire domicile. Ces plats jadis utilisés comme désert, sont en passe de devenir le diner dans beaucoup de familles.
A cet effet, Siga Sène vendeuse de couscous nous apprend d’ailleurs que la demande est très forte et qu’elle ne parvient plus à satisfaire tous ses clients. En témoigne les longues files d’attente d’une clientèle composée de toutes les couches sociales. «Des femmes accompagnées de leurs enfants et /ou de leurs maris achètent le couscous avec une sauce de leur choix. J’ai des fois envie de leur dire aller préparer pour leur famille mais vu la situation économique et les activités qu’elles se donnent pour vivre décemment, préparer le diner devient difficile et presque impossible», confie-t-elle.
Khalisse SENE (Stagiaire)