Sénégal: La lutte contre le coronavirus au pays de la polémique

par admin
Macky discours

Le message à la nation du chef de l’Etat de ce lundi a suscité moult réactions au sein de la société comme il fallait s’y attendre. Certains sont d’accord et d’autres le sont moins. Ce sont les lois de la démocratie dont la liberté d’expression est un des fondamentaux.

Toutefois, chez nous, tout est sujet à polémique. Et la lutte contre le coronavirus en est une illustration.

Dans un premier temps, peu de nos compatriotes croyaient vraiment à l’existence du virus. Il a fallu en convoquer certains de célèbres comme Abdoulaye Mbaye Pèkh, Selbé Ndom et les menacer de poursuites pénales pour que les dénégations qui subsistent encore restent dans le giron privé.

La preuve, même des parents de gens morts de la Covid-19 continuent à dire le contraire. Et des malades nient être affectés.

Last but not least, avec le couvre-feu par exemple dans le cadre de l’état d’urgence décrété, nombre de sénégalais n’ont pas du tout apprécié le blocage de leurs activités et leur incapacité à pourvoir à leurs besoins. Ils se sont mis à attaquer l’Etat. Et quand ce dernier a desserré l’étau, ils ont répliqué que c’est prématuré.

Le premier jour, l’attitude de la Police dont certains éléments s’en sont pris aux citoyens qui ont tardé à respecter le couvre-feu a fait naitre beaucoup de polémiques. Les diatribes contre les hommes de loi n’ont pas manqué. Pourtant, les rectificatifs apportés n’ont pas évité des situations comme ce qui s’est passé à Thiaroye chez un Imam où la police a encore eu la main lourde.

Par la suite, les récriminations ont porté sur les vivres. L’attribution des marchés de transport et de fourniture ont créé de vives incompréhensions. Beaucoup de citoyens n’ont pas apprécié que des marchés aillent à des sociétés qui, selon eux, ne devraient pas être bénéficiaires.

Mais ce n’est pas tout. La distribution des vivres d’une valeur de plus de 69 milliards aux populations continue encore à alimenter les discussions. Les lenteurs observées dans les opérations et le ciblage des bénéficiaires n’ont pas fait l’unanimité.

Pis, la mise en place tardive du Comité de pilotage transformé en Comité de suivi n’a pas été appréciée. Ce serait, selon les tenants des théories du complot, une autre façon pour le pouvoir et ses ouailles de procéder à des opérations douteuses et à les couvrir.

Et le Comité, a peine installé, a été distrait par une polémiques malsaine portant sur des perdiem avec comme conséquence la démission de Habib Sy, représentant de l’opposition.

En plus, l’utilisation du remède malgache a été l’objet de moult divergences sans oublier celui du protocole de soin proposé par le Docteur Raoult avec la chloroquine.

Aujourd’hui, quelques soient les mesures prises par les autorités, elles sont systémiquement contestées.

D’ailleurs, le Docteur Moussa Thior, ancien responsable de la lutte contre le paludisme, avait réussi à attirer l’attention sur le fait que toute la démarche du Ministère de la Santé n’est pas cohérente et qu’il faille tout simplement laisser circuler le virus et éviter le mode de gestion actuel de la pandémie.

Et cette polémique est loin d’avoir été la seule entre spécialistes : les propos du professeur Seydi sur le manque de matériel à l’hôpital de Ziguinchor n’ont pas du tout été appréciés au niveau du Ministère de la Santé.

Ici, chez nous, on n’est même pas d’accord sur les définitions. Certains disent ouvertement qu’il n’y a pas de cas communautaires, ‘’un cas, c’est un cas’’. Ce qui exaspère le Ministère.

Même la fermeture de mosquées a fait naître de vives tensions sociales. Il a fallu arrêter des Imams et susciter la colère du Khalife de Léona Niassène qui a dit publiquement qu’il va prier, c’est-à-dire transgresser l’interdit.

La vérité est que nous ne sommes d’accord sur rien. Et cette propension que nous avons à verser dans un nihilisme béat nous divertit et nous retarde.

Nous sommes les champions des faux problèmes, ceux-là qui occultent les vrais et qui ne poussent pas les uns et les autres à se concentrer sur l’essentiel.

C’est vrai que l’Etat prête parfois le franc, mais ce n’est pas une raison pour verser dans des polémiques à tout-va et à se détourner de l’essentiel.

Cette attitude entretenue dans notre société, a favorisé la propagation du virus. Nous avons mis du retard à y croire, du retard à mettre en place des stratégies, à adopter un protocole de soin, à accepter l’Artémisia, à accepter l’état d’urgence, le couvre-feu, à appliquer les mesures-barrières, etc.

Nous vociférons sur tout, nous méfions de tout et de tout le monde, doutons de tout et parlons tous en même temps sans nous écouter. Exactement le genre d’attitude qui, foncièrement, divise une Nation et l’empêche de faire front unique pour gagner des batailles.

Ce n’est pas étonnant alors que le virus marque des points. Nous avons pêché par un défaut de cohérence, de discipline et simplement de civisme et de citoyenneté.

Et le virus, lui, gagne du terrain.

Assane Samb

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