Le monde ne peut faire avec Macky Sall moins qu’avec Yahya Jammeh

par pierre Dieme

Lorsqu’en Décembre 2016, Yahya Jammeh a voulu commettre un putsch constitutionnel en refusant de céder le pouvoir à son successeur nouvellement élu démocratiquement, la communauté internationale a déclenché contre lui l’opération militaire « Restaurer la démocratie » menée par la CEDEAO et approuvée par une résolution du Conseil de Sécurité des Nations Unies.  

Durant ses 23 ans de règne, le régime dictatorial de Yahya Jammeh a été caractérisé par une multitude de violations et d’atrocités :

1° Des assassinats, des tortures à mort, des disparitions, des repressions de manifestations dans le sang. La mort de 240 personnes répertoriées sur 23 années a été attribuée au régime par une commission d’enquête. Parmi ces morts, le journaliste Deyda Aidara et l’opposant populaire Solo Sandeng mort en détention en 2016

2° L’instrumentalisation d’une unité d’élites nommée « Junglers » ou « Escadrons de la mort » pour la répression, les assassinats et les exactions contre les populations et les opposants politiques

3° La nomination ou le recrutement de juristes mercenaires pour rédiger et promulguer des décrets qui ont supprimé des droits fondamentaux ou instauré des règles liberticides permettant d’accuser ses opposants de toutes sortes de crimes et délits alors qu’il ne s’agit que d’activités politiques ou d’actes de résistance à l’oppression garantie par toutes les constitutions

4° Les violations permanentes de droits fondamentaux tels que la libre expression, le droit de protestation pacifique, la liberté d’association, les activités politiques

5° Des arrestations arbitraires d’opposants politiques, de manifestants, de journalistes

6° Des fermetures de journaux et radios indépendants

Gagné par l’ivresse du pouvoir et la crainte d’une réédition des comptes, Jammeh a commis le forcing de trop, un cout d’état constitutionnel. En effet, aux présidentielles de Décembre 2016, il accepte d’abord la victoire de son adversaire, et revient le lendemain la rejeter en se réfugiant derrière un recours de son parti l’APRC auprès de la Cour Suprême en contestation des résultats des élections sortis des urnes. Le prétexte étant que de nombreux partisans de l’APRC auraient soi-disant subi des intimidations qui les ont empêchés de voter dans une des régions du pays, avec selon Jammeh la complicité de la commission électorale.

Jammeh voulait user de ce stratagème pour rester au pouvoir au-delà de l’expiration de son mandat étant donné que la Cour Suprême qui a été saisie ne pourra siéger de si tôt puisque incomplète depuis plus d’un an.  Ce fut alors la levée de bouclier an plan national et international car personne n’étant dupe, y compris Macky Sall himself. Les Nations Unies et la CEDEAO jouèrent leurs partitions. L’opération « Restaurer la démocratie » vit le jour pour contraindre par la force Yahya Jammeh à accepter sa défaite et à céder le pouvoir au nouveau président élu.

Lorsque les opérations militaires ont débuté, que les troupes de plusieurs pays ont été déployées en Gambie, une dernière chance a été accordée à Jammeh qui s’est résolu à la saisir. Il acceptera finalement de quitter le pouvoir en déclarant à la télévision nationale : « J’ai décidé aujourd’hui de quitter la direction de cette grande nation pour préserver la vie de mes concitoyens ».

Exilé en Guinée Equatoriale en attendant d’être cueilli et jugé pour les nombreux crimes de son régime, le 8 Janvier 2024 s’est ouvert en Suisse devant le Tribunal Pénal Fédéral le procès pour crimes contre l’humanité de son ancien ministre de l’intérieur qui risque la perpétuité. Ironie de l’histoire, ce ministre de l’intérieur s’appelle, tenez-vous bien, OUSMAN SONKO (55 ans).

QUESTION 1. Qui ne voit pas des similitudes entre le régime dictatorial de Yahya Jammeh et le régime dictatorial de Macky Sall ?

En réalité, la dictature en cours au Sénégal depuis 2019 est bien pire que celle vécue par la Gambie durant 23 ans. En effet :

1° Pour la Gambie, on parle de 240 morts sur 23 années. Alors qu’au Sénégal on parle de minimum 80 morts sur seulement 3 années (2021 – 2023). D’ailleurs l’on ne saura le nombre exact de victimes qu’après la chute du régime, entre les morts en détention ou en garde à vue, les disparitions de gendarmes et de civils, les corps de manifestants jetés à la mer, etc…., avec interdiction de procéder à la moindre enquête.

2° En Gambie, c’est un ministre de l’intérieur du nom de Ousman Sonko qui s’est rendu complice de crimes contre l’humanité. Au Sénégal c’est le camp de Ousmane Sonko qui est victime de crimes contre l’humanité comme soutenu dans le dossier introduit à la CPI à l’encontre du régime Sall et de son ministre de l’intérieur. 

3° Pendant que l’on reprochait à Yahya Jammeh un record de 90 arrestations au cours d’une manifestation réprimée, le régime Sall lui en a arrêté plus de 600 en Mars 2021 – plus de 150 en Juin 2022 – plus de 500 en Juin 2023 – plus de 150 depuis le 4 Février 2024 – par dizaines à chacune des autres manifestations, a blessé ou mutilé près de 1500 jeunes innocents, et il ne se passe pas un seul jour depuis 3 ans sans l’annonce de nouvelles arrestations arbitraires de pastéfiens.

4° Le régime Macky Sall a arrêté bien plus de journalistes, a fermé plus de télés, a coupé l’internet et les réseaux sociaux à plus de reprises que le régime de Jammeh.

5° En lieu et place des « escadrons de la mort ou junglers », au Sénégal on a « les forces occultes, les marrons du feu, les nervis, et les milices de la mort » que l’on voit tous partir systématiquement du siège de l’APR (parti de Macky Sall), munis d’armes de guerre, pour aller commettre des exécutions à la vue des FDS

6° Comme pour la Gambie, le Sénégal connait aussi son lot de nominations de juristes mercenaires, des tailleurs constitutionnels sans scrupule, des avocates chargées d’internationaliser les mensonges d’état, des magistrats chargés de faire classifier les opposants de terroristes

7° Pire que ce que l’on a vu en Gambie, le régime Sall a criminalisé l’opposition politique, a interdit près de 99% de leurs manifestations politiques, fomentant ouvertement des complots judiciaires à répétition à l’encontre des opposants menaçants

8° Pire que ce que l’on a vu en Gambie, le Sénégal a été transformé en une grande kleptocratie où le vol des ressources publiques ne connait plus de pause, même en temps de guerre contre le Covid-19, où les décrets facilitant le vol se multiplient, où le coude du chef garantit l’impunité aux fossoyeurs

Une chose au moins que l’on ne peut reprocher à Yahya Jammeh, c’est de ne pas avoir poussé la flagornerie aussi loin jusqu’à rebaptiser des avenues à son propre nom, et des hôpitaux publics au nom de son épouse. Il n’avait pas la haine de sa population, la haine de ses opposants. Il n’avait pas non plus vendangé la Gambie.

QUESTION 2. Qui ne voit pas des similitudes entre la dernière tentative de coup de force de Yahya Jammeh et la tentative de putsch qu’est en train de commettre Macky Sall ?

Yahya Jammeh, conscient que son peuple ne peut plus le piffer, a tenté de s’accrocher au pouvoir au-delà de l’expiration de son mandat, en décidant la tenue d’un nouveau scrutin parce que celui qu’il vient de perdre serait entaché d’irrégularités, accusant la Commission électorale de manque d’impartialité et d’honnêteté. Aucun mort n’a été enregistré fort heureusement, jusqu’à ce que Yahya Jammeh retrouve ses esprits et abdique.

Macky Sall, conscient depuis belle lurette que son peuple ne peut plus le piffer, tente de s’accrocher à tout prix au pouvoir au-delà de l’expiration de son mandat, en décidant l’annulation des élections parce que soi-disant :

¤¤ Le chaos institutionnel règnerait au Sénégal. Un chaos imaginaire que lui seul voit et vit

¤¤ Le Conseil Constitutionnel n’est plus légitime car 2 de ses membres ont été accusés de corruption par un politicien Whatsapp installé au Qatar. Or c’est ce politicien qui était surnommé Monsieur 10%, condamné pour enrichissement illicite avec une amende de 138 milliards toujours dus aux contribuables.

Comme on le voit, les prétextes pour confisquer le pouvoir sont bien plus ridicules que ceux de Yahya Jammeh. Ce coup de force a déjà causé la mort de 80 innocents, a détruit des milliers de vies et de familles.

Si pour bien moins que tout cela, si pour bien moins de sang versé la communauté internationale a déclenché contre Yahya Jammeh l’opération « Restaurer la démocratie », elle ne doit pas en faire moins pour sanctionner le putsch ignoble et sanglant de Macky Sall, pour l’obliger à organiser les élections du 25 Février 2024, et surtout à quitter le palais de la république le 2 Avril 2024.  

Comme il le démontre tous les jours, jamais Macky Sall ne fera preuve de hauteur ou d’élégance républicaine, jamais il ne posera de véritables actes d’apaisement, jamais il n’a accepté la défaite et jamais il ne l’acceptera, jamais il ne quittera le pouvoir sans y être contraint par la force. Comme l’a déjà dit un de ses mercenaires, le régime n’hésitera pas à exterminer 90% de la population s’il fallait en arriver à cela pour tenir les procès destinés à éliminer l’adversaire favori des élections.

Nous demandons donc à la communauté internationale de cesser ces condamnations trop timides, à la France du petit Macron de cesser de se rendre complice les crimes perpétrés par le régime Sall, et de tous se décider enclencher une opération « Restaurer la démocratie » à l’encontre de Macky Sall. Sinon cette communauté internationale n’a qu’à la fermer lorsque des peuples ou des soldats décident d’en finir eux-mêmes avec leurs dictateurs ou leurs putschistes constitutionnels.

MARVEL NDOYE

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