Aly Ngouille Ndiaye avertit «J’en sais, des choses»

par pierre Dieme

Le maire de Linguère rappelle que la convocation de la justice polonaise ne date pas d’aujourd’hui. Elle remonte à 2020. À l’époque, confie-t-il, il avait écrit au chef de l’État pour exprimer sa disponibilité à y répondre.

Le Quotidien a révélé dans son édition du 9 novembre que la justice polonaise avait adressé au Sénégal une demande pour auditionner Aly Ngouille Ndiaye, comme témoin, dans le cadre d’une enquête sur des soupçons de blanchiment d’argent impliquant des entreprises polonaises ayant exploité un permis d’exploration de phosphates au Sénégal. L’ancien ministre de l’Agriculture dirigeait à ce moment-là le département des Mines.

La requête remonte à mai 2020. L’affaire a été donc ébruitée trois ans plus tard. Dans un contexte où Aly Ngouille Ndiaye a rompu les amarres avec le pouvoir, notamment en démissionnant du gouvernement, pour être candidat à la prochaine présidentielle. Ce qui pousse à croire que le camp présidentiel serait l’auteur de la fuite dans le dessein de salir la réputation du maire de Linguère.

«J’en sais, des choses»
Dans un entretien avec Sunu Afrik Radio, basée aux États-Unis, Aly Ngouille Ndiaye a apporté sa version des faits. L’ancien ministre de l’Agriculture a d’abord exprimé son indignation : «Si c’est le pouvoir qui instrumentalise cette affaire pour m’atteindre- je n’en ai aucune preuve-, j’estime que c’est regrettable. La méthode n’est pas élégante. Chacun doit pouvoir prendre sa route sans que l’on cherche à sortir des cafards contre lui. J’aurais pu adopter la même démarche, parce que j’en sais des choses. Mais je ne le ferai pas. Ce serait contraire à mon éducation.»

Le maire de Linguère a ensuite levé un coin du voile sur la raison de sa convocation par la justice polonaise. «Quand j’étais ministre des Mines, on avait conclu une convention avec une entreprise publique polonaise pour de l’exploration de mines de phosphates, rembobine-t-il. Après avoir investi beaucoup d’argent sans trouver de phosphates, les dirigeants de l’entreprise avaient manifestement estimé que les fonds injectés ont été dilapidés. C’est ainsi que l’affaire a fait l’objet d’une plainte.»

Dans sa plainte, poursuit Aly Ngouille Ndiaye, «le directeur de l’entreprise publique a déclaré que des Sénégalais auraient joué un rôle douteux» dans le cadre de la procédure d’obtention de son permis d’exploration. «Il a affirmé aussi que j’aurais fait une recommandation illégale et que des agents de l’administration sénégalaise auraient reçu des pots de vin. C’est ainsi que la justice polonaise a écrit au Sénégal, par le biais de notre ambassade en Pologne, pour demander à pouvoir m’entendre en qualité de témoin.»

«J’ai écrit à Président Macky Sall»

L’ancien ministre révèle que c’est le Président Macky Sall lui-même qui l’a mis au parfum de la requête polonaise en lui montrant le courrier envoyé en ce sens. «Après avoir examiné la lettre, j’ai à mon tour écrit au président de la République pour lui dire que j’étais prêt à répondre à la convocation. Même si aucun accord d’entraide judiciaire ne nous lie à la Pologne et qu’en tant que ministre, mon audition est soumise à conditions.»

Après cette initiative, l’affaire a été, paraît-il, mise sous le coude. «Je n’en ai plus entendu parler, sourit Aly Ngouille Ndiaye. Entretemps, je suis devenu maire, député, encore ministre. Si l’on attend deux mois après que j’aie déclaré ma candidature pour la présidentielle de 2024 pour sortir le dossier, il est normal que les gens se posent des questions.»

L’ancien ministre d’ajouter : «Mais je n’ai aucun problème avec ce dossier. Je suis prêt à donner ma version. On parle de blanchiment, mais si l’on devait blanchir de l’argent, on l’aurait fait pour des montants plus importants. J’ai dépensé beaucoup plus pour que Macky Sall devienne président de la République.»

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