Pour Kéne et tous les autres…

par pierre Dieme

Voir une dame jadis brillante sur les pistes d’athlétisme du monde entier ravagée par une maladie sournoise faisait assurément de la peine. Plus insoutenable encore, son appel au secours finalement entendu par le chef l’Etat.

La promptitude des autorités à se déplacer au domicile mortuaire détonne de leur silence méprisant quand la jeune dame avait le plus besoin de leurs réconfort et soutien. La défunte était vide de vie, méconnaissable pour ceux qui l’ont vue durant ses derniers mois de vie sur cette terre.

Pendant qu’on distribuait des terrains et qu’on gâtait de jeunes footballeurs dont la plupart touchent des dizaines de millions de francs par mois, Kène Ndoye souffrait stoïque. Elle ne quémandait pas mais réclamait juste ce qu’on lui devait. Elle voulait rester en vie, se soigner. Dans les médias et sur des plateaux de télé, l’athlète plusieurs fois championne d’Afrique et médaillée mondiale a fait entendre à maintes reprises son désespoir de ne pouvoir se prendre en charge comme elle l’aurait voulu, faute de moyens. Elle réclamait des primes impayées.

Elle a longtemps attendu sans rien voir. Finalement, elle est morte si jeune et dans le dénuement comme beaucoup de nos héros dont on ne se souvient qu’à leur disparition. Il y avait Kène, qui est partie, mais il y a aussi beaucoup d’autres de nos anciennes gloires sportives, tous ces autres qui ont eu besoin en un moment donné de leur vie chahutée d’une prise en charge médicale sans avoir pu l’obtenir. D’autres ont couru, couru, tapé à des portes sans qu’elles s’ouvrent jamais devant eux.

Les occupants des bureaux ou les propriétaires des châteaux aux portes desquelles ces vieilles gloires tapaient, à la recherche d’un petit secours, n’ayant pas voulu les recevoir. Ainsi va, hélas, la vie au Sénégal.

Un pays où règne l’art du « Puukare » et où des personnes, dès qu’elles accèdent à certaines stations, coupent tous les ponts et changent de numéros de téléphones pour rester inaccessibles.

Le geste des autorités envers la famille de la défunte athlète à qui elles auraient remis dix millions de francs la famille dit un million nous parait en tout cas indécent après leur totale indifférence au moment où Kène avait le plus besoin de leur secours pour rester en vie. Kène morte, à elles (autorités) la récupération politique !
KACCOOR BI – LE TEMOIN

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