Beaucoup d’établissements ont suivi la logique de la fermeture des internats et ne fonctionnent plus. Les syndicalistes de l’éducation s’indignent de la situation, et parlent même de « régression » dans le système éducatif national
En dehors de quelques lycées comme John Kennedy, Lamine Guèye, Blaise Diagne, Martin Luther King, Abdoulaye Sadji, des écoles qui comptent parfois plus de 3000 élèves ne disposent pas d’infirmerie répondant aux normes. Beaucoup d’établissements ont suivi la logique de la fermeture des internats et ne fonctionnent plus. Les syndicalistes de l’éducation s’indignent de la situation, et parlent même de « régression » dans le système éducatif national.
«A l’époque où nous étions élèves, il y avait une infirmerie dans chaque établissement scolaire avec un infirmier diplômé et des aides-soignants. L’école avait une dotation en médicaments et tout. Les problèmes de santé étaient gérés au niveau interne. Ce qui veut dire que, dans l’urgence, il y avait toujours un service pour administrer les premiers soins avant toute évacuation. Il y avait également un assistant social pour les élèves et les enseignants qui avaient des problèmes psychologiques. De 1994 à 2000, il y avait une infirmerie au lycée Blaise Diagne. Pour le cas du lycée André Peytavin, ça avait commencé à se détériorer petit à petit. Finalement, l’infirmière restait à ne rien faire. Puis, de fil en aiguille, tout a presque disparu. A l’époque, toutes les écoles avaient des services médicaux.
C’est avec la disparition des internats sous le magistère du président Abdou Diouf avec les politiques d’ajustement structurel que tout a disparu. C’est après que même les logements du personnel administratif ont été transformés en salle de classe. Les services de santé n’ont pas disparu tout de suite, mais c’est petit à petit qu’ils ont fermé. Aujourd’hui, on crée des écoles, mais sans prévoir», raconte, sur un air de désolation, Ndongo Sarr du Cusems (Cadre unitaire des syndicats de l’enseignement moyen secondaire). Le syndicaliste de l’éducation parle d’une «régression» dans le système et dénonce un manque de volonté et un problème dans l’identification des priorités. Ce qui, selon son camarade syndicaliste Tamsir Bakhoum du Saemss, «mérite de reposer et de repenser notre système éducatif». D’autant que, jusqu’à une époque récente, dit-il, on ne pouvait pas aller dans les grands établissements sans y trouver des infirmiers et des assistants sociaux. «Quand un élève avait un accident ou souffrait d’une maladie, il s’y rendait pour des soins. Mais aujourd’hui, la tendance est tout autre. La massification en termes de lycées n’est pas couplée à la construction de services de soins à l’école. Dans les collèges comme dans les lycées peu d’infirmeries sont fonctionnelles. Et même si elles le sont, on y trouve rarement des infirmeries dignes de ce nom pour la prise en charge des élèves».
Pour une proximité de la prise en charge médicale
Or, pour le secrétaire général du Cusems Authentique, Dame Mbodj, partout où il y a des rassemblements, on doit avoir une proximité de la prise en charge médicale. Ce qui d’ailleurs, dit-il, a toujours été un principe au niveau scolaire où il y avait des effectifs très élevés. «On doit revenir aux principes fondamentaux. Tous les lycées doivent avoir des assistants sociaux et des infirmeries», estime le secrétaire national chargé de la presse et la communication du Saemss, Tamsir Bakhoum. Dame Mbodj plaide quant à lui pour l’accompagnement des écoles avec des infirmeries et des infirmiers. «A l’université, il y a un service sanitaire. Un petit hôpital pour les étudiants et un autre pour les professeurs de l’Ucad. Il y a un centre de santé pour le personnel de l’université qui fait des consultations externes », explique Ndongo Sarr. Il pense que si on juge nécessaire de le faire dans les universités, on devait pouvoir le faire dans les établissements moyens- secondaires. «C’est utile», a renchéri M. Sarr du Cusems qui ajoute que toutes les écoles doivent avoir des infirmeries avec toutes les commodités pour la simple raison qu’il y a un minimum de soins à prodiguer aux élèves.
A l’en croire, c’est dans les cordes de l’Etat qui semble demander l’impossible aux directeurs d’écoles après avoir drastiquement réduit les budgets des établissements jusqu’à 50% en 2012. Une situation qui est devenue pire au fil des années. « Prenons l’exemple du lycée Blaise Diagne qui avait un budget de 22 millions et qui, aujourd’hui, s’est retrouvé avec environ 6 millions sans compter les TVA», confie Ndongo Sarr selon qui le régime du président Macky Sall a un problème d’identification des priorités. Selon lui, surtout, on devrait restaurer les budgets des écoles. Dame Mbodj ne mâche pas ses mots. «On constate une fermeture progressive des infirmeries à cause de la réduction des budgets des établissements. La raison en est que le président Macky Sall n’accorde aucune priorité à l’école et à la santé. Il n’a aucun problème pour que ces infirmeries soient fermées aussi bien à l’intérieur du pays que dans les grandes agglomérations. Et c’est une logique de restrictions budgétaires qui est à l’origine de la fermeture de ces infirmeries», a-t-il martelé.
Le patron du Cusems invite le chef de l’Etat à donner des instructions fermes aux ministères de l’Education nationale et de la Santé pour que les écoles soient dotées d’infirmeries aux normes et fonctionnelles dans tous établissements scolaires ayant 2000 élèves ou plus. «On ne réclame aussi des véhicules qui coûtent 3 millions qui peuvent faire des évacuations quand des élèves ont besoin d’être transférés. Donc, nous voulons des infirmeries qui fonctionnent correctement et des ambulances, et que cela soit budgétisé», a-t-il plaidé.