Leaders Politiques en disgrâce: Macky veut se servir de Karim et/ou de Khalifa contre Sonko

par pierre Dieme

Le Président Macky Sall se dit prêt à discuter de la réhabilitation de Karim Wade et de Khalifa Sall. Il l’a fait savoir aux membres du Cadre unitaire de l’islam au Sénégal (Cudis). Une déclaration surprenante dans un contexte où on s’approche d’élections locales importantes où les deux leaders cités sont exclus des listes du fait de leurs ennuis judiciaires.

Bien sûr, c’est un secret de polichinelle que ces dossiers ont été évoqués à plusieurs reprises avec le chef de l’Etat par diverses personnalités à plusieurs occasions. Nous n’en voulons pour preuve que le fait que l’ancien Président Abdoulaye Wade se soit déplacé au palais de la République et que divers protocoles (Qatar, Massalikul Jinane et Conakry) aient été secrètement signés.

Mais, jusqu’ici, il n’y a pas eu de réelles avancées étant entendu que Karim Wade est toujours au Qatar et que Khalifa Sall qui a aussi bénéficié d’une grâce, reste inéligible. D’ailleurs, dans un entretien avec un média étranger, Macky promettait déjà de les amnistier s’il était réélu en 2019. Mais, jusqu’ici, rien n’a été fait parce qu’il sait qu’il détient, là, d’un atout important dans le jeu politique

En tout état de cause, s’il est réellement dans les dispositions de le faire, c’est compte tenu du contexte politique actuel. Car, en faisant le vide autour de lui en éliminant la plupart de ses adversaires potentiels ou réels, le Président de la République a contribué à créer un nouveau monstre politique en la personne d’Ousmane Sonko qui, de ce fait, brille de mille feux parce que la nature a horreur du vide. Il y a donc une dualité de facto entre Macky et Sonko qui se font face et qui se livrent à un combat mortel, politiquement s’entend. Donc, si Karim Wade et Khalifa Sall sont réhabilités, le paysage politique sénégalais va connaitre un autre visage, une autre configuration. Et le leader politique Sonko pourrait ainsi être sérieusement concurrencé par de sérieux prétendants au fauteuil présidentiel.

En cherchant à réhabiliter Karim et Khalifa, Macky ne veut-il alors pas trouver des adversaires à son adversaire Sonko et diminuer ainsi son influence grandissante ? Ce serait en tout cas compréhensible car, s’il laisse les choses à l’état jusqu’en 2024, avec tout ce qui pourrait se passer avec les locales et éventuellement les législatives, Sonko pourrait monter en grade et maximaliser davantage ses chances d’être élu.En clair, il s’est servi de Karim et de Khalifa pour être réélu en les éliminant de la course, il va se servir d’eux pour éliminer un adversaire politique sérieux en laissant la libre concurrence politique se dérouler, ce qu’il avait refusé. Car, comme dans le domaine commercial, si les citoyens ont plus de possibilité de choix crédibles, ils auront moins de propension à subir le diktat d’une forme de monopole ou dualité que Macky et Sonko commence à exercer.

Cela nous semble être ce que cache la stratégie de Macky : Faire tout pour trouver des concurrents à Sonko et diminuer son influence en enrichissant les rangs de l’opposition qui, du reste aura du mal à se réunir du fait justement des ambitions et des égos des uns et des autres. Ce jeu ‘’mackyavélique’’ pourrait ainsi dans les prochaines semaines, alimenter le débat politique en créant les conditions d’un renouvellement de facto de la classe politique qui va s’enrichir de la réhabilitation de Karim et Khalifa. Ce qui est étonnant, c’est que Macky l’affirme tout de go confirmant le fait que leurs statuts font partie des éléments importants de son puzzle en politique. Quand il a su que leur présence pourrait créer les conditions d’un second tour à la présidentielle, il les a fait liquider par des procédures judiciaires montées de toutes pièces.

Maintenant qu’il a en face un adversaire qui ne cesse de monter, il désire réhabiliter Karim et Khalifa pour affaiblir ce dernier. Et secrètement, il nourrit le désir de ‘’recruter’’ au moins un de ses deux leaders (Karim ou Khalifa) en faisant de lui, ce fameux ‘’gloria’’, c’est-à-dire l’élément qui manque après l’arrivée de Idrissa Seck, le leader de Rewmi.

En clair, Macky est toujours dans ses calculs. Et rien ne dit, jusqu’ici, qu’il n’arrivera pas à ses fins.

Assane Samb

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