La coalition Benno Bokk Yakaar respire une certaine santé au moment où du côté de la nouvelle coalition Yewwi Askan Wi de l’opposition, le cas Bougane Guèye Dany, a créé un incident de naissance symptomatique des difficultés, pour l’opposition, de s’unir.
Le motif, les enjeux. Des élections importantes à plus d’un titre. C’est la première fois que les Maires seront élus au suffrage direct. On sera à l’antichambre d’échéances électorales importantes comme les législatives en perspective de la présidentielle de 2024. Mieux, aujourd’hui, les enjeux liés au foncier ont exacerbé les compétitions entre élites dans les localités du fait de l’importance que s’attache à l’agro-business mais également à l’habitat.
Du coup, les mairies sont tant convoitées, au point d’ailleurs que même dans les partis politiques, les chocs des ambitions seront importantes.
La preuve, déjà, au niveau de l’Alliance pour la République (Apr), il y a beaucoup d’expressions contradictoires de volontés de briguer les suffrages. C’est pourquoi, on peut se demander si, aujourd’hui, les coalitions ne sont pas en sursis ?
En effet, pour Benno Bokk Yakaar, maintenir la cohésion interne sera encore plus facile tant que, bien entendu, Macky sera au pouvoir. Car, à coup sûr, la gestion du pouvoir offre l’avantage de pouvoir nommer à des postes des proches et des alliés qui vont rechigner à cracher dessus. Donc, même si, au demeurant, il y aura certainement des remous et des secousses, la coalition pourra encore tenir même s’il faudra se passer de fortes têtes parmi les alliés et les partisans qui, du fait des investitures, ne seront pas satisfaits de la position occupée sur les listes.
Et du côté de l’opposition, il sera encore plus difficile de tenir les troupes même si l’existence d’une charte est de nature à permettre d’assoir les conditions d’un règlement intérieur pour éviter que chacun fasse ce qu’il veut. Mais, comme ici, rien ne les retient sauf leurs volontés de rester dans le groupe, claquer la porte sera encore plus facile. En tout état de cause, il y a des soucis à se faire par rapport à la cohésion des coalitions, étant entendu que le risque de chocs forts d’ambitions est inévitable. Car, les listes étant deux pour chaque coalition, la majoritaire et la proportionnelle, il sera facile, pour chacun de savoir s’il a des chances d’être Maire ou d’être simplement conseiller municipal ou départemental du fait simplement de la position occupée sur les listes et de celle sur laquelle figure son nom.
Donc, certains pourraient être tentés de mettre en place des listes parallèles parce que convaincus qu’ils ont la chance de gagner des élections et que s’ils restaient dans le groupe, ils seraient sacrifiés. La réalité est que les coalitions sont des châteaux de carte, bâties sur la base d’un réalisme politique dicté par les circonstances. L’impératif de s’unir s’impose à tous ceux qui souhaitent gagner des élections du fait du nombre de partis politiques, de mouvements et de potentiels candidats.
Du coup, comme cette unité est basée le plus souvent sur le désir de tirer son épingle du jeu, aucun leader politique ne souhaiterait être mis à l’écart, lésé parce que marginalisé. Et comme il est difficile de satisfaire tout le monde, les sièges étant limités et qu’il faille procéder à des choix, les frustrations seront inévitables.
En 2014 par exemple, l’Apr a souvent été accusé de boulimie électorale par des alliés qui se sont sentis évincés dans des localités où ils pensaient pouvoir gagner. Or, comme les enjeux sont énormes notamment pour ce qui concerne des villes comme Dakar qui est la capitale, on peut imaginer la lourdeur de la tâche de ceux qui seront chargés de ces investitures.
A Benno, tout repose sur les épaules de Macky qui aurait tout intérêt à le plus souvent réunir la conférence des leaders pour davantage éviter les frustrations. La même prudence doit animer l’opposition où il faudra manœuvrer serrer pour justement, éviter le spectre Bougane.
Car, pour toutes les coalitions, seul le dialogue pourra ainsi permettre de sortir indemnes d’enjeux électoraux importants parce qu’ils aiguisent les appétits politiques de nombreux sénégalais.
Assane Samb