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La coalition de l’opposition annoncée entre Ousmane Sonko de Pastef, Khalifa Sall de Taxawu Sénégal, Karim Wade du Parti démocratique sénégalais (Pds) et Serigne Moustapha Sy du Parti de l’unité et du rassemblement (Pur) est constituée de partis « les plus représentatifs ». C’est plus ou moins la conviction du Professeur d’histoire à l’université de Columbia, aux États Unis d’Amérique, Mamadou Diouf, qui pense que cette alliance suit une certaine logique, liée aux transformations opérées tout dernièrement. L’invité de l’émission Objection de la radio Sud Fm du dimanche 29 août, a par ailleurs livré les enjeux des élections locales prochaines. |
Les événements malheureux de mars dernier, partis d’accusations de « viols répétés » et de « menaces de mort » présumés, mais devenus par la suite une affaire politico-judiciaire qui avait secoué l’État et les institutions de la République, pendant près d’une semaine, avaient imposé la redistribution des cartes politiques. D’un côté, il y avait une majorité présidentielle sortie groggy de ces révoltes violentes et meurtrières, et de l’autre, une opposition requinquée, à sa tête, l’accusé Ousmane Sonko, leader de Pastef-les Patriotes. Cette nouvelle donne politique semble déteindre sur la formation annoncée de la coalition de l’opposition qui comprend au moins le Pastef d’Ousmane Sonko, le Parti démocratique sénégalais (Pds) de Karim Wade, le Parti de l’unité et du rassemblement (Pur) et Taxawu Dakar. Ou du moins, c’est l’avis du Professeur d’histoire à l’université de Columbia, aux États Unis d’amérique, Mamadou Diouf. Invité à l’émission Objection de la radio privée Sud Fm, du Dimanche 29 août, M. Diouf dira que « cette coalition semble être pensée en relation avec les transformations qui ont eu lieu et l’arrivée d’une nouvelle force qui est le Pastef et qui fait de la politique de manière différente ». Mieux, poursuit-il, « cette alliance semble tenir en compte cette redistribution des cartes pour d’abord instaurer un système dans lequel il serait plus facile de gérer la compétition, parce qu’on reconnaît que X est plus fort que l’autre ». Pour étayer la force de cette coalition, le Professeur Mamadou Diouf convoque le nouveau souffle apporté par le Pastef d’Ousmane Sonko qui fait autrement la politique, selon lui. Il dira à cet effet que le Pastef ne fait pas partie de l’histoire des alliances des partis sénégalais, mais aussi et surtout que ledit parti a été créé par quelqu’un qui semble sortir « d’une tradition du fonctionnaire » et qui « sort des contraintes confrériques, idéologiques et générationnelles ». L’autre élément convoqué pour mesurer les chances de cette alliance face au régime en place, reste le choix des candidats pour les élections locales. Contrairement à ce qui se fait dans les autres partis, comme par exemple dans la majorité présidentielle où le chef de l’État, leader de la coalition Benno Bokk Yakaar, demande en vain à ses camarades d’attendre ses choix, « cette coalition dit que les bases vont choisir les candidats », indique le Professeur Diouf. Ce qui expliquerait « probablement pourquoi certains leaders de l’opposition sont en train de ruer dans les brancards. Parce que d’habitude c’est effectivement de traiter les questions de candidatures au niveau des leaderships », indique-t-il. L’invité de Baye Oumar Guèye semble, en outre, prendre le contre-pied de certains qui fustigent la démarche entreprise par Sonko et ses camarades qui ont décidé de former d’abord la coalition avant de s’ouvrir aux autres. Pour Mamadou Diouf cette coalition qui est en train d’être mise en place, est non seulement conforme à l’- histoire politique de ce pays, mais aussi elle est « une grande coalition avec un noyau. Ce noyau va être rejoint par d’autres partis. Certains partis de ce groupe semblent être les plus représentatifs ». Il reste ainsi persuadé que l’opposition ne peut pas aller en ordre dispersé à ces élections pour combattre la coalition au pouvoir. LE TROISIEME MANDAT : L’ENJEU IMPORTANT DES LOCALES Quid des enjeux des élections locales du 23 janvier 2022 ? a ce niveau, le Professeur Mamadou Diouf trouve qu’il y a un paradoxe dans la mesure où celles-ci, dans une vraie démocratie, devaient permettre à la base de « s’exprimer, de s’organiser et de créer des infrastructures qui sont du bas vers le haut et d’avoir une représentation la plus forte pour pouvoir avoir la voix des citoyens ». Hélas, se désole-t-il, «pour ces élections locales à venir, l’enjeu principal c’est en fait le troisième mandat ». Il reste ainsi convaincu que le président Sall risquerait fort, s’il perdait ces élections. «les conditions les plus favorables pour une réforme constitutionnelle et un troisième mandat du président Macky Sall, c’est de gagner les élections locales. Parce que ces élections vont valider la nécessité de poursuivre le travail entamé et c’est parce qu’il a choisi les candidats. S’il perd les élections, dans les grandes villes comme Dakar, tout est remis en cause. Parce qu’il n’y a plus la possibilité de parler de validation. Ce qui va arriver, ce sera une remise en cause de sa présidence. C’est à dire qu’il n’est plus le leader en qui les Sénégalais ont confiance », a-t-il prédit. PR MAMADOU DIOUF SUR LE DEFUNT ANCIEN PRESIDENT DU TCHAD : «La particularité de Habré, c’est sa complexité» « La particularité de Habré, c’est sa complexité. Il est à la fois le produit de l’histoire du Tchad. Mais, il est aussi le produit de l’histoire coloniale. Hussein Habré est un administrateur formé à l’école nationale d’administration française. Donc, c’est à la fois quelqu’un de la culture de ce groupe Toubou, la culture religieuse, la culture intellectuelle des gens du désert. Mais, il a surtout la culture coloniale, la culture du temps du monde. C’est cela qui fait sa complexité et son ambiguïté. Ce qui fait qu’il s’est trouvé dans une situation où il se trouve à la fois en conflit à l’intérieur de ces groupes qui sont des groupes du Nord du Tchad qui ont une culture islamique, qui ont un mode de vie nomade, mais en même temps, il a un engagement nationaliste. Le refus de la domination de l’Afrique du Nord, mais aussi à des moments, la résistance contre l’impérialisme français. Habré fonctionne entre les deux. le livre qu’a écrit Moriba Magassouba (journaliste sénégalais décédé à Abidjan), met l’accent sur cette complexité et qui fait que la gauche africaine, dans une certaine mesure, a toujours été divisée dans l’appréciation de Habré » J M DIATTA |