En cette période d’hivernage, les fortes pluies qui se sont abattues dans la région de Dakar, particulièrement au niveau de la banlieue, ont causé plusieurs dégâts dans de nombreuses localités. Aujourd’hui, beaucoup de ces populations sont en train de vivre la galère à cause des inondations. 72 heures de pluie ont suffi pour que plusieurs quartiers changent de visage. Des autorités locales aux abonnées absentes et des populations qui sont laissées à elles-mêmes : tel est le décor qui s’offre au visiteur qui débarque sur les sites submergés par les eaux de pluie.
Après la pluie, ce n’est forcément pas le beau temps. Les populations de la banlieue dakaroise peuvent s’approprier cette assertion. Elles qui sont, depuis 72 heures, envahies par les eaux de pluie. Les dernières fortes précipitations qui se sont abattues sur la capitale n’ont pas laissé intacte la localité de Keur Massar. Malgré l’intervention de l’Etat pour y lutter contre les inondations, le département a subi la furie des eaux de pluie, provoquant ainsi des inondations.
Plusieurs quartiers sont pris en otage par les eaux pluviales. A l’Unité 11, juste derrière la gendarmerie, se niche une population qui vit la misère des inondations. «Chaque année, nous vivons le calvaire. Le chef de l’Etat était venu l’année dernière nous promettre de régler définitivement ce problème. Mais comme vous avez eu à le constater, le problème demeure en l’état. Notre maire, Moustapha Mbengue, a disparu de la nature», a laissé entendre Mme Mbengue. Sa maison est submergée par les eaux. Hier, elle devait passer la nuit à la belle étoile, comme elle a eu à le faire des jours précédents.
«Nous sommes pris en otage par les eaux des différents chantiers»
La Cité des enseignants Aynoumady 1 Keur Massar compte plus de 2 000 habitants. Tous ont passé la nuit à la belle étoile. Leurs cordes vocales ont été cassées par les nombreux appels d’intervention auprès de l’Etat. Ils ont alors pris la décision de se prendre en charge : «Nous sommes pris en otage par les eaux qui nous viennent des différents chantiers qui sont en cours pratiquement dans la commune. A partir de Jaxaay jusqu’ici, au niveau de la construction du pont, toutes ces eaux se déversent dans le quartier», laisse entendre Léopold Babacar Senghor, délégué de quartier de Aynoumady 1. Cette situation a fait que toutes les rues sont inondées. Des volontaires plongent dans les eaux nauséabondes pour déboucher les tuyaux d’évacuation.
A Guédiawaye, les habitants des communes de Golf Sud et de Wakhinane Nimzatt sont dans le désarroi. A Golf Sud, Parcelles Unité 3, l’état de la route principale demeure le souci de ces habitants. Les commerçants qui occupent cette route ont tiré sur la sonnette d’alarme pour demander assistance. «Chaque année, c’est la même situation. Et pis, il y a certains parmi ces populations qui sont dans les quartiers où lorsqu’il p leut, non seulement ils évacuent les eaux sur la route, mais profitent de la situation pour vider leurs fosses septiques. Voilà la situation. Nous sommes obligés de plier les étals ou de fermer boutique. La route étant impraticable, souvent les véhicules sont obligés de faire le tour», souligne Pape Guèye, commerçant.
A Wakhinane Nimzatt, au quartier Baye Laye, Darourahmane est sous les eaux. Plusieurs maisons ont été inondées durant ces dernières fortes pluies. Matelas, lits, armoires, téléviseurs, ustensiles de cuisine sont entassés sur les terrasses. Les canaux d’évacuation des eaux de Baye Laye ne fonctionnent plus. «Je suis vulcanisateur. Tout le quartier me connaît. Vous avez vu, les eaux ont complétement submergé mon atelier de travail. Les tuyaux d’évacuation enfouis ici ne peuvent pas évacuer l’eau pluviale. Et quand il pleut, on ne peut plus travailler. Mais la municipalité que dirige le maire Racine Talla ne bouge pas. Nous n’avons personne pour nous assister. Ils attendent à ce que tous nos biens disparaissent sous les eaux pour venir après, avec des camions hydro-cureurs, pomper rapidement les eaux. C’est ce qu’on appelle médecin après la mort», fait savoir Omar, un vulcanisateur plus connu sous le nom de «Omar Pneu».
Toujours dans ce même quartier, le sieur Serigne Seck, le visage froissé, est resté deux jours sans fermer l’œil. La fatigue l’envahit. Il s’essouffle, seau en main, il revient tristement sur son Calvert : «Je ne peux pas vous recevoir, la maison est inondée. Et c’est dû au canal. Il est bouché. Nous avons interpellé la mairie, ils nous ont fait savoir que c’est le canal central qui se situe vers Darourahmane qui est bouché. Nous demandons le ministre Oumar Guèye à venir voir la réalité. Il n’a qu’à demander où se trouve la localité de Baye Laye pour s’enquérir de la situation. Chaque année, c’est la situation que nous vivons. Et bientôt, vous verrez les agents de la mairie venir pomper l’eau avant de masquer le tout et faire une déclaration devant les télés pour dire qu’ici, dans la commune de Wakhinane Nimzatt, tout va bien. Alors que tel n’est pas le cas.» Par ailleurs, les populations ont décrié le fait que le problème des inondations n’est pas souvent confié à des spécialistes au niveau des mairies. «Il faut que les maires puissent choisir des hommes formés dans ce domaine pour que, lorsque pareille situation surgisse, que ces spécialistes puissent rapidement trouver une solution pour soulager les populations en attendant l’Etat», laisse entendre M. Gningue, habitant de Baye Laye.
Hier, vers 18h, le ciel menaçait encore d’ouvrir ces vannes. Sur les terrasses de maison, bondées de monde, certains, inquiets, priaient encore pour que de fortes pluies ne s’abattent pas sur la banlieue.
Par Abdou Latif MANSARAY