Les morts causées par les accidents de la route continuent d’être nombreux. Chaque année, ce sont des centaines de personnes qui perdent la vie sans qu’une solution ne soit trouvée. Et pourtant, depuis des années maintenant, les autorités annoncent différentes mesures dont l’effectivité reste encore un défi
3000 morts ! C’est le nombre de victimes connues des accidents de la circulation au Sénégal, entre 2017 et 2020. La Direction des transports terrestres en a fait la révélation, le 19 mai dernier. Selon les chiffres de la Brigade nationale des Sapeurs-pompiers, au total, 12.379 victimes d’accidents de la route, dont 257 morts, sont enregistrées depuis le début de l’année 2021. Les routes continuent de tuer ; en attestent les accidents de ces dernières semaines. Or, plusieurs mesures ont été antérieurement annoncées pour freiner l’hécatombe sur les routes. En novembre 2019, lors d’un Conseil des ministres, le chef de l’Etat, Macky Sall, avait annoncé la tenue d’un Conseil présidentiel sur les accidents, en août de la même année. Mieux, l’année 2020 avait été déclarée «Année de la sécurité routière» pour clôturer la «Décennie d’actions pour la sécurité routière (2011-2020)» décrétée par l’Organisation des Nations unies (Onu).
D’autres initiatives avaient été prises pour réduire les accidents. L’Etat avait aussi annoncé dix (10) mesures phares à mettre en œuvre pour venir à bout de ces accidents. En effet, à l’issue du Conseil interministériel du 09 février 2017, des mesures ont été arrêtées par le Gouvernement pour lutter contre l’insécurité routière et réduire significativement le nombre des accidents de la route. Il s’agissait de l’immobilisation et la mise en fourrière de tout véhicule en circulation dont le propriétaire ne l’a pas présenté à la visite (technique), sans motif valable, à l’expiration du délai de visite technique. Toute voiture dont l’état de vétusté est tel que sa circulation compromettrait gravement la sécurité des personnes ou des biens devrait être mise en fourrière.
Dans les mesures annoncées, il a été aussi dit que les réparations à effectuer sur le véhicule devraient être constatées par l’expert chargé des visites de la zone géographique où l’infraction a été commise. Une mise en demeure d’effectuer les réparations dans un délai d’un mois, sous peine de retrait définitif dudit véhicule de la circulation, serait envoyée au propriétaire. Les opérations de mutation de Dakar vers les régions pour les véhicules de transport public interurbain de voyageurs et de marchandises devraient être suspendues, à titre provisoire, sur tout le territoire national. Toujours conformément à ces mesures, la transformation de véhicule destiné au transport de marchandises en véhicule de transports de passagers était aussi interdite. Mieux la transformation des véhicules d’origine destinées à augmenter les places assises pour les passagers ou à créer des porte-bagages supplémentaires sont interdites.
QUID DE LA TOLÉRANCE ZÉRO ?
L’Etat avait aussi décidé d’appliquer une «tolérance zéro» contre les surcharges de personnes et de bagages pour l’ensemble des véhicules. L’âge des conducteurs de véhicules de transport urbain de passagers, taxis urbains est fixé à 25 ans au minimum. L’âge minimum requis pour l’obtention du permis de conduire pour les conducteurs de véhicules de transport public interurbain de passagers et de marchandises est fixé à 30 ans. De même, tous les véhicules motorisés à deux roues devaient se faire immatriculer gratuitement auprès des services compétents du ministère chargé des Transports terrestres pendant 06 mois, à partir du jeudi 16 mars 2017. Passé ce délai, aucun véhicule motorisé deux roues ne sera admis à circuler. Tout conducteur de véhicule à deux roues qui circule sur la voie publique, avec ou sans passager, sans porter un casque homologué verra son véhicule immédiatement immobilisé, sans préjudices de l’amende forfaitaire prévue à son encontre par les dispositions réglementaires du Code de la route. Les dispositions du Code de la route relatives à l’usage du téléphone au volant, au port de la ceinture de sécurité, à l’excès de vitesse, au respect de la signalisation horizontale et verticale seront rigoureusement appliquées. Des années après donc l’annonce de ces mesures, leur effectivité pose problème. L’indiscipline sur les routes est notoire. Et force est de constater que chaque fois, à la suite d’accidents tragiques, c’est un discours va-t-en-guerre qui est toujours tenu par les autorités étatiques, sans qu’une solution définitive ne soit trouvée.
APPLICATION DU PERMIS À POINTS L’Etat n’y arrive pas !
Depuis plusieurs années, la volonté des pouvoirs publics est d’instaurer une politique de permis à points ; ce qui n’a jamais eu lieu. Le permis à point devrait permettre que tout conducteur qui commettra un accident de la circulation ou une infraction au Code de la route de se voit retirer entre 3 et 5 points (selon la gravite de l’infraction) sur son permis qui en comporterait 15. Mieux, il était dit qu’en instaurant les permis à points, si un automobiliste arrive à un solde de points inférieur à 5, son permis lui sera retiré et il devra repasser l’examen pour obtenir un nouveau permis. Le barème des points sera fixé par les responsables chargés de l’exécution de la disposition. Plusieurs années se sont écoulées, l’Etat n’a été en mesure d’appliquer cette mesure qui s’est heurtée, à plusieurs occasions, au refus des syndicats de transporteurs. Et pourtant, diverses échéances ont été données pour son entrée en vigueur. En juin 2017, l’ancien ministre des Transports terrestres, Mansour Elimane Kane, en présidant la signature de la Convention de concession des permis biométriques, avait fixé la date de la mise en œuvre à 6 mois, à partir de sa sortie. Il n’en fût pas le cas. Plus tard, son successeur à la tête ce ministère, Abdoulaye Daouda Diallo a lui aussi donné une date du démarrage de l’application de ce permis à points. «Nous allons mettre en place, à compter de juillet de cette année, le permis à points. Je le rappelle, c’est des permis qui sont destinés à tous les usagers de la route. Les permis à points ne seront pas exclusivement destinés aux transporteurs mais, à tous ceux qui seront détenteurs de permis de conduite», avait-il dit lors de la cérémonie de lancement de la Semaine nationale de la prévention routière. C’était en 2018. A signaler que le système des permis à points est appliqué dans plusieurs pays notamment en Europe, avec des effets positifs dans la lutte contre les accidents de la circulation.
PAR FATOU NDIAYE