“Fouta tampi”, c’est “Fouta fatigué”. Le hashtag qui fait le buzz illustre un mal-être qui va au-delà de cette partie du pays qu’est le Fouta. Si les manifestations de début mars ont été aussi bruyantes, aussi massives, c’est que les populations sont en proie à des difficultés économico-sociales réelles qui dépassentl ’actualité factuelle des accusations de viol.“Fouta Tampi” nous dit que nous sommes toujours en plein dans le “surplace”.
Il rappelle à bien des égards le discours de Kéba Mbaye. En des termes clairs, le juge constitutionnel, s’adressant au président Diouf, martelait : «les Sénégalais sont fatigués». Et il conseillait : «c’est le devoir de tous les Sénégalais de faire preuve de maturité, de garder notre pays de l’aventure et d’assurer son développement harmonieux. Cela ne peut être l’affaire d’un seul homme ou même l’affaire d’un seul parti». C’était en 1981.
19 ans après, presque les mêmes mots ont été tenus devant Abdoulaye Wade, le nouvel élu en 2000, par le président du Conseil constitutionnel d’alors Youssoupha Ndiaye : «les Sénégalais veulent cesser d’être de courageux affamés d’espoir. Ils souhaitent vivre dans la cohésion, la solidarité et la fraternité, dans le respect des valeurs de progrès et dans la primauté.»
Douze ans après, le président du Conseil constitutionnel, Cheikh Tidiane Diakhaté lance solennellement au tombeur de Wade : «Il y a tant de frustrations, tant de souffrances, et parfois aussi tant de désespoir dans nos sociétés que l’urgence s’est pratiquement installée partout.» Macky Sall a été certes réélu au premier tour avec plus de 58%des voix en 2019, mais le mal demeure.“ Les Sénégalais sont conscients qu’ils entrent dans une nouvelle ère.
Ils l’appréhendent autant qu’ils l’espèrent, car ils savent qu’elle sera, en fonction de ce que nous en ferons, une bénédiction ou une malédiction. L’expérience, c’est en effet ce qu’on fait de ses propres erreurs, mais c’est aussi les leçons que l’on tire des erreurs des autres”, dixit Pape Oumar Sakho qui dirige le Conseil constitutionnel actuel. Les choses ont très peu bougé. Et les jeunes, même désœuvrés, ont de l’imagination : Sénégal Tampi, peuvent-ils s’écrier. Ils osent leur dire : tant pis !
Miim Reew