Toujours aucune réparation pour les victimes de Hissène Habré (organisations des droits humains)

par pierre Dieme

L’Union africaine n’a pas encore mis en place le Fonds fiduciaire pour indemniser les victimes de l’ancien président tchadien Hissène Habré, quatre ans après sa condamnation historique au Sénégal, a déclaré aujourd’hui une coalition des organisations des droits humains.
Le 30 mai 2016, Habré a été condamné à la prison à perpétuité pour crimes contre l’humanité, crimes de guerre et torture, notamment pour des faits de violences sexuelles et viol, par les Chambres africaines extraordinaires au sein des juridictions sénégalaises.
Lorsqu’une Chambre d’appel a confirmé la condamnation de Habré en avril 2017, et octroyé 82 milliards de francs CFA (environ 150 millions de dollars US) à 7 396 victimes identifiées, elle a mandaté un Fonds fiduciaire de l’Union africaine pour lever de l’argent en recherchant les avoirs de Habré et en sollicitant des contributions volontaires. Bien que l’Union africaine (UA) ait adopté le Statut du Fonds fiduciaire en 2017 et ait alloué 5 millions de dollars au Fonds, celui-ci n’est toujours pas opérationnel.
En février 2020, le Président de la Commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat, a promis « la tenue très bientôt [d’une] conférence de mobilisation des ressources pour alimenter ce Fonds ». Cependant, il n’y a eu aucune avancée depuis, ont déclaré les organisations.
Lors d’un procès distinct au Tchad, une cour criminelle a condamné 20 agents de l’appareil répressif du régime Habré pour meurtres et actes de torture. La cour a alloué 75 milliards de francs CFA (environ 139 millions de dollars US) en réparation aux 7 000 parties civiles, ordonnant à l’Etat tchadien de payer la moitié de cette somme, et aux agents condamnés d’en payer l’autre moitié. Le gouvernement tchadien n’a toujours pas exécuté son obligation d’indemniser les victimes, ont déclaré les avocats des victimes. Hissène Habré, qui est accusé par une Commission d’Enquête tchadienne d’avoir volé des dizaines de millions de dollars du Trésor tchadien, n’a versé aucune indemnisation.
Le régime à parti unique (1982-1990) de Hissène Habré a été marqué par des atrocités massives et généralisées, dont des répressions ethniques ciblées. Les documents de la DDS retrouvés par Human Rights Watch en 2001 ont révélé les noms de 1 208 personnes exécutées ou décédées en détention, et de 12 321 victimes de violations des droits humains. Habré a été renversé en 1990 par l’actuel président Idriss Déby Itno, et s’est réfugié au Sénégal. Hissène Habré purge actuellement sa peine de prison à perpétuité dans une prison sénégalaise.
Les organisations interpellant l’Union africaine comprennent également le Afrikajom Center, Amnesty International, l’Association Tchadienne pour la Promotion et la Défense des Droits de l’Homme (ATPDH), Human Rights Watch, la Ligue sénégalaise des droits humains (LSDH), la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (RADDHO), et REDRESS.

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