Quelques jours après mon interpellation par la DIC suite à la lettre que j’avais adressée à son Excellence Macky Sall, Président de la République, quelle ne fut ma surprise d’avoir reçu l’appel d’un interlocuteur qui se présenta comme suit « Commissaire, c’est moi Babacar de Sud, c’est un tel (discrétion oblige) qui m’a donné ton numéro ». Ces mots avaient provoqué en moi un double sentiment, d’abord de très grand plaisir d’avoir renoué le contact avec une vielle connaissance, ensuite de fierté et d’honneur d’avoir l’opportunité de pouvoir échanger avec un si grand homme. Ce furent des épanchements et le rappel de vieux souvenirs, les uns plus pathétiques que les autres. Babacar me fit comprendre qu’il avait tenu à m’appeler pour deux raisons, d’une part , me féliciter et m’encourager pour mon engagement citoyen et d’autre part pour la qualité de mes écrits. Je lui ai fait remarquer que de telles appréciations ne datent pas d’aujourd’hui et qu’il fallait remonter jusqu’en 1988.
A l’époque, il m’avait reçu dans les locaux de Sud-hebdo qui se trouvaient à la rue Raffenel ; c’était suite à un article que j’avais produit dans lequel j’évoquais la manifestation du brigadier Matar Fall, avec son épouse et ses enfants devant les grilles du palais présidentiel. Depuis, nous avons gardé les meilleures relations. J’ai mis à profit cet entretien pour exprimer la grande reconnaissance et les très sincères et profonds remerciements de tous les policiers radiés à Sud-hebdo qui nous avait beaucoup soutenus en ouvrant ses colonnes à notre cause ; cela avait permis à l’éminent professeur Kader Boye de faire une analyse pertinente ayant permis de rétablir la vérité et qui lui avait valu ainsi qu’au journal Sud-hebdo des tracasseries de la part des autorités socialistes de l’époque. Je garde toujours en mémoire cet excellent témoignage et ce poignant reportage d’Abdoulaye Ndiaga Sylla sur le quotidien des policiers radiés.
Babacar avait des compétences professionnelles extraordinaires, indéniables, avérées et reconnues par ses pairs. Lors de ce dernier entretien il me confia ceci « Commissaire, il m’arrive trop souvent de me demander si certains journalistes exercent réellement le mêmemétier que moi ». Tout simplement pour dire qu’il avait toujours le souci de voir le journaliste faire montre non seulement de rigueur professionnelle mais surtout de respect des règles déontologiques et d’éthique. Babacar était à la fois un artiste de la plume et un orfèvre du verbe, deux choses qu’il maniait avec finesse, justesse et délicatesse ; ses qualités faisaient de lui un interlocuteur avec qui on éprouvait toujours du plaisir à échanger.
Sur le plan humain, je ne saurais dire plus que ce florilège de témoignages sur ses grandes qualités d’homme généreux, altruiste, modeste, et humble. Il a su cultiver la discrétion et la confidentialité dans ses relations humaines et surtout dans ses œuvres de bienfaisance et dans ses actes d’assistance et de solidarité envers son prochain. C’est pourquoi j’estime qu’il faut éviter de tout dévoiler sur la personne ; nos cœurs, souvent par faiblesse inhérente à notre nature humaine, nous poussent toujours vers des épanchements émotionnels, dès lors, il appartient à notre raison de les contenir pour ne pas faire de révélations qui peuvent, inconsciemment, jurer d’avec la discrétion du défunt. Laissons à Babacar les parts de mythe et de mystère qui l’accompagneront dans sa dernière demeure ou, à n’en point douter, il retrouvera superbement étalés les innombrables fruits de son engagement professionnel, de sa disponibilité sociale et de sa générosité légendaire.
Babacar que la terre te soit légère et Puisse Allah Le Tout-Puissant, Maitre de l’univers et de nos destins d’êtres insignifiants et ignorants, t’Accueillir dans Son Paradis !
Dakar le 03 Aout 2020. Boubacar SADIO
Commissaire divisionnaire de police De classe exception,nelle à la retraite