«Macky Sall se targuait d’avoir «réduit l’opposition à sa plus simple expression», quant à vous, Ousmane Sonko, vous avez réussi à «réduire l’opposition au plus simple balcon».
Ces mots, sortis de la bouche d’un humoriste, le 13 novembre dernier, à l’occasion du meeting de Pastef au Stade Amadou Barry de Guédiawaye (banlieue dakaroise), sont le fruit d’une inspiration portant le signature des Muses. Il a ainsi réussi à arracher le sourire du maître des lieux et celui de ses camarades et alliés.
Le propos est, peut-être, léger et caricatural, puisque la marque de l’humour est la légèreté, mais il ne manque pas de profondeur. L’humoriste n’a pas le temps de s’attarder sur le fond, puisque l’objectif apparent est de faire rire, même s’il arrive d’en dire beaucoup ou assez
L’humoriste du Stade Amadou Barry s’est glissé dans la peau de l’historien du présent. La contextualisation de son récit a donné plus de saveur à son histoire. De nombreuses vidéos ont montré, la Tête de liste de la coalition Sam Sa Kaddu, aux législatives du 17 novembre 2024, par ailleurs actuel maire de Dakar, confiné au balcon, l’air nerveux, faisant des va-et-vient. Celui qui disait, à qui voulait l’entendre, qu’il était le «borom Ndakaru» (propriétaire de dakar), venait de vivre la fâcheuse expérience d’un quartier (Baobab) «réduit» en No Man’s Land par le leader de Pastef qui y a élu domicile, le temps d’une démonstration de force.
Appel d’air et désir de protection
Le choix, peut-être inconscient, du maire de Dakar, de déserter le salon pour se mettre au balcon, pourrait signifier beaucoup de choses. Face à la furie probable des jeunes patriotes, il y a ce besoin de se mettre à l’abri. Le balcon, dans ce cas, pourrait traduire le désir de sécurité et de protection. En plus, le gilet qu’il portait renforçait cette idée. La fausse bravoure qu’il semblait afficher avait du mal à dissiper la peur et l’absence de sérénité.
Le balcon pourrait aussi suggérer une sorte d’appel d’air face au stress et l’anxiété. Les médecins le savent : la suractivation des surrénales entraîne une sécrétion de cortisol qui va activer le système cardiovasculaire et favoriser l’apparition de bouffées de chaleur.
Face à la menace, la Tête de liste de Sam Sa Kaddu est, peut-être, habité par le désir d’évasion. Cet espace qui s’ouvre devant lui symbolise l’inconnu. Une sorte de représentation binaire qui met en parallèle la peur d’être pris à partie et la volonté de rejoindre un ailleurs plus clément. Le balcon, tout comme la fenêtre, est une invite au voyage. Ce n’est pas Aimé Césaire, dont l’inspiration d’écrire son poème : Cahier d’un retour au pays natal
L’opposition au balcon et la volonté de suicide
Le balcon peut évoquer le tragique pour une opposition dont les personnages vont devoir goûter à la saveur de la mort pour mieux apprécier toute la portée de la résurrection du Phénix. C’est un appel à une nouvelle aventure qui ne fera plus de la politique un métier, un gagne-pain, mais un sacerdoce et un don de soi pour la patrie et au service unique des populations.
Le balcon signifie invention du futur. Tous ces jeunes qui ont tété le «Système» sont contraints au sevrage. Leur survie dépendra de la capacité à se prendre en charge, à être résilients, à travailler dur et à être généreux envers son peuple. Celles et ceux qui s’étaient retranchés dans leur petit monde, ont appris, à leurs dépens, que l’argent facile ne construit que des forteresses sur du sable mouvant. La cupidité, l’insolence et l’insouciance qui caractérisaient ce mode de vie (gagner sa vie sans le moindre effort), constituent des antivaleurs que le marteau de «l’Antisystème» doit broyer. Inventer un futur politique revient à s’interroger sur le sens de son existence : Pourquoi nous sommes là ? Que devons faire ? Et que pouvons-nous espérer ?
Bacary Domingo MANE