M. Cheikh Dieng, ancien Directeur général de l’ONAS, a été de nouveau auditionné avant-hier, mardi 22 octobre, par la Section de Recherches de la Gendarmerie. Au cœur de l’enquête : un don de véhicule d’une valeur de 80 millions cfa offert par une entreprise titulaire d’un marché public, soulevant des suspicions de conflits d’intérêts et de falsification de documents. De quoi l’ancien directeur général limogé de l’Onas et ses supporters auraient-ils peur. En définitive, les premiers éléments de l’enquete risquent d’enfouir Dr Cheikh Dieng dans les égouts…
Nouveaux rebondissements dans l’affaire de l’Office National de l’Assainissement du Sénégal (Onas). L’ancien directeur général, Cheikh Dieng, démis de ses fonctions il y a quelques mois, a été entendu mardi 22 octobre pour la deuxième fois par la Section de Recherches de la Gendarmerie. L’audition, qui a duré plusieurs heures, s’est déroulée en présence du Directeur Administratif et Financier (Daf) de l’Onas, un proche de M. Dieng, et s’est suivie d’une confrontation avec le Directeur du projet du collecteur Hann-Fann, un chantier supervisé par l’Onas.
Cette série d’auditions s’inscrit dans le cadre d’une enquête judiciaire ouverte après les déclarations médiatiques de M. Dieng, où il avait dénoncé des pratiques illicites au sein de l’Office. Cependant, le cœur de l’enquête porte sur un présumé don d’un véhicule d’une valeur de 80 millions CFA, offert par une société titulaire d’un marché public. Cet avantage accordé alors que M. Dieng était encore en poste, soulève de sérieuses questions sur de potentiels conflits d’intérêts et sur la bonne gouvernance au sein de l’institution publique.
Il ressort de certaines informations que les auditions auraient permis aux enquêteurs de se pencher plus en profondeur sur ce don de véhicule incriminé et , qui pourrait constituer une violation des règles d’éthique. Certains observateurs critiquent cependant un traitement sélectif de l’information, soulignant que plusieurs aspects de cette affaire semblent délibérément omis.
Le cas du véhicule, un 4×4 Land Cruiser offert par l’entreprise Synergie Afrique, est au centre des investigations. Ce véhicule, initialement présenté comme une acquisition liée au projet du collecteur Hann-Fann, figure dans des documents distribués à la presse par M. Dieng lors de sa conférence de presse. Pourtant, l’Ons a révélé que ces documents auraient été falsifiés, la ligne concernant le véhicule ayant été ajoutée après coup. En effet, la ligne XIV-4 du document original du projet ne comporte pas cette inscription qui suit : un « véhicule 4X4 Land Cruiser». La véritable ligne dans le devis original concernait des plaques en fonte dénommée « Plaques de fonte de classe C250 dimension 800 » destinées au projet d’assainissement.
Suite à cette découverte, l’Onas a déposé une plainte contre M. Dieng le 20 août 2024 pour « falsification de documents ». Ce dépôt a eu lieu un jour avant celui de l’ancien député Thierno Alassane Sall en date du 21 août, qui accuse également l’ex-Dg de malversations. Une question se pose donc : pourquoi ouvrir l’enquête sur les marchés publics avant de traiter celle concernant la falsification de documents ?
Une enquête orientée ?
Les partisans de M. Dieng, quant à eux, dénoncent une enquête orientée voire ciblée, accusant les autorités de vouloir détourner l’attention du véritable enjeu : la gestion des marchés publics par l’Onas Pourtant, selon plusieurs observateurs, il est essentiel de ne pas perdre de vue le fait que M. Dieng a reconnu avoir reçu le véhicule de 80 millions, tout en niant tout acte répréhensible. La question de la falsification des documents reste cependant un point crucial qui pourrait remettre en question la probité de l’ancien directeur. Selon certains acteurs au fait de ce dossier si Dr Cheikh Dieng a menti sur la voiture, il pourrait également avoir menti sur les marchés. C’est simplement une curieuse relation à la probité qui apparait au grand jour.
L’enquête suit son cours à la direction de la Section de Recherches, et l’agenda des auditions est soigneusement encadré par les autorités judiciaires. Tandis que la lumière tarde à se faire sur la gestion des marchés publics, il semble que la question du véhicule reste un point sensible et symptomatique des dérives possibles dans la gestion des fonds publics. En plus de la plainte de l’ancien député Thierno Alassane Sall, il y a aussi d’autres, celles des entreprises que l’ancien Dg avait accusées d’avoir « négocié directement avec le ministre ». L’entreprise VICAS lui avait servi une sommation interpellative par voie d’huissier pour confirmer ses propos. L’huissier n’avait jamais réussi à retrouver l’ancien directeur général malgré les nombreux déplacements effectués pour ce faire. Il avait « disparu », miraculeusement.