Pour diriger la prière à Derklé : des imams transforment la mosquée en ring de boxe et récoltent trois mois de prison

par pierre Dieme

Ahmed Tidiane Ndiaye et Mouhamed Malick Ba ont échappé belle. Âgés respectivement de 56 ans et 47 ans, les deux hommes sont attraits à la barre du tribunal des flagrants délits pour coups et blessures volontaires occasionnant une incapacité temporaire de travail de 21 jours et des chefs d’entrave à l’exercice d’un culte et d’outrage d’un ministère de culte au préjudice de l’Imam Abdoulaye Guèye. Ils sont condamnés à 3 mois assortis de sursis.

L’histoire s’est déroulée à la cité Marine de Derklé où Ahmed Tidiane Ndiaye et Mouhamed Malick Ba sont traduits en justice par l’Imam Abdoulaye Guèye. Dirigeant les prières de la Mosquée de la cité Marine à Derklé depuis plus 10 ans, ce dernier est réputé d’avoir beaucoup investi dans ce temple sacré. Mieux, il se promène toujours avec le projet de construire une école coranique dans la mosquée. Hélas, certains riverains qui voient l’entrepreneur bien gagner sa vie, pensent qu’il se nourrit de l’argent du contribuable.

Le jour des faits, comme à l’accoutumée, Abdoulaye Gueye est allé diriger la prière du “fajr” (l’aube). Après avoir terminé, Mouhamed Malick Ba surgit de nulle part avant de l’assener de coups. Avec l’aide de Mouhamed Malick qui immobilisait l’imam, ils l’ont, selon lui, tabassée avant de lui tordre le cou. N’eut été la rapidité du voisinage, l’Imam prendra cher. À l’issue de cette agression, Mouhamed Malick Ba a porté l’affaire devant la justice. Placés sous mandat de dépôt le 13 mai 2024, Mouhamed Malick Ba et Ahmed Tidiane Ndiaye ont été présentés aux juges du tribunal des flagrants délits de Dakar ce mercredi 22 mai 2024.

Cependant, les prévenus contestent avoir lever la main sur le l’imam Gueye. Le premier nommé qui se défend en premier indique : “être juste venu lui demander de ne pas diriger la prière parce que la cité a un comité qui a décidé de cela”. Mais c’est sans compter sur le juge qui rétorque : “On te reproche aussi d’avoir dérangé la prière du fajr”. Son coopérant en renfort ajoute : “Imam Abdoulaye Gueye n’est pas de la cité et il ne doit pas diriger la prière. C’est une cité qui a été construite par nos pères. Il n’est pas de la cité et il n’habite pas là-bas. En plus, il a été une fois attrait en cours d’assise. On l’a bloqué ce jour-là parce qu’on a constaté qu’un jour, en dirigeant la prière, il s’est trompé”. “Vous n’êtes pas le quartier. Vous ne représentez pas le quartier. Personne ne vous a désigné pour faire la police”, leur assène la présidente.

Dans ce sillage, les avocats de la partie civile réclament la condamnation des prévenus et une somme de 1 million avec la contrainte par corps. “Je sais que mon client est malade. Je sais également qu’il souffre d’une tension. Et il a aussi une autre maladie qui fait qu’il a subi une opération”, renforce Me Ndiogou Ndiaye. Alors que le ministère public requiert l’application de la loi, Me El Hadji Malick Basse, pour la défense, dénonce la “malhonnêteté de la partie civile”. La robe noire renseigne : “Il y a eu d’agissements le 29 novembre 2023. Et le 30, il a fait sa plainte et il n’a pas déposé de cm, ni fait état de cbv. Il a été entendu le 1er novembre, les prévenus le 4 et l’enquête a été clôturée. C’est à une semaine qu’il est allé déposer ce cm en catimini auprès du commissaire. Le dimanche 29, il dit avoir été victime de cbv et à 17h il a célébré un mariage. Vous savez que cette personne est malhonnête. Il faut écarter les cm parce que vous avez un faux intellectuel”. Toutefois le tribunal après en avoir délibéré relaxe Mouhamed Malick Ba et Ahmed Tidiane Ndiaye du chef de coups et blessures volontaires. Le juge les condamne à 3 mois assortis du sursis pour les faits d’entrave à l’exercice d’un culte et d’outrage d’un ministère de culte. Il les ordonne à lui payer solidairement 200 mille francs Cfa à l’Ima Gueye.

Aïssatou TALL 

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