La victoire du duo Diomaye-Sonko a reconfiguré le système politique sénégalais en ouvrant l’ère des grands pôles qui semblent se constituer avant les prochaines élections législatives.
La victoire du duo Diomaye-Sonko a reconfiguré le système politique sénégalais en ouvrant l’ère des grands pôles qui semblent se constituer avant les prochaines élections législatives. Le camp libéral-démocrate, à l’instar du PS, veut peser sur l’échiquier politique face à la déferlante Pastef qui entend assurer sa suprématie sur la scène politique sénégalaise.
Les défis des retrouvailles libérales-démocrates
La volonté de retrouvailles de la grande famille socialiste va rebattre les cartes politiques dans le landerneau sénégalais. Depuis la perte du pouvoir, les libéraux démocrates semblent être encore dans l’expectative, anesthésiés par l’avènement du duo Sonko-Diomaye.
Toutefois, ils pourraient surfer sur le travail de regroupement de la grande famille libérale autour de l’APR déjà entamé par Macky Sall, après le 1er novembre 2020, avec la majorité élargie réunissant le Parti libéral démocrate (PLD/Suxali Sénégal), l’Union des centristes sénégalais (UCS), Bokk Gis Gis, le Parti démocratique sénégalais (PDS) et LDR/Yessal, entre autres. Puisque Macky Sall ambitionnait, sur la fin de son règne, de réaliser le dessein de Me Wade qui voulait que les libéraux restent au pouvoir pendant 50 ans.
Le patron de l’APR a pu intégrer plusieurs cadres libéraux comme Ousmane Ngom, Mahmout Saleh, Me Amadou Sall, Farba Senghor, Oumar Sarr au sein des instances de la majorité présidentielle. La perspective des élections législatives anticipées devrait reconfigurer tout l’espace politique sénégalais. La crainte d’un raz-de-marée de la coalition DiomayePrésident, lors de ce scrutin, pourrait pousser beaucoup de partis à aller vers des regroupements politiques et la constitution de grands pôles.
Toutefois, l’ancien parti au pouvoir reste confronté à des risques d’implosion, avec le cas Amadou Ba qui pourrait remettre en cause cette volonté de retrouvailles de la famille libérale. De possibles querelles entre les “légitimistes” autour de Macky Sall et des “réformateurs” derrière Amadou Ba peuvent affaiblir cette alliance libérale-démocrate.
Les enjeux pour les différentes formations politiques
Néanmoins, plusieurs scénarios peuvent se dessiner à l’aune de cette nouvelle ère politique.
En effet, le choix du PDS de soutenir le candidat de Pastef à la Présidentielle répond à un désir de la formation du Sopi d’assurer sa survie politique. Le PDS, qui était en froid avec le candidat de BBY Amadou Ba, accusé d’avoir comploté avec deux magistrats du Conseil constitutionnel pour écarter son candidat Karim Wade, pourrait s’éloigner de toute forme d’alliance avec l’APR.
Sur ce, les libéraux pourraient craindre aussi d’être happés par le sentiment de rejet de l’APR qui a bouclé 12 ans de règne à la tête du Sénégal.
Par ailleurs, la percée de Pastef dans ses fiefs historiques (Mbacké, Kébémer, Pikine et Kaolack) peut inciter Karim et ses frères de parti à rechercher une nouvelle alliance avec la coalition DiomayePrésident. D’autant plus que les bons résultats de Wallu au sein de l’intercoalition YAW-Wallu lui ont permis de s’arroger une vingtaine de députés au sein de l’hémicycle en juillet 2022.
Le PDS, qui a en ligne de mire la Présidentielle de 2029, est bien décidé à peser sur l’échiquier politique en conservant son noyau dur de députés qui lui assure d’être au centre des tractations politiques à l’Assemblée nationale.
De ce fait, le choix du PDS de faire alliance avec le nouveau régime pourrait s’avérer crucial dans l’optique de la réalisation d’un grand pôle libéral-démocrate.
Par ailleurs, toute défection du PDS et des partis politiques alliés au sein de Wallu est aussi susceptible d’affaiblir le camp libéral-démocrate.
Perspectives d’alliance et de renouvellement
Pour Moussa Diakhaté, responsable à Bokk Gis Gis, cette alliance est une obligation pour la grande famille des libéraux démocrates, s’ils veulent continuer à compter sur la scène politique. ‘’Nous sommes à l’ère des grands pôles. Le PS est en train de bâtir un grand pôle de gauche. Nous (libéraux et démocrates) devons aller vers des concertations et évaluer des pistes de réflexion pour constituer un bloc libéral. La semaine dernière, 49 formations libérales et démocrates, parmi lesquelles on peut citer Rewmi, LDR/Yessal, Bokk Gis Gis, se sont réunies pour discuter des moyens d’aller vers cette voie’’, affirme le député.
D’après le porte-parole du parti de Pape Diop, ce rassemblement des partis libéraux et démocrates ne se fera pas avec le PDS qui, depuis la Présidentielle, assume son appartenance à la mouvance présidentielle.
L’absence d’unité des libéraux pourrait ouvrir la voie à une large voie à la coalition DiomayePrésident qui compte sur ce scrutin afin d’obtenir une forte majorité au Parlement.
Joint par Téléphone, Abdou Mbow, porte-parole de l’APR, a indiqué que son parti a toujours travaillé dans ce sens, mais que pour l’heure, la priorité est à la remobilisation des militants. ‘’Nous travaillons sereinement à faire l’évaluation des dernières élections. Et nous n’excluons pas de travailler avec nos frères libéraux et démocrates dans le sens d’une grande alliance politique’’, soutient le président du groupe parlementaire Benno à l’Assemblée nationale.
Cette perspective d’une alliance libérale-démocrate pourrait constituer une voie de salut du mouvement libéral qui tentera de résister à la déferlante Pastef, lors de ce scrutin. Un moyen aussi pour l’APR et ses alliés de limiter une possible déconfiture qui suit généralement toute perte du pouvoir et de s’arroger ainsi un second souffle politique en vue de la Présidentielle de 2029.
L’ère des grands pôles pourrait aussi ouvrir la voie à un possible renouvellement générationnel de la classe politique sénégalaise. La débâcle des candidats expérimentés comme Khalifa Sall et Idrissa Seck est aussi susceptible d’ouvrir la voie à de nouveaux leaders porteurs de nouveaux projets politiques.