Les appels à plus de probité dans la fonction publique se succèdent. Mais les précédents échecs interrogent sur la détermination réelle du gouvernement. Moderniser l’administration sera-ce enfin une priorité plus qu’un vœu pieux ?
Le nouveau régime veut un changement de comportement à tous les niveaux. L’abandon des mauvaises pratiques devrait commencer par les agents de l’Etat, ce qui justifie la lettre du président de la République, Bassirou Diomaye Faye et de son Premier ministre, Ousmane Sonko. Toutefois, on note que ce n’est pas une première qu’un gouvernement milite pour un service public de qualité. Des initiatives dans ce sens, il y en a eu notamment avec le précédent régime de Macky Sall, sans que les résultats escomptés ne soient atteints.
Quelques jours après sa prise de fonction, le président de la République, Bassirou Diomaye Faye, a écrit à tous les agents de l’administration sénégalaise, sans exception, pour les inviter «à incarner pleinement les principes de Jub, Jubal, Jubanti et que la droiture, la probité et l’exemplarité commandent chacun de leurs actes». Mieux, il les a invités au culte de servir le citoyen sénégalais. Un appel matérialisé plus tard par des mesures de pointage dans quelques services publics, un exercice auquel le nouveau ministre de la Fonction publique, Olivier Boucal, s’est prêté.
L’invite du président de la République a été suivie d’une directive de son Premier ministre, Ousmane Sonko, qui, lui aussi, exige une administration beaucoup plus performante. Dans une correspondance qualifiée de très urgente, le 12 avril dernier, il a donné l’ordre, «afin d’assurer une prise de connaissance et une ferme appropriation des directives du président de la République, Bassirou Diomaye Faye, que sa lettre soit diffusée dans toutes les administrations et qu’un compte rendu lui soit fait dans les plus brefs délais»
Rappelons que malgré son expertise et sa vaillance, des qualité reconnues, l’administration sénégalaise est très critiquée par les usagers. A titre d’exemple, l’accueil dans les hôpitaux, les Sénégalais s’en plaignent. Il s’y ajoute les absences dans de nombreuses structures ou encore le non-respect des horaires de travail. Il ya aussi les longues et lourdes procédures administratives pour disposer de certains documents et le manque d’interlocuteurs dans plusieurs services. Des Sénégalais qui ont des problèmes avec la justice s’offusquent souvent des conditions de la garde à vue et de l’accueil dans les Commissariats de Police et Brigades de Gendarmerie…
Certains services publics sont minés par des pratiques peu orthodoxes qui favorisent la corruption. Des rabatteurs s’infiltrent dans la délivrance de casiers judiciaires, certificats de nationalité et autres documents d’état civil ou des permis de conduire, rendant les irrégularités multiples. Ces exemples ne sont pas des cas isolés, car les mauvais comportements dans les structures publiques sont nombreux. Reste maintenant à voir si le gouvernement du président de la République, Bassirou Diomaye Faye, saura redresser la baraque ?
LE PAMA DE MACKY POUR LA MODERNISATION DE L’ADMINISTRATION DANS LE DUR
En effet, les directives n’ont pas manqué du temps de son prédécesseur, l’ancien président de la République, Macky Sall, sans qu’un véritable changement ne soit noté. En avril 2016, lors du Forum National sur l’Administration à Diamniadio, il avait demandé aux agents du service public, «de s’adapter aux exigences des citoyens et de faire preuve de simplicité, de disponibilité et d’efficacité»
Mieux avait-il trouvé, «l’administration est, à bien des égards, obligée d’apporter les changements nécessaires aux fins d’actualiser son organisation, ses méthodes et ses procédures». L’ancien président de la République, étant convaincu de «l’impérieuse nécessité d’élaborer et de mettre en œuvre un nouveau modèle d’administration publique», lors de ce forum, il avait en outre jugé «qu’il fallait également engager la refondation des structures, des procédures et du management des ressources humaines de l’Administration».
Dans cette optique de la réforme de l’Administration, en vue d’améliorer la qualité des services rendus aux usagers, le président Macky Sall a procédé, le 05 août 2019, au lancement du Programme d’Appui à la Modernisation de l’Administration (PAMA), qui a pour but de contribuer à l’action de modernisation de l’Administration du Sénégal. «Le principal objectif du PAMA est de faire tenir à l’Administration son rôle de moteur dans le processus d’émergence à l’horizon 2035».
Selon le ministère de la Fonction publique et de la Transformation du Service public d’alors, chargé de conduire la réforme de l’Administration, «Le PAMA comporte trois composantes : L’optimisation du cadre organisationnel de l’Administration qui adresse les problèmes de structuration des organisations, de déconcentration et de décentralisation des centres de décisions publics ; L’amélioration de la qualité des services aux usagers qui concourt à renforcer la gestion axée sur les résultats, la transparence, la bonne gouvernance et la qualité des services rendus aux populations ; La professionnalisation de la gestion des ressources humaines qui vise à renforcer les capacités des agents et à promouvoir les principes et les valeurs du service public dans la conduite des politiques publiques et la délivrance des services publics de tous les jours». Constatant toujours peu d’avancées, il a demandé à son gouvernement, en Conseil des ministres du 26 avril 2023, «de prendre toutes les mesures nécessaires pour toujours assurer la continuité́ et la qualité́ du Service public dans l’ensemble des secteurs, en faisant respecter les règles de déontologie».
Fatou NDIAYE