Un certain protocole rend peu probable tout deal entre Macky Sall et Ousmane Sonko 

par pierre Dieme

Ce protocole a été révélé par Confidentiel Afrique, se présentant comme « un journal numérique panafricain indépendant,  qui traite exclusivement l’information de première main, pas à la portée du grand ou intermédiaire public en général ». Il s’est intéressé à notre fameuse élection en cours et lui a dédié une étude exclusive, publiée le 23 juin 2023, avec pour titre celui-ci : « Sénégal-Élections présidentielles : Sassou N’Guesso, Mohamed VI, L’Émir Qatari derrière le Protocole de Doha pour mette en selle Karim Wade ».

D’emblée, les auteurs de l’étude, les journalistes Ismael AÏDARA et Hyppolyte GOURMANTIER ont affirmé que sur l’axe Dakar-Doha-Rabat-Brazaville, «  se jouent les derniers dessous de cartes du protocole de Doha, presque mis en boîte et aux relents insoupçonnés en prélude à la présidentielle de février 2024, que déflore Confidentiel en exclusivité ». L’odeur du « pétrole sénégalais » serait à la base, selon eux, de toute l’attention portée à notre élection presque inédite. La même odeur ayant suscité « un grand intérêt chez deux géants du secteur qui ont commandité des sondages entre mars et avril 2023, donnant vainqueur l’opposant Sonko ».

Les journalistes font état d’un rouleau compresseur de ce qu’ils appellent « la persécution au forceps et affligeante » qui se dresse depuis le 30 mai contre Ousmane Sonko, « l’opposant le plus populaire et farouche du régime Macky Sall »[1]. Dans le cadre de ce rouleau compresseur, « les tractations sont menées en sourdine sur l’axe Dakar-Doha, loin du chaudron politique sénégalais marqué depuis juin dernier par des brimades judiciaires, manifestations violentes et meurtrières, vagues d’arrestations et l’ouverture d’un dialogue avec l’absence de l’opposition significative ». Pour se faire plus convaincants, les deux journalistes révèlent que Confidentiel Afrique est en possession d’ « informations crédibles exclusives (qui) confirment des manœuvres incessantes pilotées par le Roi Mohamed VI, le président congolais Sassou N’Guesso et l’Émir Qatari Cheikh Tamin Ben Hamad Al Thani pour tirer d‘affaire Karim Wade, le fils de l’ancien Président sénégalais Abdoulaye Wade (2000-2012) ».

Pour se faire plus explicites, les deux journalistes font état de « câbles diplomatiques autorisés, de missi-dominici en service et aux ordres du Roi, de l’Émir et du président congolais, qui ont multiplié ces derniers mois des allers-retours entre les capitales Rabat-Brazzaville-Kinshasa et Doha, pour discuter avec (….) Karim Wade des conditions de son retour au Sénégal ». Les journalistes en viennent à ce qu’ils appellent « le deal qui se précise entre Macky Sall et Karim Wade », sans oublier les « garanties solides » qui leur ont été données par « les médiateurs plénipotentiaires » engagés dans leur rapprochement. Ils rappellent la partition que joue dans le « Protocole » Félix Tshisekedi, « qui entretient des relations inoxydables de proximité avec Karim Wade », relations encouragées et soutenues « par une poignée de richissimes hommes d’affaires qataris qui font du business dans les mines en République démocratique du Congo (RDC), essentiellement dans la Province du Katanga ». Les journalistes voient dans sa partition une sorte de retour de l’ascenseur vis-à-vis de son bienfaiteur Karim Wade, qui l’a introduit au Qatar auprès de l’Émir en mars 2021, par un voyage officiel à Doha minutieusement préparé. Voyage « révélé en exclusivité en son temps par Confidentiel Afrique », précisent les journalistes.

Ils rappellent ensuite « la sortie expéditive nocturne de la prison de Reubeusse »  de Karim Wade « devenu entre-temps un puissant et incontournable lobbyiste au Qatar, aux frais de l’Émir et de son entourage ». Le même Émir qui « supervise en coulisse depuis mi-janvier 2023 les négociations en coulisse ». Ils signalent aussi que « derrière cette mission de rapprochement Macky-Karim, se cache la main d’un magnat pétrolier sahélien, assidu visiteur de Dakar et de Doha ». Selon leurs informations, ajoutent-ils, « le ‘’Protocole de Doha’’ s’articule autour d’un ticket Macky-Karim Wade lors de la prochaine présidentielle de février 2024, en vue d’affaiblir sans doute le pôle radical de l’opposition incarné par le leader charismatique du Pastef, le chef de file le plus populaire de l’échiquier politique sénégalais, Ousmane Sonko ». Et, selon des sources qu’ils trouvent crédibles, « un poste de Premier ministre, quatre portefeuilles ministériels stratégiques et postes de DG de sociétés publiques du parti de Karim Wade occupent une place de premier plan dans les négociations de Doha »[2].

Cependant, une autre source leur a révélé – du moins c’est ce qu’ils avancent –  que tout n’était pas facile dans les négociations et que « des tractations menées sur l’axe Dakar-Doha par de bonnes volontés se sont avérées infructueuses au finish ». Donc rebelote, selon leur propre expression, et l’axe Doha-Rabat-Brazaville reprend les cartes en main, « pour sauver le Président Macky Sall et le retour sur un tapis rouge du fils de l’ancien Président Abdoulaye Wade ».

Et nos journalistes de terminer par des secrets de sondages par des compagnies pétrolières étrangères « qui misent sur l’exploitation des ressources gazières et pétrolières annoncées en 2024 

». Deux d’entre elles « en ont commandité à deux cabinets privés réputés sérieux ayant pignon sur rue à Londres et à Sydney, pour peser les chances et les faiblesses d’une poignée de potentiels candidats déclarés à la présidentielle de février 2024, short-listés par ces cabinets »[3]. Nous étions entre mars et avril 2023 et l’un des deux sondages « crédite dès le premier tour de 52,34% des voix l’opposant Ousmane Sonko et le second fait état d’un report massif de voix sur le leader du Pastef en cas de deuxième tour ». Et l’un des cabinets de faire remarquer que « le jeune leader de l’opposition sénégalaise Ousmane Sonko est doté d’une côte de popularité incompressible en l’état actuel et au moment du closing des enquêtes ». Je n’ai fait que citer.

Ces dernières informations ne sont plus un secret pour personne, surtout pas pour le tout prochain président sortant, « son » candidat et sa coalition. Ce « Protocole de Doha » le serait, par contre, pour beaucoup de nos compatriotes. C’est pourquoi, il a retenu mon attention. Des gens seront prompts à me rétorquer que c’est de la pure invention. Les journalistes de Confidentiel Afrique seraient vraiment téméraires et leur mémoire particulièrement fertile, s’ils s’aventuraient à imaginer une telle histoire. En tout cas moi, j’y crois jusqu’à preuve du contraire. Les dernières manœuvres du président-politicien depuis le 3 février, en accord avec son parti et celui de son acolyte Karim Wade, peuvent bien faire penser à ce « Protocole de Doha ». Doha où vit quand même le « candidat du peule » depuis sept longues années et sous la bénédiction de l’Émir. Ce « Protocole » nous rappelle aussi que Macky Sall et Denis Sassou Nguesso sont de grands amis. Nous ne pouvons pas non plus, ne pas penser à ses rapports avec le Roi Mouhamed VI qui doivent être excellents. Ce n’est quand même pas pour rien qu’il a choisi Rabat pour y déménager avec sa famille, après qu’il aura quitté le pouvoir, avec beaucoup de regrets. C’est donc porter lourdement tort à Ousmane Sonko que d’associer seulement son nom à ceux de ces deux individus, encore plus d’imaginer un seul instant  qu’il pouvait se retrouver dans un deal avec eux. Ils sont loin d’avoir les mêmes préoccupations et notre Seigneur ne les a probablement pas créés avec la même formule. Le temps nous permettra d’en avoir le cœur net, in shaa ALLAH.

Dakar, le 10 mars 2024

Mody Niang


[1] Le rouleau compresseur date de bien avant ce 30 mai. Il avait commencé déjà avec la radiation d’Ousmane Sonko le 29 août 2016.

[2] Ils auraient pu réaliser tout cela, s’ils avaient réussi à nous imposer la date du 15 décembre 2024.

[3] Je me garde de citer ici ces potentiels candidats, qui l’ont été pourtant par les cabinets.

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