Le Pr Mary Teuw Niane, Président du mouvement pour la transformation nationale et candidat à la présidentielle a passé en revue les questions sur le parrainage, les réformes universitaires, le pétrole et le gaz. Il a déclaré que le « car rapide du Bby a échoué.» Il était l’invité du Grand Oral sur Rewmi Tv.
A deux mois de la présidentielle, votre parti est-il prêt ?
Notre parti l’est dans la mesure où c’est un jeune bébé car nous sommes présents dans tous les départements et nous l’avions pu grâce au parrainage, nous en sommes à plus de 51000 parrains, dans plus de 8 régions nous avons dépassé les 2000 et nous voulons atteindre les 10 régions. Nous avons les parrains qu’il faut et allons rassembler la caution. Nous sommes des intellectuels et un parti pauvre. Nous pensons qu’il faut, nous militants et responsables nous soutenir afin de rassembler cette caution.
Avez-vous rencontré des difficultés lors de la collecte de parrains ?
Nous sommes très modestes dans le discours surtout que c’est une donnée à remplir pour être candidat. Nous faisons tout pour réussir car nous avons des difficultés. Nous avons fait beaucoup de villages ce qui nous a permis d’avoir plus de 2000 parrains et c’est positif. Nous avons eu des difficultés car dans cette période nous avons une situation à revoir. Les formations politiques qui remplissent les conditions d’avoir le nombre de maires, de conseillers et de députés devraient s’en tenir au parrainage des élus au lieu de polluer l’espace pour empêcher les autres d’y accéder. Tout le monde parle d’élections inclusives mais, en réalité, ces formations politiques veulent des élections entre elles et sans les autres. J’ai reçu des pièces d’identité de gens qui sont spontanément venu nous les livrer. C’est une méthode de contrôle du nombre de candidats. Il faut être éthique et honnête. Il y a le marché du parrainage qui est là et un vrai business avec des gens qui vendent leur pièce et d’autres les achètent. Les groupements dont les Gie de femmes, les mouvements de femmes sont ciblés par des partis et candidats et qui achètent systématiquement les parrains. Mais il faut arriver à un contrôle. Aujourd’hui personne ne sait comment est constitué le logiciel qui va surveiller le parrainage.
Parlons de cette polémique autour des chiffres. Certains avancent des millions de parrains. Le total de parrains risque de dépasser le nombre d’électeurs inscrits ?
C’est absurde mais il faut juste de l’intelligence. Car ils peuvent collecter trois millions 700 pour celui-là qui a annoncé le chiffre le plus élevé. Mais on ne peut déposer que 58900 parrains. C’est peut-être pour dire que nous avons la moitié du corps électoral et que demain qu’il justifie un hold-up électoral. C’est tragique. C’est absurde car c’est la moitié des gens inscrits. D’autres parlent de deux millions ou plus. Nous, nous sommes transparent et nous en avons plus de 50.000 et notre objectif est d’en avoir les 60 000, pas plus.
Quelle est la part des femmes dans votre programme ? Quelle place pour la femme sénégalaise, en général ?
Il faut libérer les femmes. Il leur faut des métiers car notre pays est très en retard dans la formation des femmes. On parle de femmes gendarmes, policiers au moment où la Gambie en avait déjà. Nous allons faire des efforts. Quand nous aurons l’électricité partout, nous allons mettre au musée le mortier et le pilon et l’enlever dans certains quartiers. L’autre élément c’est l’eau car dans le Djolof des femmes conduisent des charrettes et dans la banlieue des femmes cherchent de l’eau. Cela doit disparaître. L’autre aspect c’est la mortalité à la naissance. Avec la santé publique et l’accès aux soins, aux visites prénatales, le numérique va jouer un rôle. Nous n’avons pas suffisamment de spécialistes en gynécologie et il faut y remédier. Pour le cancer également, nous avons une politique large. Pour le diabète, nous allons installer un hôpital pilote pour les équipements et y mettre une UFR de la santé et partout pour les aider. C’est la question de l’entreprenariat féminin afin que les femmes aient surtout ce qui est du commerce et nous allons les aider dans la formation mais aussi à une production pour des revenus et valoriser leurs activités.
Après la tournée dans beaucoup de pays, pensez-vous mettre le doigt sur quelque chose de nouveau ?
Il y’a deux choses où même trois. La première c’est que partout où je me suis rendu, notre système éducatif est inadapté, il faut le reprendre. L’autre c’est notre agriculture car on n’a pas mis l’élément de base pour avoir une agriculture pour une souveraineté alimentaire et une industrie agro-alimentaire. C’est aussi la question de l’eau avec 12 mois sur 12. L’élevage aussi c’est un problème et nous avons 3 millions de vaches avec 59 milliards de lait en poudre que nous importons. Il n’y pas de politique d’insémination de toutes les vaches pour la santé de la population et du lait. Je plains les enfants ; un enfant qui va à l’école sans le lait c’est un problème. C’est dramatique et cela peut être réglé et cela fait partie des choses que nous voulons faire.
En tant que scientifique quelles solutions préconisez-vous pour lutter contre le chômage des jeunes ?
Il faut être honnête, le chômage ne se règle pas instantanément. Wade n’a rien fait, Macky non plus. Il faut d’abord une solution dans la durabilité et une autre à court terme. Il a y’a la réforme du système éducatif et il faut donner à la formation la place majeur dans ce système et permettre aux élèves de choisir entre aller en formation générale avec initiation à un métier. Il y’ a le collège d’enseignement avec 4 ans pour avoir le Cap et le Bep. D’autres feront le BT et donc nous allons mettre les universités nationales technologiques à Matam, Mbacké, Mbour et Sédhiou pour la formation. Le grand déficit c’est que les gens n’ont pas de métiers. C’est comme ce que Macky fait à Diamniadio. C’est de la pacotille. Il faut des ouvriers qualifiés. On va développer l’agriculture et les industries. La solution c‘est le programme «niax jarinu». Il faut de grands travaux pour que les jeunes soient formés et puissent gagner leur vie en attentant que murissent les réformes structurelles ; il faut du concret.
Comment comprendre que ce pays dispose de richesses mais il existe toujours la pauvreté. Est-ce de l’incompétence des autorités ou le colonialisme en marche ?
Ce sont les deux à la fois. Les autorités n’ont pas une vision à long terme. Il y avait un programme avec le Pse ; mais depuis lors avec le Pse ce que fait le gouvernement c’est tout le contraire. Il n’y pas de planification y compris l’administration et le cadre qu’il faut pour des politiques publiques. On en manque. Il y’a toujours ce lien avec le colonialisme. Nous sommes un pays où on parle de chômage mais nous savons que le secteur pourvoyeur d’emploi est la pêche et il y’a des chômeurs. Il faut arrêter les accords de pêche et assurer les rotations dans l’exploitation des ressources maritimes, équiper les pêcheurs et que les jeunes s’y intéressent. Mais tout le monde sait que la question de la monnaie est aussi importante. Nos dirigeants sont scotchés sur le Fcfa. Que le pays aille vers sa propre monnaie et on a de bonnes conditions avec les gisements d’or. Mais l’or est invisible dans ce pays. Les bijoutiers dénoncent cela. Alors il faut refaire une monnaie sénégalaise comme la Gambie, la Mauritanie le Ghana. Mais ce colonialisme est dans la tête des gens. Le colon est dans la tête et quand on dit de faire des écoles qui forment le sénégalais, le «nité», selon le sénégalais et enseigner nos valeurs de culture et de civilisation, des gens vont sortir des bois comme des gourous et vous taper dessus. Des intellectuels qui sont des conservateurs et donc il faut remettre en cause ce système qui ne favorise pas le bien être des gens. Le Brt, ‘’ila Touba’’ c’est bien mais allez à Mbadakhoun où des familles peinent à assurer, les trois repas.
Des universitaires sont sortis de leur silence pour taper sur la table pour dire non au recul démocratique. Comment appréciez-vous cela ?
Ce pays a beaucoup reculé car Diouf avait trouvé un système balbutiant avec Senghor et le problème des trois et quatre courants. Il a libéralisé. Quand en 2000 il y’ a eu la réforme du code électoral, c’est un geste très fort et il a dit qu’il n’y enlèvera aucune virgule en nommant un militaire au Ministère de l’intérieur pour les élections. C’est quelque chose qui relève de nos traditions et valeurs. Wade a apporté des avancées et Macky a fait reculer la démocratie car beaucoup d’acquis ont été remis en cause. La dernière décision pour moi c’est inélégant. Quand la Cena a décidé de dire que Sonko devait récupérer sa fiche de parrainage et que quelques jours après il dissout la Cena et renvoie les membres pour en nommer d’autres, je pense que le moment était inapproprié et le message c’est du « ma tey». Il est coutumier des faits comme lors des locales. Le monsieur qui avait les dossiers de candidature du Pastef à Matam, non seulement il a fait une malversation mais il a été reçu par Macky. Des actes qui ne sont pas à la hauteur de la fonction de Président. Nous allons à ces élections qui pouvaient être plus apaisées. Il a fait un geste en ne présentant pas sa candidature. Je pense qu’il doit pouvoir se dire que le pays ne s’arrête pas à lui ni à ce qu’il veut imposer.
La situation de Sonko et des détenus politiques préoccupent des universitaires. Partagez-vous cet avis.
Ce sont des détenus politiques et non de droits communs ; mais pas pour ceux qui ont attaqué des maisons ou des bus. Personne ne sait ce qu’on leur reproche. Ce souvenir c’est ce que disaient nos doyens pour le PAI clandestin et la traque. La longue chasse aux rouges et qui est là et ce n’est pas bon pour la démocratie. Tout le monde doit respecter la démocratie mais le premier c’est celui qui a la force de coercition et de donner l’exemple et de faire baisser la tension car il le faut. Il doit apaiser.
La présidentielle se tient dans un contexte de tensions. Le débat n’est-il pas parasité ?
Naturellement parce qu’il y’en a qui y participent et d’autres non. Nous sommes dans des questions de liberté qui n’auraient jamais dû être et de possibilités de participation ou non alors qu’ils devaient s’engager dans de vrais débats sur les problèmes du pays. Regardez cette émission, combien de temps nous avons consacré à ces questions ? Le car rapide BBY est en train d’échouer et le président lui-même a manqué de retenue et a perdu son self en s’attaquant à ses propres responsables. Il est de nature calme. Et donc j’ai dit que le sondage est mauvais pour son camp et il a dérapé jusqu’à traiter ces collaborateurs en des termes qu’il ne devait pas utiliser. Il y’a une panique dans le car rapide Bby.
Des enseignants s’alarment contre la fermeture des universités. Qu’en pensez-vous ?
Je pense qu’il faut que l’état revienne sur cette décision de fermer l’Ucad et les autres universités. On ne peut pas fermer une université car l’éducation de manière générale est la base de la transformation d’un pays. L’espoir de bâtir et de construire un pays repose sur le système éducatif. Ceux qui ont la chance d’avoir les moyens ont envoyé leurs enfants dans le privé. Mais les autres qui n’ont que l’enseignement public supérieur sont à l’arrêt et avec cet arrêt déjà même s’il y avait reprise d’autres seront découragés. Donc il faut que l’état discute avec les acteurs du système dont le Saes, le Sudes, etc. et les amicales des étudiants et les coordinations des étudiants pour un consensus et reprendre les études. L’enseignement à distance est de l’absurdité car avec l’Uvs il fallait d’abord mettre le cadre : un étudiant un ordinateur. Mais les étudiants ne l’ont pas réussi et on forme les enseignants sur cet aspect car ce n’est pas la même pédagogie.
Vous avez conduit beaucoup de réformes. Alors pouvez-vous-nous faire un état des lieux ?
C’est le choix d’arrêter les réformes en 2019. Tous les pouvoirs sont incapables de la faire sans la dire ? Car ces réformes c’était sur 10 ans. Et je dis même en 2019 ; le pouvoir en place a décidé de ne plus faire de l’éducation et la formation une priorité. Regardez les lycées professionnels, ils sont tous comme ils étaient à Kaolack et à Sandiara, que des vestiges ! Les infrastructures ont été lancées mais n’ont pas été terminées. Sur les 26 bâtiments, même pas 10 achevés. Le centre universitaire de Kolda et les autres chantiers des universités sont au même niveau. On avait prévu des espaces numériques ouverts et les chantiers ne sont pas terminés. La cité du savoir n’est pas fonctionnelle.
MOMAR CISSE