Le président Macky Sall a signé un décret nommant les nouveaux membres de la commission électorale nationale autonome (CENA). Interpellé sur la question lors de l’émission Jury du Dimanche sur les ondes de la 90.3 Iradio, Dr Abdourahmane Diouf, leader du parti Awalé et candidat déclaré pour l’élection présidentielle de 2024, indique que le président Macky Sall a été subtil. « Il a changé une illégalité par une autre illégalité.
Et c’est d’ailleurs ce qu’il essaie de présenter comme argument. Parce que tout le monde savait que la CENA, telle qu’elle fonctionnait dans sa composition, n’était pas légale. On devait changer un certain nombre de membres depuis longtemps. Et puisque l’opposition en avait fait son cheval de bataille, lui, il n’en a jamais tenu compte. Donc, il se contentait de cette illégalité dans la composition de la CENA, tant que ça lui plaisait, tant que la CENA était à ses ordres. Et maintenant, une fois que la CENA a pris une décision contraire aux intérêts de la République, aux intérêts politiques du régime, le président Macky Sall les a changés.
C’est là où se trouve la subtilité. Parce que quand vous critiquez ce changement, on vous dit mais c’est vous qui avez dit qu’il fallait changer la composition de la CENA. Mais c’est un changement, c’est une illégalité qui remplace une autre illégalité », déclare-t-il. Ainsi, informe-t-il, ils ont, au niveau du FITE, (Front pour l’Inclusivité et la Transparence des élections), saisi leurs avocats, pour excès de pouvoir, un recours en annulation qui a été déposé.
« En déposant ce recours, il y a l’espoir du citoyen qui croit en sa justice, parce que nous nous croyons en la justice, c’est pourquoi nous l’avons saisi, mais nous ne nous faisons pas non plus d’illusions. Parce que cette magistrature-là, dans son domaine purement politique, est très instrumentalisée. Mais nous espérons encore qu’il y a des magistrats qui croient au sacerdoce citoyen qui est le leur et qui vont dire le droit. Nous espérons. Donc c’est l’espoir de nos citoyens qui ne se fait pas d’illusions.
Et si le droit n’est pas dit, renseigne Dr Abdourahmane Diouf, ils s’en accommoderont. « Nous n’avons pas d’autre choix. Ce qui est important, c’est de voir que cette opposition-là fait confiance en sa justice et allait se plaindre devant sa justice. Nous nous accommoderons de la décision de justice. Maintenant, il n’y a pas que la justice. Vous n’avez pas une autre stratégie de lutte ? Notre stratégie de lutte, c’est la politique », soutient-il.
Dans un autre registre, il a abordé la question du processus électoral qui, selon lui, ne peut pas conduire à une élection présidentielle transparente et surtout inclusive. « Absolument pas. Non, justement. Non, parce que le premier tour, encore une fois, c’est le parrainage. Aujourd’hui, nous avons tous l’expérience du parrainage. Moi, je l’ai déjà vécu en 2019, je l’ai vécu lors des élections législatives sans aucune difficulté. Mais nous savons qu’il y a encore cette part d’arbitraire, Cette part de sélectivité dévolue au régime en place qui peut éliminer des candidats sans que les candidats sachent pourquoi on les a éliminés. Donc ça, c’est un biais extrêmement important. La sélection des candidats aussi est un problème important. Quand la justice tranche pour qu’un candidat soit maintenu sur les listes électorales et que la direction générale des élections, qui est une administration qui doit s’exécuter, ne s’exécute pas. Mais là, on n’a même pas besoin de faire du droit pour comprendre qu’il y a une discrimination. À partir du moment où le tribunal a arbitré, cette décision doit être tenue en compte », a-t-il dit. Avant de conclure : « et ce sont ces petites injustices cumulées qui font que les Sénégalais n’acceptent plus que ce régime continue à les gouverner. Parce qu’en pensant tricher, entre guillemets, pour rester au pouvoir, ils sont en train de montrer aux gens qu’ils ne sont pas dignes de confiance, et qu’ils ont à la limite peur des opposants qu’ils ont en face d’eux ».
Cheikh Moussa SARR