Le combat des manifestants arrêtés à Dakar

par pierre Dieme

La plupart des procès ont eu lieu hors de la capitale avec des décisions relativement clémentes. Mais à Dakar, les adultes font face à des charges criminelles pour lesquelles la détention préventive peut être prolongée indéfiniment

Dans le Sénégal actuel, un sujet préoccupe particulièrement la population : la différence de traitement entre la capitale Dakar et les autres régions du pays en matière de justice. En effet, alors que de nombreux procès de manifestants se sont soldés par des relaxes ou des peines légères, Dakar semble être le seul endroit où la répression est particulièrement forte.

Cela se reflète notamment dans le cas des militants arrêtés lors des émeutes de mars et juin 2023, en lien avec les affaires judiciaires impliquant l’opposant Ousmane Sonko. Alors que la plupart des procès ont eu lieu hors de la capitale et ont abouti à des décisions relativement clémentes, à Dakar, seuls les mineurs ont été jugés en flagrant délit. Les adultes, quant à eux, font face à des charges criminelles telles que l’association de malfaiteurs ou la participation à un mouvement insurrectionnel, pour lesquelles la détention préventive peut être prolongée indéfiniment, selon des témoignages recueillis par Le Monde.

Cette différence de traitement soulève des interrogations sur la partialité de la justice et la ligne intransigeante du pouvoir. Les détenus et leurs avocats attendent avec anxiété la tenue de leur procès, mais certains en viennent à douter qu’il y en aura un jour.

La situation est encore plus préoccupante pour les partisans d’Ousmane Sonko. Suite à sa condamnation à deux ans de prison pour viol en juin, des émeutes ont éclaté et ont fait vingt-trois morts selon Amnesty International. Depuis, le parquet a fait appel de plusieurs remises en liberté provisoire accordées à certains détenus. Et pour couronner le tout, le pouvoir a dissous le parti de Sonko et a radié son nom des listes électorales, l’empêchant ainsi de se présenter à la prochaine élection présidentielle prévue en février 2024.

Pour l’opposition et une partie de l’opinion publique, il ne fait aucun doute que ces mesures sont une tentative de museler toute voix dissidente et de s’assurer une réélection sans accroc. Mais pour les détenus et leurs familles, c’est un combat qui continue pour la justice et la liberté.

En attendant, ils restent dans l’incertitude et l’attente d’un procès qui pourrait ne jamais arriver.

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