Il s’impose de dire au Président de l’UMS et au Ministre de la Justice que nous justiciables voulons bien respecter l’institution judiciaire, qui offre un service public payé et entretenu par les contribuables que nous sommes. Mais très souvent cette institution, à laquelle l’Etat en premier, doit être soumis, est le théâtre des plus grandes violations des droits que les textes sacrés, la religion y comprise, confèrent aux hommes et femmes d’un territoire déterminé.
Ils veulent se convaincre du contraire, mais les faits qui conduisent les justiciables à douter du caractère impartial de la loi et de l’institution qui doit la garantir sont nombreux. Je leur rappelle, à titre d’exemple, ces évènements, violations flagrantes de la loi, qui se sont déroulés sous leurs yeux de magistrats :
- lorsqu’un journaliste sous contrôle judiciaire est sorti du territoire national pour accomplir tranquillement sa Umrah, pendant que ce même droit est refusé à un Maire de commune et un journaliste qui pourtant devaient voyager pour des raisons médicales ;
- lorsque le président de la République a gracié un trafiquant de médicaments avant même un jugement définitif ;
- lorsque l’institution judicaire est restée sourde-muette devant les appels au meurtre proférés par des militants d’un parti auquel appartient le ministre de la justice, qui nous demande à nous de respecter la justice ;
- lorsque des avocats dont les noms sont cités dans une affaire dite privée ont refusé de déférer à toute convocation pour une audition par un magistrat instructeur ;
- lorsqu’un ministre a qualifié impunément des magistrats de la cour des comptes de « politiciens encagoulés » ;
- lorsqu’un un avocat d’une plaignante, dans une affaire dite privée, a refusé de s’astreindre à l’obligation du secret de l’instruction pourtant imposée à l’une des parties dans cette même affaire ;
- lorsqu’un avocat étranger a bénéficié d’une liberté avec contrôle judiciaire alors que pour cette même affaire, ses présumés « complices », des nationaux, croupissent toujours en prison ;
- lorsque l’institution judiciaire est restée passive devant les nombreuses pertes en vies humai nes depuis mars 2021 et refuse d’ouvrir les yeux sur les milices armées de mars 2021 et de juin 2023 ;
- lorsque, depuis 2012, les dossiers judiciaires d’opposants au régime ne sont pas traités dans le temps imparti par les textes que les autres dossiers similaires ;
- lorsque des justiciables, militants d’un parti politique, sont maintenus en détention sans jugement malgré l’expiration du délai requis pour l’instruction ;
- lorsque d’interminables retours de parquets sont normalisés en flagrante violation de la loi pénale ;
- etc.
La liste de griefs peut être kilométrique, car les violations des droits de justiciables sénégalais ont été aussi pléthoriques que flagrantes durant cette décennie. Quelle a été la réaction de l’institution judiciaire à laquelle vous faites référence face à ces multiples violations ? On ne peut se taire tant que nous demeurons des acteurs de la justice et bailleurs de son fonctionnement.
Ce que l’institution judiciaire semble avoir réussi ces derniers temps, c’est d’avoir institué deux justices : celle de l’oppresseur et celle destinée à l’opprimé. Cette impression, rien ne l’enlèvera jusqu’à ce que l’institution judiciaire elle-même, dans ses rares pans luisants qui subsistent encore, décide de corriger cela.
Dire que la justice fait partie des endroits les plus fréquentés par les citoyens témoigne de la confiance de ces derniers envers l’institution c’est être à des années lumières de la réalité des violations des droits les plus élémentaires. Le sérieux interdit de se vanter d’un tel indicateur.
Pour que l’institution judiciaire puisse réguler la société comme cela se fait ailleurs dans les pays véritablement démocratiques, il va falloir qu’elle arrive à faire son propre procès. Si elle refuse de le faire, les justiciables membres à part entière de cette institution auront raison de le faire, car la justice est rendue au nom du Peuple.
Ousseynou LY
Justiciable-contribuable