Politique de «Tàppalé»

par Dakar Matin

Toujours les mêmes formules de circonstance. Les mêmes visages circonstanciés de deuil. Les mêmes énoncés creux. Des autorités dans une procession funèbre s’en vont s’enquérir de l’état des blessés dans des hôpitaux qui manquent souvent de tout comme à l’hôpital de Louga où le scanner était en panne.

Tant pis pour les blessés. Les hélicoptères, c’est juste pour la parade de la fête de notre glorieuse indépendance. Ce n’est pas pour les gueux qui se sont entassés dans un bus qui en contenait plus qu’il ne devrait transporter. Ce qui est la norme dans ce pays qui marche sur la tête depuis longtemps. La norme, c’est-à-dire se contreficher des lois, règles, règlements et codes et n’en faire qu’à sa tête.

Aucune autorité, aucune épouse d’autorité et aucun fils d’autorité n’était parmi les pauvres victimes du terrible drame d’hier. Tout le long du trajet qui amené au site de l’accident, aucun gendarme ni policier n’a contrôlé ce bus qui contenait beaucoup plus de passagers que ne lui permettait sa carte grise. On nous dit que ce cercueil roulant avait quitté tôt le matin d’hier la ville de Richard-Toll. A croire que de cette ville à Nguene Sarr où a eu lieu le drame, il n’y avait aucun gendarme ni aucun policier sur la route.

Ah si Pastef avait appelé à une manifestation sur cet axe, on aurait vu un camion des Fds tous les 100 mètres comme en ce moment sur l’autoroute à péage ou sur la Vdn à Dakar ! Pour le reste, gare au propriétaire du véhicule qui sera implacablement l’agneau du sacrifice. Dans la même procession de visages affligés à l’intérieur des centres d’évacuation, un coup d’œil à la morgue. Rappels de mesures qui tiennent comme les deux bouts d’un string c’est-à-dire aisément défaits et jamais appliquées pour ce qui est des mesures. Il y a plus de trente ans, l’agitateur d’idées qu’était Joe Ouakam disait de Galsen que c’est un pays de « tàppale ».

Rien de sérieux ne s’y fait. Et rien n’a changé depuis. Nous sommes toujours dans l’approximation. Nous sommes tellement habitués à dénombrer des morts par dizaines sur l’asphalte et nos mers et même par milliers avec «Le Joola» plus meurtrière catastrophe maritime de l’Histoire ! que tout le monde se contre fiche des accidents qui surviennent dans notre pays. Rien que cette semaine, une pirogue a chaviré et fait officiellement 16 morts et un énième accident de la circulation a causé la mort de 24 pauvres diables. La routine dans ce pays de tous les laxismes et du fameux « Yalla Bakhna ».

Au Sénégal, les autorités qui flanchent ne sont jamais sanctionnées. Dans d’autres pays où l’on respecte la vie humaine, le ministre des Transports terrestres, suite aux drames récurrents sur nos routes, aurait présenté sa démission et serait peut être même envoyée en prison. Mais dans ce charmant pays des paradoxes, nous sommes toujours dans la compassion feinte. Le beau-frère est habitué à faire des décomptes macabres sur nos routes. Après avoir jonglé joyeusement sur un ballon, le Chef s’est payé un twitter comme il a l’habitude de le faire en ces circonstances.

Son Premier ministre n’a pas jugé utile de se déplacer sur les lieux des deux terribles drames qui ont endeuillé le pays cette semaine. Il a d’autres dossiers plus urgents que d’aller se rendre compte des conséquences mortelles des négligences de notre Administration dont il est le chef ! au sens large. Après avoir pleuré toutes les larmes de notre corps et promis qu’il n’y aura plus jamais cela, la vie va poursuivre son cours joyeux jusqu’au prochain décompte macabre. Et qui pour douter que nous sommes dans un pays de « tàppale » ?
KACCOOR BI – LE TEMOIN

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