Trois bateaux de migrants ont quitté le sud du Sénégal il y a environ deux semaines avec, en tout, 300 personnes à leur bord. Ils voulaient rejoindre l’archipel espagnol de Canaries, à quelque 1 700 kilomètres de là. Depuis, les familles des exilés sont sans nouvelle de leurs proches.
C’est un nouveau drame sur la route des Canaries. Selon l’association Caminando fronteras, au moins 300 personnes sont portées disparues après avoir quitté le Sénégal à bord de trois bateaux dans l’espoir de rejoindre l’archipel espagnol des Canaries.
La fondatrice de l’association Helena Maleno a indiqué, dimanche 9 juillet, à l’agence de presse Reuters que deux bateaux avaient quitté le Sénégal avec respectivement 50 et 60 personnes à leur bord il y a 15 jours. Le troisième bateau avait, lui, environ 200 personnes à son bord lorsqu’il a quitté les côtes sénégalaises le 27 juin.
Les trois embarcations étaient parties de la petite ville de Kafountine, dans le sud du Sénégal, à environ 1 700 kilomètres de Tenerife, l’une des îles Canaries.
« Les familles sont très inquiètes. Il y a environ 300 personnes originaires de la même région du Sénégal. Ils sont partis en raison de l’instabilité qui règne au Sénégal », a dit Helena Maleno.
Les îles Canaries, au large des côtes d’Afrique de l’Ouest, sont devenues la principale destination des migrants qui tentent d’atteindre l’Espagne.
Certains tentent aussi de traverser la Méditerranée de l’ouest pour rejoindre l’Espagne continentale mais ils sont beaucoup moins nombreux. Jeudi 6 juillet, Caminando fronteras a publié ses derniers chiffres des migrants morts sur les différentes routes migratoires vers l’Espagne.
Au cours du premier semestre de 2023, 951 personnes ont perdu la vie en tentant de rejoindre l’Espagne. Parmi elles, 778 sont mortes sur la route des Canaries.
En 2022, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) des Nations unies estimait qu’au moins 559 personnes étaient mortes en tentant de rejoindre les Canaries.
L’été est la période la plus active pour toutes les tentatives de traversées. Et la route des Canaries ne fait pas exception. Depuis le printemps, cet itinéraire connaît une hausse de la fréquentation. Entre le 10 et le 12 juin, plus de 330 migrants ont ainsi débarqué dans l’archipel espagnol, originaires pour la plupart du Maghreb.
En avril, plus de 400 personnes avaient débarqué en une semaine sur plusieurs îles des Canaries, juste après la fin du ramadan.
Collaboration Espagne-Maroc
Mais, d’une manière générale, le nombre d’arrivées dans l’archipel est à la baisse depuis 2022. Début avril 2023, un bilan du ministère espagnol de l’Intérieur indiquait que le nombre d’arrivées aux Canaries avait chuté de 63 % au cours du premier trimestre 2023 par rapport à la même période en 2022.
La baisse a été amorcée en mars 2022, lorsque Madrid et Rabat ont repris leurs relations après une année de brouille. Et cette nouvelle amitié passe par davantage de surveillance aux frontières : le Maroc a annoncé le renforcement des patrouilles de la marine marocaine en mer et plus de vigilance aux abords des enclaves de Ceuta et Melilla. Sur les côtes marocaines, Rabat intercepte les exilés susceptibles de prendre la mer et les renvoie dans le centre du pays, dans la région de Ouarzazate, loin des plages.
Cette collaboration Espagne-Maroc mène aussi parfois à des drames, notamment lorsque les deux États se renvoient la responsabilité d’une opération de secours. La radio espagnole Cadena Ser a récemment révélé, après avoir eu accès à des enregistrements audio, que de nombreux morts auraient pu être évités lors d’un naufrage survenu le 21 juin.
Les secours espagnols, normalement en charge de la zone de recherche et sauvetage au large du Sahara occidental, ont préféré laisser intervenir leurs homologues marocains. Ces derniers ont mis 12 heures à arriver sur la zone du naufrage. Seule une jeune fille a pu être secourue par un hélicoptère espagnol. Les Marocains, eux, ont récupéré un corps et secouru 24 personnes. Trente-sept personnes ont été portées disparues