« La parole donnée, la parole signée devant le peuple doit être scrupuleusement respectée. » Benoit HAMON
Le ciel s’assombrit voire se noircit et le malheur semble s’abattre sur notre beau et charmant pays qui, par la faute, la cupidité, l’avidité, le manque total de patriotisme et la boulimie du pouvoir de nos dirigeants actuels, se dirige vers des dérives aux conséquences néfastes et in commensurables. En effet, il s’est installé insidieusement, pernicieusement et très dangereusement un débat malsain et nocif qui n’aurait pas dû avoir lieu et portant sur la possibilité pour le Président Macky Sall de se présenter sa candidature pour briguer un troisième mandat. Le plus regrettable, le plus désolant pour ne pas dire le plus grave dans cette affaire, c’est le jeu de clair-obscur auquel se livre le Président sortant qui semble prendre un malin plaisir à jouer avec les nerfs de ses compatriotes qui ne se retrouvent pas du tout dans son discours apocryphe et profondément spécieux.
IL est bon de lui rappeler que, quelle que soit la dignité de ses éminentes fonctions dont il ne semble pas connaitre ni mesurer les limites, ses humeurs, ses désirs, ses états d’âme ainsi que sa volonté ne doivent ni ne peuvent déterminer la marche du pays qui se veut une république ou les règles régissant la conduite des affaires publiques sont définies par une charte fondamentale, la Constitution qui garantit l’état de droit et s’impose à tous les citoyens sans exclusive. Et cette constitution en son article 27 alinéa 27 dispose de manière péremptoire que « Nul ne peut exercer plu de deux mandats consécutifs. » C’est du français simple, facile, clair, limpide et précis qui ne peut être l’objet d’une quelconque interprétation ni confusion comme n’a eu de cesse de le seriner son ancien conseiller, aujourd’hui ministre de la justice Ismaël Madior Fall qui a eu le grand privilège d’en être le rédacteur sous l’inspiration du Président Macky Sall qui en est le constituant dérivé, et personne ne saurait, mieux que ces deux-là, interpréter les dispositions de la constitution soumise au référendum en 2016.
Ce qui était une évidence, une avancée dont il se glorifiaient en se prévalant de l’image de démocrates acquis aux aspirations du peuple a plus de liberté dans le choix souverain de leurs dirigeants, prend en ce moment les allures d’une farce de très mauvais gout, certains diraient une véritable tromperie sur la marchandise. En effet, une spectaculaire translation s’est opérée tant au niveau sémantique que lexical avec une nouvelle rhétorique de remise en cause totale des certitudes et convictions antérieures. Aujourd’hui, au grand dam du peuple sénégalais et à la forte déception de tous les démocrates qui avaient ajouté foi en eux, naïvement peut-être, ils sont entrain de développer un discours pernicieux pour justifier leur revirement aussi spectaculaire qu’indécent. Ils présentent, sans vergogne et toute honte bue, des arguments à l’opposé de leurs propos d’hier.
Verbatim du sieur Macky Sall candidat devenu Président de la république, ce qu’il disait ;
En tant que candidat à la présidentielle de 2012 .
1/ « Qui n’est pas hypocrite doit savoir que le Président Wade n’a pas le droit d’être candidat. Quan le conseil constitutionnel qui doit être le juge des élections dit qu’il en a le droit, ferme les yeux sur cela, nous refusons et nous ferons tout pour que cela ne se réalise pas. On a vu que lui, le Président de la république a pris toutes les dispositions pour une épreuve de force. Dès l’annonce du conseil constitutionnel, on a vu immédiatement des gens en tenues venir nous attaquer au niveau de l’obélisque en jetant des pierres créant une situation de perturbation. Au même moment on a vu la police charger violemment, blessant des gens. Nous n’allons pas l’accepter puisqu’il nous a indiqué le chemin, comme il est sourd aux différents appels; il ne peut pas y avoir de démocratie, ce qui reste à faire c’est la résistance. C’est un Sénégalais comme nous qui est là pour nous imposer sa volonté et nous opprimer. »
2/ « Aucun Président de la République élu ne peut faire l’objet de plus de deux mandats. Donc, le Président est élu une fois et le mandat est renouvelable une fois; le Président Abdoulaye Wade a été élu en2000, il a été réélu en 2007, il n’a plus la possibilité d’avoir un troisième mandat. Tout le reste n’est que spéculations d’intellectuels. »
3/ « Il veut installer son fils et compte sur la force pour parvenir à ses fins. Il y a eu violation de mon domicile ou des gens ont pénétré usant de la matraque pour casser les vitres de mon véhicule; nous déplorons le sang qui a été versé. Nous tenons Abdoulaye Wade pour personnellement responsable de ces actes de violences. »
4/ « Le Président de la République ne peut ni ne doit pas avoir un troisième mandat. Sur cette question nous restons inflexibles et nous allons continuer la mobilisation afin que force reste a la loi. Et, dans ce cadre, nous allons appeler nos compatriotes à venir nous rejoindre à la place de l’obélisque pour exprimer de vive voix la détermination des populations afin que le Président non seulement retire sa candidature, mais également qu’il puisse respecter le choix du suffrage universel à la suite des élections. Donc c’est un combat qui est engagé et dont l’issue sera en faveur des populations comme partout ailleurs. »
5/ « La prière est composée de deux « raakas », le premier comporte sept « kaabars » et le deuxième de cinq, cela fait un total de douze; et c’est le salut final. Transposé dans le débat actuel cela voudrait dire que le premier mandat de sept ans ajoutés au deuxième mandat de cinq ans donne un total de douze qui fixe le terme définitif de la présence d’un président d la république a la tête du pays. »
6/ « J’appelle tous les militants républicains et les Sénégalais soucieux de l’avenir de notre pays et de nos institutions de venir nous rejoindre dans la rue pour faire cesser le processus de monarchisation du Sénégal; le combat contre le régime se fera dans la rue. »
Ce qu’il disait en sa qualité de Président de la République;
7/ « Nous voulons apporter une contribution positive à la marche de notre pays. J’en suis encore à mon premier mandat qui finira en février 2019, plis précisément en mars, avril 2019. Nous avions, il y a un an, engagé une réforme majeure de la constitution par voie référendaire, justement c’était pour arrêter le débat. Nous avions une majorité qualifiée au parlement, mais nous avons choisi de consulter directement le peuple sur une réforme très sérieuse, très constructive, très consolidante de la constitution pour régler principalement la question de la durée et du nombre de mandats du Président de la république ainsi que du mode d’élection. Cette question a été définitivement fixée dans cette constitution; ce dont il est question, c’est moins le nombre de mandats que la durée. »
8/ « Le mandat est de cinq ans renouvelables une fois; j’ai ajouté une clause, c’était pour tuer le débat puisque le débat continuait toujours. Toutefois nul ne peut faire plus de deux mandats. J’ai déjà fait un mandat; ce que je cois et ce que je retiens, c’est si je suis réélu je ferai mon second mandat. »
9/ « Si je suis réélu je fais mon second mandat de cinq ans, cela fera 7 plus 5, il faudra partir. C’est l’option fondamentale, c’est ça la constitution et c’est moi qui l’ai proposée, qui l’ai fait rédiger et qui l’ai fait voter. On en est la; mais malgré ces clauses le débat persiste, c’est ce qui m’étonne; C’est clair, donc al hamdoullah. »
Comment après tous ces propos, toutes ces déclarations et toutes ces professions de foi, ose-t-on soulever un débat qu’Aissata Tall Sall qualifiait de très nocif à propos d’un troisième mandat?
Par ses propos d’antan que l’on croyait exprimés sur la base d’une conviction profonde, d’un engagement sincère et véridique, d’une réelle volonté d’assainir la pratique politique et de moraliser définitivement le processus et le mode d’élection du Président de la république, le Président Macky Sall avait entrainé dans son sillage pratiquement tous ses collaborateurs qui ont, sans le moindre soupçon ni le moindre doute d’une future abjuration, embouché, avec un zèle démesuré comme d’habitude, la trompe de l’inéligibilité de leur mentor pour un troisième mandat. Squattant les plateaux de télévision, papillonnant à travers les différents supports médiatiques et profitant de la moindre occasion, les autorités étatiques se donnaient a fond pour expliquer l’option démocratique du Président Macky Sall présenté comme le modèle d’un dirigeant ouvert, désireux et très soucieux de répondre aux aspirations de son peuple. C’est ainsi que les anciens Premiers ministres Boune Abdallah Dione et Aminata Touré, les ministres Aly Ngouille Ndiaye, Oumar Youm, Seydou Gueye et tant d’autres se sont faits les hérauts de l’engagement solennel et public du Président de la République à ne faire que deux mandats conformément à la constitution.
Aujourd’hui, avec la tournure que prennent les choses, ils risquent d’apparaitre comme les dindons d’une farce dont ils ignoraient les tenants et les aboutissants et ce de part de quelqu’un qu’ils avaient choisi de service dans la loyauté. Quand de son propre aveu, le Président de la république nous mets au fait qu’il avait consulté le Conseil constitutionnel sur le troisième mandat et celui-ci lui aurait donné le quitus de son éligibilité et qu’il s’est gardé d’en informer ni ses proches collaborateurs encore moins les populations, on pourrait parfaitement et légitimement considérer une telle attitude comme une forme de duplicité. Ainsi donc, pendant qu’il soumettait la révision constitutionnelle dont un des points portait sur le mandat, le Président avait déjà été rassuré par le Conseil constitutionnel de sa possibilité d’en briguer un troisième.
Le débat sur le troisième mandat a le mérite de dévoiler au grand jour l’hypocrisie de certains membres de l’élite politique et intellectuelle, de vrais renégats nichés dans les plus hautes sphères de l’espace public. Une véritable faune d’individus sans foi ni loi, uniquement guidés un besoin alimentaire compulsif de se remplir la bedaine ou la panse pour certains; hier grands pourfendeurs et contempteurs farouches du troisième mandat, aujourd’hui, ils se sont transformés en laudateurs zélés de ce qu’ils dénonçaient en des termes peu amènes. Manquer à sa parole donnée est devenu d’une banalité qui instruit beaucoup sur la perversion de nos valeurs; j’ai toujours soutenu que manquer à sa parole, c’est s’identifier à une exécrable vermine et avoir une dignité mille fois moindre que celle d’un rat d’égout. Et si l’on y ajoute le « ndiouth-ndiath » on ne peut qu’être détestable; mais à propos de « ndiouth-ndiath » nos compatriotes n’ont guère de souci à se faire si l’on se réfère au propos du premier d’entre eux qui disait « Mais soyez tranquille, je veux qu’il y ait la confiance pour qu’on travaille pour le Sénégal. J’en suis là; je ne suis plus dans le « ndiouth-ndiath » parce que je n’ai plus de raison de le faire. C’est fini, il n’y a plus d’enjeux pour moi. »
La mise en place de la plateforme des forces vives de la nation dénommée F24 est une initiative citoyenne pertinente d’une grande et urgente nécessité pour la prise en charge correcte et efficace du combat a mener contre la troisième candidature du Président Macky Sall qui serait une violation flagrante de notre constitution en vigueur et qui dispose que « Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs. » Au-delà du cas spécifique du troisième mandat, la plateforme devrait s’investir dans toutes les problématiques relatives aux différentes phases de l’élection présidentielle, notamment les inscriptions, le parrainage, une participation inclusive, la fiabilité du fichier qui doit être porté a au moins 8millions d’électeurs, sa mise a disposition a temps, la vérification de la carte électorale et tous autres actes nécessaires pour une élection libre, démocratique, transparente, sincère et bien organisée.
La bataille sera difficile, dure et ardue; il faudra; dès lors de la détermination, de la volonté, de l’engagement et aussi poser des actes et mener des actions hardies et intelligentes, mais toujours dans le strict respect des lois et règlements de la république dont la majorité des Sénégalais souhaitent qu’elle soit dirigée autrement, c’est a dire dans la concorde, l’unité et la cohésion sociales, avec une justice sans discrimination, une administration respectueuse des droits humains, avec des dirigeants humbles, modestes et vertueux qui assureront un partage équitable de nos ressources de toutes natures. Il nous faut valoriser nos aptitudes, faire en sorte d’avoir des citoyens compétents, avertis, au diapason de ce qui se fait de meilleur au monde, imbus de nos valeurs sociétales, morales et religieuses seules capables de les éloigner des actes de prédations, de vols, de pratiques dolosives.
LE POUVOIR AU PEUPLE, TERMINUS 2024.
Dakar le 19 Avril 2023. Boubacar SADIO
Commissaire divisionnaire de police
De classe exceptionnelle à la retraite.