Dangereux bras de…faire

par pierre Dieme

Jamais de toute son histoire, le Sénégal n’a autant été pris en otage et à témoin d’un duel surréaliste, entre deux leaders politiques qui ont décidé à notre corps défendant, que seules leurs joutes avaient de l’importance pour les sénégalais

« Vous ne verrez jamais, pendant ma gouvernance au Sénégal, un journaliste mis en prison pour un délit de presse ». Macky Sall en 2015.

Le Sénégal joue-t-il à se faire peur ? La situation irrespirable, au sens propre du terme, du fait des gaz qui nous sont envoyés par une maréchaussée armée et casquée jusqu’aux dents, que traverse notre pays pourrait aboutir, serait-ce leurs vœux, à un embrasement funeste qui n’arrange personne, à commencer par ceux qui n’ont pas fait de la politique leur gagne-pain, et qui doivent chaque matin aller bosser, pour faire vivre leurs familles ou faire prospérer leurs commerces ou leurs entreprises.

Jamais de toute son histoire, le Sénégal n’a autant été pris en otage et à témoin d’un duel aussi extravagant que surréaliste, entre deux leaders politiques qui ont décidé à notre corps défendant, que seules leurs joutes qui n’ont plus rien de verbales, avaient de l’importance pour les sénégalais et que leur issue était absolument déterminante pour l’avenir de notre pays. Quelle prétention !!! Quel culot de croire que leur affrontement qu’ils produisent comme une série télévisée, débutée dans un salon de massage, et alimentée chaque jour de leurs turpitudes respectives, doit être notre seule et unique préoccupation, que leurs tournées économiques, leurs meetings et leurs « nemeku tour » sans propositions programmatiques autres que « na dem !!! na dem !!! », et leurs rendez-vous judiciaires, qu’ils pensent être si singuliers, doivent absolument rythmer et conditionner nos mouvements et notre organisation familiale et professionnelle, et constituer la seule information digne de ce nom qui puisse nous être donnée, dans nos journaux, radios et télés, comme étant capitale et nécessaire à l’essor de ce pays, qui pourtant croule sous les urgentes problématiques de développement !

Mais ils se croient où ? Au grand marché de Ndoumbélane ?

Ils nous convoquent à élire le futur président du Sénégal dans moins d’un an et ils organisent leur tumulte et leur brouhaha, pour que justement nous ne puissions pas avoir à choisir l’homme ou la femme que nous voulons peut-être à part eux-mêmes qui se prennent pour les seuls astres autour desquels devrait tourner le pays.

Le chef de l’État qui c’est vrai doit garantir l’ordre public aux Sénégalais devrait savoir faire baisser la tension de plusieurs crans, d’abord en cessant d’interdire de bouger une oreille à quiconque ne pense pas à l’aune de son sulfureux troisième mandat, ensuite en sévissant contre tous ceux de son clan qui sont impliqués dans des malversations financières d’une gravité jamais atteinte au Sénégal, ce qui scandalise les citoyens qui justifient ainsi leurs vandalismes déguisés en soutien à l’opposant-martyr, et enfin en clarifiant sa position sur l’aventureuse représentation à la présidentielle de 2024, dont il sait que son annonce transformerait la minute suivante son pays en un gigantesque brasier, dont aucun citoyen ne sortira indemne.

Nous vivons au rythme effréné des bévues gouvernementales, qui chaque jour de manière souvent inutile et superflue, remettent avec une gourmandise étonnante, une pièce dans la machine à prendre des baffes et à se couvrir de ridicule. Pourquoi arrêter Aguibou Soumaré, dont la légèreté impardonnable ne méritait qu’un simple démenti, et une exigence de plates excuses ? Pourquoi encore mettre au gnouf un journaliste, qui s’est certes empressé d’affirmer des inexactitudes, au lieu d’exiger de tous ses confrères plus de responsabilité dans l’exercice de leur métier par ces temps incertains et dangereux ? Pourquoi jouer de la force et de la brutalité devant un adversaire intelligemment provocateur et dont l’État finit par être le meilleur des attachés de presse ? Mais que diantre ont-ils fait au Bon Dieu pour que celui-ci ne leur octroie que des muscles en guise de cerveaux ?

La prison viatique, pour la gloire ?

Le leader du Pastef lui, continue à faire appel à la population pour lui servir de bouclier, soit pour assister à ce procès qui, selon lui, n’est que « mascarade ». Pour preuve dira le président de Pastef qui s’est exprimé devant les militants de la coalition Yewwi Askan Wi, le juge qui a en charge de ce dossier qui l’oppose au ministre du Tourisme Mame Mbaye Niang, est partisan. Il se prend donc pour l’arbitre des élégances maintenant ? Et menace le pouvoir judiciaire de ses futures foudres présidentielles, en ces termes d’une singulière outrecuidance en démocratie : « Les magistrats faites attention ! La réalité politique est claire. Le temps de Macky Sall est terminé. Si vous tenez à rester dans ce pays après son départ, respectez la loi du peuple. Si vous avez décidé de vous opposer à la volonté populaire, c’est vous qui êtes les hors-la-loi”, martèle le « déjà menaçant et pas encore président » ! Il flirte avec la sédition en lançant cet appel à notre armée. ”Ce que nous avons de plus sacré au Sénégal c’est l’armée. Nous avons une armée républicaine. Si Macky Sall veut imposer sa volonté, que l’armée joue son rôle. Vous avez le soutien de la jeunesse sénégalaise. Ne suivez pas Macky Sall dans son aventure sans lendemain”, lance-t-il à l’attention de la grande muette. Et ça passe crème !

« GATSA GATSA » contre « TOCC SA GATT » ! Mais quelle honte !!!

Quel choix avons-nous à connaître pour l’homme ou la femme qui présidera dans un an aux destinées du Sénégal ? Rien ! Nada !! On n’entend que ces deux matamores qui ont l’air de se foutre comme de l’an 40 de l’avenir des Sénégalais et des jeunes en particulier, au point que nous sommes privés d’entendre dans ce brouhaha, les propositions et programmes de personnes, elles aussi en capacité de guider notre pays sur des voies rédemptrices, qui l’éloigneraient des dangers qui le guettent et dont tout le monde feint de pas voir qu’ils sont à nos portes.

Pendant ce temps, les opportunistes et dividendistes de l’opposition s’amusent à la surenchère, qui espèrent-ils les mènera en prison, et leur donnerait l’onction leur permettant de quémander en guise de médaille, un ministère de l’information, ou de sous-secrétaire assis sur n’importe quel strapontin, pourvu qu’il soit moelleux et donc juteux. Quel dommage que les urgences qui sont à nos portes soient ignorées et que nous ne soyons préoccupés que par d’insupportables et désuètes péripéties !

Cependant, il est clair que le Sénégal a connu plus grave que ça et s’en est toujours sorti ! Notre pays se doit d’être plus fort et au-dessus de ces petits moussaillons, sans vision ni projets autres que leurs propres survies ou existences politiques enivrantes.

Le Sénégal n’a pas les hommes qu’il mérite. Nous sommes fautifs. D’avoir dessiné des tigres de papier et de leur avoir pousser des dents. On en rigolerait si tant de futilités n’étaient pas tragiques.

Courage !!! Fuyons !!!

PAR JEAN PIERRE CORRÉA

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