La loi sur la baisse du loyer sera-t-elle effective ou pas cette fois ? Des locataires se posent beaucoup de questions puisque depuis l’adoption du décret présidentiel, ce n’est plus la paix avec les bailleurs. Conséquence, locataires et les bailleurs se regardent en chien de faïence. Des bailleurs récalcitrants dictent leurs lois et refusent d’appliquer la réduction. Pourtant, une commission nationale de régulation des loyers des baux à usage d’habitation a été mise en place pour régler ce problème. Et selon son président Momar Ndao, les récalcitrants risquent la peine d’emprisonnement allant de 2 à 6 mois et d’une amande de 500.000 F Cfa. Il a invité les locataires à se rapprocher de son équipe.
Si l’Etat du Sénégal, à travers la Commission nationale de régulation des loyers des baux à usage d’habitation qu’il a mis en place pour veiller à l’application de cette mesure, n’intervient pas vite, les relations entre les locataires et les bailleurs risquent de voler à l’éclat. De nombreux locataires ont déploré la non application de la mesure par certains bailleurs ou agents immobiliers. Interrogés, certains d’entre eux ont informé que ces derniers usent de ruses et de subterfuges pour passer entre les mailles du décret présidentiel appliquant cette mesure.
« C’est inadmissible de voir ce qui se passe actuellement dans les maisons. Moi, mon bailleur nous a distribués des papiers stipulant que la surface corrigée de 2014 a déjà été appliquée et que baisse ne peut avoir lieu », a déclaré Mbaye.
Joint par PressAfrik, M. Mbaye de poursuivre : « Il nous fait croire que nous qui avons bénéficié de cette baisse de 2014, cette nouvelle mesure ne nous concerne. Depuis le 5 mars, nous sommes dans les négociations car il refuse pour le moment de prendre l’argent ».
Un autre locataire du nom de Ousmane, domicilié aux Hlm Grand Yoff (Dakar) de renchérir: » Lorsque j’ai demandé à mon bailleur d’appliquer la baisse il m’a fait savoir que les locataires qui ont loué une chambre individuelle n’en font pas partie. Selon lui, la baisse concerne que ceux qui ont pris des appartements « .
Pourtant, a-t-il souligné, « Il a augmenté la location trois (3) fois de suite en l’espace d’un an. J’ai accepté de payer 30.000 F Cfa alors qu’au début je payais que 20.000 F Cfa. Mais, pour l’heure, on n’a pas encore trouvé de terrain d’attente ».
Des propriétaires de maisons trouvent des moyens de contourner cette nouvelle mesure de baisse de loyer. Ils ont commencé à demander à leurs locataires de libérer les lieux au motif qu’ils doivent réfectionner leur maison. C’est le cas de M. Cissé, joint au téléphone.
« J’ai donné un préavis de 3 mois à tous mes locataires pour qu’ils quittent ma maison. Seul le propriétaire ou la propriétaire peut déterminer le prix de sa chambre, de son studio et son appartement . Car c’est lui seul qui sait ce qu’il a dépensé pour sa construction. Les matériaux de construction sont chers , le ciment, le fer, ect », a-t-il avancé.
Et d’ajouter : « L’Etat ne peut pas fixer le prix de location de ma maison, car il ne sait pas combien j’ai payé pour le terrain ni combien j’ai dépensé pour la construction. Donc, je ne vois pas la raison de me fier à ce décret ».
L’Etat du Sénégal a mis en place une commission nationale de régulation des loyers des baux à usage d’habitation chargé non seulement de faire appliquer cette nouvelle mesure mais aussi du suivi. Son président Momar Ndao est convaincu que cette fois-ci tout va changer et que les bailleurs seront obligés de se soumettre à la loi.
que faire si le bailleur refuse de respecter la loi ?
« Nous, nous avons reçu 436 appels sur le serveur dont 355 demandes de renseignements et le reste c’est le contentieux. Quand un bailleur ne respecte pas la règlementation, il risque entre 2 et 6 mois de prison et une amende qui peut aller jusqu’à 500 000 F Cfa », a d’emblée souligné M. Ndao.
Joint par PressAfrik, il a fait savoir qu’: « Aujourd’hui, il y a trois situations qui peuvent se poser. La première, c’est que les textes autorisent le locataire à aller directement saisir la police pour non-respect des prix tels que fixé par la loi de 1981. Deuxièmement, il peut saisir la commission ou bien déposer l’argent à la Caisse des dépôts et consignations (CDC) si le bailleur refuse de prendre l’argent ».
Et dans ce cas, a renseigné le président de la commission, » Si ce dernier refuse de prendre l’argent, vraiment il est mort parce que le locataire peut déposer l’argent à la CDC et le bailleur ne peut pas aller voir le juge pour dire qu’il (locataire) me doit de l’argent. Parce que s’il le fait, il sera sous le coup de la loi parce qu’il a pratiqué les prix ne sont pas conforment. Et il risque la peine de prison ».
Nommé par décret à la tête de la commission nationale de régulation des loyers des baux à usage d’habitation, Momar Ndao, s’est fixé des objectifs à savoir de réguler le loyer au Sénégal, la gestion des tarifs et les gens respectent les dispositions réglementaires pour qu’il n’y ait pas de hausse illicite du loyer.
A l’en croire, lui et son équipe ont commencé le travail alors même qu’ils n’ont pas encore de « locaux ». » Nous avons déjà commencé à travailler avant même la mise en place de la commission », a-t-il fait savoir.
Pour Momar Ndao, le premier défis était la « communication » parce que, selon lui, » la majeure partie des bailleurs n’ont eu l’information par rapport à ce que leur oblige la loi. Ils ne savent pas qu’ils risquent des mois de prison s’ils ne respectent pas la réglementation ».
Des agents du contrôle économique du ministère du Commerce et des officiers de la police judiciaire formés
Momar Ndao d’informer que dès le jour où le conseil des ministres a créé la commission, « nous avons commencé à distribuer des flyers pour donner les taux de baisse ect ». De même, a-t-il annoncé, » Nous avons aussi formé les agents du contrôle économique du ministère du Commerce pour qu’ils comprennent un peu quels sont les dispositions en matière réglementaire, en matière de loyer « .
Poursuivant, il a fait savoir que des officiers judiciaires sont en train d’être formés pour une meilleure connaissance de la réglementation. » Là, nous allons travailler avec les officiers de la police judiciaire c’est-à-dire la police et la gendarmerie pour leur donner un peu les éléments qui leurs permettent de connaître un peu la gestion des loyers et de pouvoir intervenir pour les cas de hausse illicite ».
A la question de savoir s’il a déjà eu à intervenir pour régler un problème entre locataire et bailleur. Momar Ndao a répondu par l’affirmative. « Oui, il y a eu des cas où moi-même j’ai parlé aux bailleurs et ils sont revenus à de meilleurs sentiments. Mais, je ne suis pas la seule personne qui traite des dossiers. J’interviens normalement en dernier ressort même. Mais dans un premier temps de réponds au téléphone sur certains cas à côté bien sûre d’une existence du centre d’appel. Les plaintes sur les centres d’appel sont traitées directement par les agents assermentés du ministère du commerce « .
Pas encore de plaintes devant la justice
Pour le moment, il n’y a pas encore eu de plaintes auprès de la justice si l’on en croît à M. Ndao. Ce dernier, répondant aux bailleurs qui soutiennent que les chambres individuelles ne font pas partie de la baisse, a tenu à préciser que : « tout local à usage d’habitation fait partie de la baisse ».
Il a invité « les locataires à ne pas rester là et parler comme ça, ils doivent saisir la commission ou la police ou la gendarmerie ».
Pour aider les locataires à y faire face, le gouvernement du Sénégal a adopté un nouveau décret visant à réguler le prix des loyers. Une mesure qui est entrée en vigueur depuis une dizaine de jours, c’est-à-dire le 1er mars dernier. En principe, les bailleurs doivent spontanément appliquer les taux de réduction qui est de 20 % pour les loyers inférieurs ou égaux à 300 000 FCFA, 10 % pour les loyers allant de 300 000 à 500 000 FCFA et 5 % pour les loyers de plus de 500 000 FCFA.
Aminata Diouf