Amady Diouf envoyé au charbon !

par pierre Dieme

Le désormais ex-Procureur de la République près le Tribunal de grande instance hors classe de Dakar, Amady Diouf, aura désormais la responsabilité de décider des dossiers qui atterrissent en appel

Le désormais ex-Procureur de la République près le Tribunal de grande instance hors classe de Dakar, Amady Diouf, aura désormais la responsabilité de décider des dossiers qui atterrissent en appel. Certains seront peut-être des affaires dont il a déjà diligenté l’instruction. En cas de maintien à ce poste jusqu’à la présidentielle de 2024 également, Amady Diouf sera chargé de valider les résultats de la Commission nationale de recensement des votes et de déclarer les résultats provisoires. Entre temps, il se pourrait qu’il ait eu à prendre une décision concernant l’opposant Ousmane Sonko, comme c’était le cas avec le juge Demba Kandji, dans l’affaire de la caisse d’avance mettant en cause l’ancien maire de Dakar, Khalifa Ababacar Sall, qui a été a condamné en appel, en aout 2018, alors qu’il aspirait à participer à la présidentielle de 2019.

Une des décisions phares du Conseil Supérieur de la Magistrature (Csm) d’avant-hier, lundi 21 février 2023, est le départ du Procureur de la République Amady Diouf du Parquet de Dakar pour la Cour d’appel de la même Juridiction. Le fait que ce magistrat devienne le Premier président de la Cour d’appel de Dakar, revient à s’attendre qu’il retrouve des dossiers qui sont déjà passés entre ces mains, en cas de recours, si ces affaires venaient à être vidées en première instance. Il a demandé l’instruction des affaires qui sont actuellement en instance devant le Tribunal de grande instance hors classe de Dakar dont il était le maître des poursuites.

Amady Diouf a hérité de son prédécesseur, Serigne Bassirou Gueye, l’affaire Sweet Beauty, dans laquelle la masseuse Adja Sarr accuse Ousmane Sonko de viol. Ce dossier renvoyé à la Chambre criminelle pourrait revenir entre les mains de ce magistrat, si une décision non appréciée par l’une des parties au procès est prononcée par les juges choisis pour vider l’affaire en première instance. Et on sait combien cette affaire tient en haleine les Sénégalais, surtout des jeunes complètement acquis à la cause du leader du Pastef.

On se souvient aussi que c’est en juin 2022 que le Procureur de la République, Amady Diouf, a fait face à la presse pour annoncer avoir ordonné l’ouverture d’une enquête sur des personnes qui seraient dangereuses. Elles seraient «des Forces spéciales» prêtes à semer le trouble lors d’un grand rassemblement de l’opposition au temps, «en s’adonnant à des opérations de pillage, de destruction et d’atteintes contre l’intégrité physique de personnes vraisemblablement innocentes».

Ousmane Kabiline Diatta, qualifié de «membre actif du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (Mfdc)», serait l’une d’elles. Dans ce dossier affaire des «Forces spéciales», plusieurs personnes qui seraient du Pastef sont sous mandat de dépôt, après leur inculpation du juge, à la demande d’Amady Diouf. Le constat donc est qu’en cas de recours à la Cour d’appel, si toutefois elles sont jugées, la juridiction dirigée par Amady Diouf sera chargé de décider de leur sort.

Aussi, Ousmane Sonko est renvoyé devant le juge, dans le dossier de «diffamation» présumée qui l’oppose au ministre Mame Mbaye Niang. Le procès est renvoyé au 16 mars prochain. Ousmane Sonko, principal leader de l’opposition et très critique contre le régime actuel, devra encore saisir la juridiction d’Amady Diouf, si une décision qui lui est défavorable venait à être prononcée en première instance, surtout que le procès se tient à moins d’une année de la présidentielle de 2024.

AMADY DIOUF A LA COUR D’APPEL, LE SPECTRE DEMBA KANDJI !

Khalifa Ababacar Sall, maire de Dakar a été condamné dans l’affaire dite de la caisse d’avance de la ville de Dakar, le 30 mars 2018, à cinq (5) ans de prison, par le juge Malick Lamotte. Il était poursuivi, au même titre que des employés de la ville de Dakar, pour association de malfaiteurs, complicité de faux et usage de faux en écritures privées de commerce, faux et usage de faux dans des documents administratifs, détournement et escroquerie aux deniers publics et blanchiment de capitaux. Cette peine a freiné les ardeurs d’un dissident du Parti socialiste (Ps), qui tissait sa toile pour la présidentielle de février 2019.

Pour obtenir un résultat autre que le verdict prononcé en première instance, ses avocats saisirent (interjettent appel) la Cour d’appel de Dakar, alors dirigée par le juge Demba Kandji. Le dossier ouvert en juillet 2018, fut vidé le 30 août de la même année, avec une confirmation du premier jugement, (cinq (5) ans de prison, en plus d’une amende de cinq (5) millions). Il ne restait plus que Cour suprême et la cassation pour le maire déchu qui voyait ses chances de participer à la présidentielle se rétrécir.

Khalifa Sall, écarté de la course à la présidentielle, d’autres candidats ont affronté le candidat de Bennoo Bokk Yaakaar (Bby), Macky Sall, le président sortant qui cherchait un second mandat. Il devancera ses adversaires, selon les premiers résultats sortis des urnes, le 24 février, même s’il y avait des contestations. Le 28 février 2019, Demba Kandji, alors Premier président de la Cour d’appel de Dakar et président de la Commission nationale de recensement des votes, confirme cette avance dans les résultats provisoires qu’il a proclamé. Des résultats confortés, plus tard, par le Conseil constitutionnel.

Entre 2018, 2019 et 2023 à 2024, ce qui a changé c’est que l’opposant notoire attrait devant les juridictions n’est pas Khalifa Ababacar Sall. Mais Ousmane Sonko, plus «belliqueux» et impliqué dans deux affaires dont l’issue judiciaire peut, à tout moment, lui priver de ses droits civiques. La question est maintenant est de savoir si Amady Diouf (ex-Procureur de République et désormais Premier président de la Cour d’appel de Dakar) aura l’occasion d’entendre Ousmane Sonko pour un second jugement dans l’un des dossiers dans lesquels il est cité ?

Ou d’annoncer des résultats provisoires de la présidentielle de février 2024 notamment si ils venaient à être favorables au président Macky Sall, dont l’opposition soupçonne de vouloir candidater pour un troisième mandat jugée illégitime (par l’opposition politique et beaucoup d’observateurs). Macky Sall n’ayant pas encore donné sa position sur la question, le candidat de Bby pour la prochaine présidentielle reste toujours un mystère.

Fatou NDIAYE 

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