Guinée Bissau : L’ancien Premier Ministre menacé d’assassinat

par pierre Dieme

Le 6 décembre 2022. Il est 22H26 à Paris. Je reçois un message de l’ancien Premier Ministre de Guinée Bissau, M. Aristides Gomes, par notre canal habituel de communication. Notre bref échange me rassure et inquiète à la fois. Car depuis qu’il a échappé à une tentative d’enlèvement
à Bissau, ses proches sont inquiets. L’homme, pour ceux qui le connaissent, savent qu’il n’a pas peur de ses opinions et de son engagement.

Mais être traqué comme un vulgaire malfrat alors qu’on a rien fait, est tout simplement ahurissant. M. Gomes n’est pas de cette catégorie de politiciens africains qui courbent l’échine face à la toute puissance du Prince. En homme de principes, il porte la dignité en bandoulière
et ne la troquerait pour rien au monde. Et c’est ce qui dérange le général. Le Président Umaro Sissoco Embalo le traque pour une absurde histoire à peine croyable. En effet, le Président en exercice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) est furax contre l’ancien Premier Ministre parce que ce dernier, en opposant, critique son régime dans la presse internationale.

Une rancune tenace de Embalo

Eh oui ! Vous ne rêvez pas. Le crime de M. Aristides Gomes, est de parler. Comme M. Embalo veut faire le vide, soit en exilant ou réduisant au silence ses opposants, il a dû mal à accepter que l’ancien Premier Ministre use de sa liberté de parole et de ton. Il faut aussi dire que la rancœur du Président Embalo contre M. Gomes ne date pas d’aujourd’hui. Car les deux hommes sont de purs produits du PAIGC, parti qui a mené la guerre pour la
libération de la Guinée Bissau et qui a dirigé le pays jusqu’aux années 2000. Dès sa prise de fonction, M. Embalo voulait avoir la peau de M. Gomes qui a dû son salut qu’aux Nations unies qui l’a hébergé dans ses locaux a Bissau pendant presque 1 an. Il réussira à quitter le pays en février 2021 suite à une médiation conduite par le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, Mohamed Ibn Chambas.

Homme influent au sein du PAIGC dont il est l’un des piliers en tant que membre du Comité central, il avait quitté son exil parisien pour se rendre à Bissau afin de prendre part au Congrès de son parti. Et c’est en plein congrès que la police a débarqué sans mandat d’arrêt, pour tenter de l’arrêter. Il a fallu la bravoure des militants pour empêcher son kidnapping par M. Embalo. La propension du Président Umar Sissoco Embalo de régner en tirant, sans opposition, est très
dangereuse pour un pays qui sort d’une guerre civile et où le cartel a de puissants réseaux. Il est temps que la CEDEAO lui rappelle à l’ordre afin de laisser les oppositions s’exprimer librement. Sans quoi, le pays risque de basculer dans un nouvel engrenage dont l’issue sera incertaine.

Francois MENDY
Journaliste-Politiste

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