Bamboula à l’IPRES

par pierre Dieme

La gestion de l’Institut de prévoyance retraite du Sénégal (IPRES) ulcère au plus haut point l’intersyndicale CNTS/SATI. En effet, elle décrie le style actuel de gouvernance de l’IPRES qui, selon elle, est un anti modèle source d’inertie et de confusions à tous les niveaux de service. Et cela malgré les déclarations tonitruantes sur les réformes dites « révolutionnaires » en cours. Les travailleurs et observateurs avertis du fonctionnement de l’Institution s’accordent à reconnaitre les graves manquements issus des choix de gestion inappropriés et impertinents d’un top management qui excelle dans le tâtonnement et le pilotage à vue.

L’intersyndicale CNTS/SATI est dans tous ses états. Dans un communiqué rendu public, les syndicalistes décrient la mauvaise gestion qui prévaut à l’IPRES. A en croire les syndicalistes, les politiques de recrutement et d’administration des ressources humaines sont aux antipodes de l’orthodoxie, parce que fondées sur le copinage et le népotisme.« Diviser pour mieux régner demeure la seule manière de gouverner dans cette institution. Sinon comment comprendre la différence de salaires qui prévaut entre travailleurs d’un même service dans une même direction et pour une même fonction. Nous réaffirmons cette maxime chère de notre législation :  » à travail égal, salaire égal « .Que dire du reclassement de nos vaillants travailleurs qui abattent un travail colossal alors qu’ils sont classés en dessous de leur fonction depuis plus de deux ans et demi pour certains, dix mois pour d’autres », dénonce l’intersyndicale qui regrette l’inexistence d’une politique de formation adéquate axée sur les métiers de la retraite et l’absence de plans de carrières dans toutes les directions de l’institution.

Son corollaire, estime-t-elle, est évidemment l’anéantissement de toute possibilité d’avancement et de promotion des travailleurs.

« Combien de travailleurs souffrent le martyr d’accumuler plus de dix (ans) voire 20 ans de service à l’IPRES, sans jamais avancer en grade et en salaire avec un système d’évaluation tatillon, d’une inefficacité certaine. Le mal être ambiant du personnel se justifie par une stagnation des salaires depuis plus d’une dizaine d’années malgré la forte inflation sur la période et les performances remarquables au travail. Ainsi, nous exigeons une hausse substantielle des salaires pour faire face à cette forte hausse de la demande sociale et la finalisation de l’accord d’établissement qui est la seule voie de salut pour les travailleurs de l’IPRES », clament les syndicalistes.

Un Système d’information obsolète et un projet de modernisation en suspens

Décrié et fustigé depuis plus de trois (03) décennies, du fait de ses multiples insuffisances, le système d’information de l’IPRES est toujours la source majeure de l’inefficacité du service public. D’après ses affiliés au CNTS/SATI, dire que la qualité de service n’est pas au rendez-vous est juste une lapalissade, dans la mesure où l’IPRES a du mal à maîtriser les flux d’information que ses services génèrent. « Beaucoup de perte d’informations, une très longue tradition de saisie de données, de pratiques manuelles au détriment d’une bonne conservation et d’une correcte liquidation des droits à pension. Alors que le projet de modernisation avait suscité beaucoup d’espoir à l’IPRES, le voilà dans une phase de léthargie, d’impasses et de complications inattendues. Après plus de cinq (05) ans d’un exercice de transformation numérique, les travailleurs se demandent encore, à quand la fin du projet ? Il nous semble utile d’interpeller le top management de l’IPRES sur l’impérieuse nécessité de faire preuve de vigilance et de diligence pour que la montagne n’accouche pas d’une souris. La vérité est que nous interpellons le Conseil d’Administration, sur l’impérieuse nécessité de commanditer l’audit technique et financier du système d’Information », réclame l’intersyndicale.

« Le système d’information a englouti des milliards, aux frais plus pesants de l’IPRES

S’il est une évidence que, techniquement le projet de modernisation a échoué, parce que les utilisateurs que sont les travailleurs ne voient pas du tout en quoi il a innové et amélioré leur rendement au travail, il est tout à fait indiqué, selon la CNTS/SATI, d’édifier l’opinion publique (allocataires, travailleurs) sur son montage financier. « Le système d’information a englouti des milliards, aux frais plus pesants de l’IPRES. En effet, selon un des syndicalistes le budget du système qui était initialement de 6 milliards est passé à 20 milliards. Au finish aucun utilisateur n’est satisfait ! Pire, plusieurs, allocataires peinent à jouir de leurs droits à une pension de retraite du simple fait d’une application informatique en déphasage avec le PSRM de Catalyst », renseigne-t-on. Les travailleurs, tous unis, dénoncent « la mise en scène et le simulacre inhérents à ce projet, alors que la mise en production n’est pas opérationnelle ! » « Camarades travailleurs, il est faux et totalement erroné de vouloir incriminer le personnel de l’IPRES, en le prenant comme bouc émissaire des graves manquements sur le SI, financé à coup de milliards ! C’est tout aussi faux de soutenir : « que le Projet ne marche pas parce que les travailleurs de l’IPRES n’acceptent pas le changement ». La délégation syndicale se réserve le droit et l’obligation de sensibiliser tous les allocataires, les travailleurs et la tutelle étatique afin que les responsabilités soient bien cernées et situées. Il est grand temps que ce projet prenne fin. Nous avons assez attendu la modernisation de notre outil de travail qui est, certes, un choix pertinent, mais cette option ne doit pas s’étendre ad vitam aeternam », indiquent les syndicalistes.

Une bonne gouvernance souffrance

« Il est maintenant bien établi que l’IPRES est devenue une niche de situations insolites ! », lit-on dans le texte qui ajoute que l’inertie accablante dans le fonctionnement de l’administration découle d’une absence de coordination des Directions due à l’inexistence des réunions de Comités de Direction. « Depuis son installation l’actuel Directeur Général de l’PRES n’a jamais convoqué de Codir. Il est inaccessible et ne s’implique dans rien du tout. Pour preuve le Directeur Général ne respecte pas le calendrier de rencontres avec la délégation syndicale, et c’est regrettable que le dialogue avec les délégués se fait par procuration via le Directeur des Ressources humaines qui n’est pas notre interlocuteur », se désole l’intersyndicale.

Quid de l’exécution du budget annuel de fonctionnement de l’IPRES ? « Beaucoup de Directions et services reconduisent chaque année les mêmes postes budgétaires jamais exécutés, alors que les ressources financières de l’Institution ont presque triplé depuis 2010. Et le plus ahurissant est que nos salaires ont stagné sur la même période malgré cette performance ! Depuis janvier 2022, l’IPRES n’a pas de Directeur du Recouvrement, ni de Directeur de l’Audit. La Direction Générale a, en effet, inauguré l’ère des postes directionnels cumulés, suscitant des conflits d’intérêt évidents », se désole la CNTS/SATI. « Le Directeur Financier et Comptable est aussi le Directeur par intérim de l’Audit Interne depuis janvier 2021, c’est-à-dire l’audité est en même temps son propre auditeur ! Bizarre Non ? Le chargé de la gestion des Prestations est en même temps le Recouvreur, Directeur des Prestations et Directeur par intérim du Recouvrement. Comme si l’IPRES ne disposait pas d’assez de compétences pour assurer la continuité du service public. Que c’est fastidieux, lourd et conflictuel ! Il est à la fois au début et à la sortie de la chaîne de collecte et de service des pensions », s’offusquent les syndicalistes qui déplorent le comportement du Secrétaire général qui est au comble de la confusion. « Ne maitrisant rien des rouages élémentaires de la gestion d’une grande Institution comme l’IPRES, l’actuel Président de l’amicale des cadres (qu’il a pris en otage pour entrer dans les bonnes grâces des administrateurs) bloque tout à l’IPRES. A la place d’une bonne coordination, le Secrétaire Général joue à créer des goulots d’étranglement partout pour soi-disant contrôler le moindre geste de ses collaborateurs. Il est bel bien le symbole de l’inertie paralysante du fonctionnement de l’IPRES. Son attitude est la seule cause de tous les dysfonctionnements ; surtout en termes d’achats, d’entretien et de distribution de consommables et d’équipement demandés par les directions et services opérationnels », dénoncent-ils.

 « l’IPRES est bel et bien dans la fange, l’inertie ».

« La démotivation du Personnel est ambiante. In fine, le seul Responsable de cette énorme confusion est le Président du Conseil d’Administration ! Seul maître à bord, il ne respecte aucun accord, son mandat ayant expiré depuis huit (08) ans, il n’en fait qu’à sa tête et met tout l’encadrement de l’Institution au pas de charge ! Les textes de l’IPRES donnent trop de prérogatives handicapantes au Conseil d’Administration. Situation qui plombe la bonne gouvernance de notre chère Maison. Ce qui rend le Directeur Général vulnérable et le met dans une camisole de force ! Que dire des innombrables projets immobiliers, montés et réalisés dans une opacité totale…. Quid du comportement des cadres de l’PRES ? Leur démission face à la situation difficile de l’IPRES est évidente et inquiète. Les Comités Directeurs étant inexistants, les cadres ont failli à leurs missions et n’impulsent aucune dynamique de réflexion sur le développement de l’IPRES. Pour clore le tout, les syndicalistes soutiennent que « l’IPRES est bel et bien dans la fange, l’inertie ».

Dans cet imbroglio sus indiqué, la responsabilité de l’Etat est encore engagée à tous points de vue menaçant même la pérennité du régime. En effet, nous interpellons l’Etat sénégalais à veiller au respect de ses engagements vis-à-vis de l’institution. Le constat est unanime que la contribution financière de l’Etat pour appuyer les nombreux projets de service de la pension minimale n’a pas été respectée et risque de fragiliser l’équilibre du régime.   

Ndèye Fatou Gning

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