Depuis peu, certains membres de la majorité sont de plus en plus nombreux à répéter que Macky a droit à une troisième candidature. Ils augmentent ainsi les risques de danger pour la République et nous courrons vers l’abîme
A Podor, pendant l’hivernage, il nous était interdit de traverser le fleuve à la nage pour aller sur l’autre rive en Mauritanie. Nos parents nous prédisaient qu’un petit maure allait nous capturer et nous réduire en esclavage. Nos parents occultaient ainsi les risques que nous encourions lors de cette traversée. Oui, il nous arrivait de traverser le fleuve à la nage, pour aller chaparder quelques patates douces et autres fruits, dans les vergers sur l’autre rive. C’était même une de nos activités favorites et un défi que nous nous lancions entre gamins, pour prouver aux autres que nous étions meilleur nageur qu’eux.
C’est bien plus tard que je compris que cette histoire de maure était une sorte de couverture et que la véritable raison de cette interdiction était d’éviter les lamantins qui remontaient le cours du fleuve en période de crue. Les chances de croiser un lamantin pendant votre traversée et qu’il vous noie sont peut-être de 1 sur 1000, mais si vous traversez tous les jours, vous périrez de noyade d’ici quelques années.
Nos parents avaient juste développé ce qu’on appelle une « paranoïa constructive »* en ce qui concernait la traversée du fleuve ; c’est-à-dire un moyen de nous préserver des pot entiels dangers à faible probabilité mais dont l’occurrence répétée est porteuse de hauts risques.
On pourra dire que Sonko, en ce qui concerne le salon de massage, a ignoré la “paranoïa constructive”. Il n’a pas été attentif aux dangers comportant un faible risque à chaque occurrence mais dont les risques ont augmenté avec une fréquence répétée.
Les alliés de la majorité n’ont pas voulu être en reste. Ils se sont engouffrés dans la perspective d’une éventuelle troisième candidature du président Sall. Certains de leurs membres avaient commencé à arpenter les médias pour venir nous seriner que le président avait droit de se représenter à un troisième mandat. Ces déclarations épisodiques prêtaient à sourire. Elles ne comportaient pas de gros risques pour la République, tant qu’elles étaient épisodiques.
Depuis peu, ils sont de plus en plus nombreux dans leur camp à le répéter. Ce faisant, ils augmentent les risques de danger pour la République et nous courrons le risque de finir au fonds de l’abîme.
Il nous faut développer une paranoïa constructive, c’est-à-dire être prudent avec les thèmes qui représentent le plus de dangers pour notre République.
C. Tidiane Sow est coach en Communication politique.
Note:
*Jared Diamond, Ornithologue, Auteur: The world until yesterday
Tidiane Sow de SenePlus