État des marchés en hivernage : l’enfer du décor

par pierre Dieme

Au Marché au poisson de Pikine et au marché de légumes de Thiaroye, la question de l’assainissement est au cœur des débats. A Pikine, des efforts sont visibles mais à Thiaroye, les commerçants attendent désespérément un sauveur.

En cette matinée ensoleillée, le Marché central au poisson de Pikine grouille de monde. L’odeur du poisson enfume partout. Sur l’espace de commercialisation, le marchandage bat son plein. Sous les étals de poisson, de l’eau rouge coule. Les clients font par endroits de longs pas pour éviter les eaux mélangées aux saletés. La brigade de nettoiement, armée de balais et de pompe à eau, est à pied d’œuvre. Au fur et à mesure, des tas de déchets s’amoncellent. Ce jour-là, le marché n’était pas occupé. Mais, plusieurs personnes sous anonymat ont fait savoir qu’après la pluie, les lieux sont inondés. Mariame Camara, vendeuse de poisson, déclare : «Parfois dans le marché, il y a de l’eau.

Mais le directeur, à chaque fois, amène des motopompes pour évacuer les eaux de pluie. Quand il pleut, on ne voit pas la clientèle. Nous ne trouvons pas de voitures également pour venir ici quand il pleut.» Autour d’elle, les mouches volent au-dessus de tout le monde. Comme elle, les acteurs souhaitent des mesures pour de meilleures conditions de vente. «Nous interpellons le président de la République, notre ministre de tutelle, Alioune Ndoye, pour des solutions idoines dans un délai-record. Parce que le Marché central est un marché qui est fréquenté par plus de 8 mille personnes par jour.

Donc ces va-et-vient constituent un énorme potentiel pour l’économie du Sénégal alors que quand il pleut nous souffrons», lance Mamadou Sow, président des acteurs du Marché central au poisson de Pikine. Selon le directeur du marché, Kadialy Gassama, l’infrastructure accueille environ 300 tonnes de poisson commercialisées par jour. Le poisson, qui quitte en effet les quais du Sénégal de Saint-Louis à Kafountine, converge ici où est organisée la régulation entre l’offre et la demande. C’est le lieu d’approvisionnement des marchés secondaires de Dakar et environs.


A l’arrière, est installé le marché Diola. Huile de palme, poisson séché et autres produits y sont exposés. La soixantaine, Coumba Diallo découpe à l’aide d’un coupe-coupe un gros poisson sec en morceaux. Chargée des relations extérieures du marché Diola, elle décrit le manque d’assainissement. Elle dit : «Les difficultés sont énormes, plus particulièrement les inondations. Si la pluie est abondante, les eaux entrent jusque dans les bagages. C’est l’assainissement du marché qui est vieux. On lance un cri du cœur à l’Etat, au ministre de la Pêche, afin qu’il nous aide à assainir le marché.» A quelques mètres des vendeurs, sont stationnés des camions frigorifiques qui laissent échapper de l’eau qui, avec le temps, est devenue noirâtre. Kadialy Gassama, directeur du Marché central au poisson de Pikine, annonce qu’un bassin de rétention y sera construit pour bien gérer les eaux pluviales. «Nous avons anticipé.

Il y a 4, 5 mois de cela, nous avons pris des dispositions pour l’assainissement. Nous avons fait des travaux qui nous ont permis, avec les importantes quantités d’eau tombées, de drainer les eaux de pluie, les minutes, les heures qui suivent. Au point que le Marché central au poisson de Pikine, qui est situé sur un point bas, n’a pas été affecté par ces importantes quantités d’eau tombées. Les années passées, les eaux stagnaient ici pendant longtemps», dit-il de la situation après les dernières fortes pluies qui se sont abattues sur Dakar avec leur lot de dégâts.


Après Pikine, un tour au marché de légumes de Thiaroye, toujours dans la banlieue de Dakar. Après près d’une trentaine de minutes de route en voiture, l’on découvre le visage du marché : il est sale. Une image très peu reluisante. Aux abords de l’entrée qui mène au marché, des tables garnies de légumes frais. La route boueuse, dégueulasse, peut vite dé­courager la fréquentation du marché.
Thiaroye, l’horreur
A l’intérieur, c’est un petit marigot qui s’est formé. Les marchandises sont transportées sur des chariots ou à dos vers les magasins. Assis devant leurs commerces, les marchands restent impuissants et incrédules. Dans le magasin de Mohamed Lamine Sylla, sont rangés des sacs de carotte. Il nous montre sur son téléphone portable, le niveau de l’eau dans le magasin lors des dernières fortes pluies. «Quand il pleut, on ne peut pas vendre. Si nous avons des bagages qui quittent en ville pour venir au marché Thiaroye, les véhicules ne rentrent pas. Ils s’arrêtent au bord de la route, là-bas, et puis on paye des jeunes qui les acheminent jusqu’ici.

Cela nous coûte cher. A chaque pluie, c’est comme ça et chaque année, la même situation», peste le jeune commerçant guinéen. Ses propos sont corroborés par Boury Cissé. «Notre grosse difficulté, c’est qu’on souffre en période de saison des pluies. Il suffit qu’il pleuve un peu, notre travail est à l’arrêt. Vous voyez vous-même cette eau stagnante. L’eau ne bouge pas parce qu’il n’y a pas d’assainissement. Dès que la pluie tombe, bonjour les dégâts, on perd toutes nos marchandises. D’ailleurs de nombreux commerçants arrêtent de travailler pendant la saison des pluies. Toutes les eaux de ruissellement du quartier se déversent ici. Nous sommes fatigués.»

Par Aliou DIALLO

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