Tout n’est pas perdu pour l’opposition parlementaire, en dépit de la majorité absolue de la mouvance présidentielle pour la 14e législature. En fait, estime Mamadou Albert Sy, les parlementaires de Yaw et Wallu auront toujours leur mot à dire. Si ces derniers parviennent à obtenir 82 députés, la marge de manœuvre du groupe parlementaire restera tout de même réduite. L’analyste politique soutient que le groupe parlementaire de la majorité gagnerait à accepter une gestion concertée, notamment un partage du bureau et des commissions de l’Assemblée nationale avec celui de l’opposition et éventuellement les non-inscrits.
Maintenant que le débat d’une cohabitation à l’Assemblée nationale est clos, le groupe parlementaire de la majorité risque de ne pas pouvoir dérouler librement la politique du régime en place. Après avoir obtenu la majorité absolue, le problème de confrontation entre la coalition Benno Bokk Yakaar et celle de Yaw-Wallu est entier. A en croire Mamadou Sy Albert, si jamais le groupe parlementaire de l’opposition obtient le soutien des deux voix restantes des autres coalitions, il peut mener la vie dure aux députés du pouvoir.
«Maintenant la coalition Benno Bokk Yakaar a obtenu 83 députés, l’inter coalition Yaw-Wallu en a pour le moment 80. Si jamais Thierno Alassane Sall et Pape Djibril rejoignent la coalition de l’opposition, Yaw-Wallu aura 82 députés. Que Bby ait une majorité absolue ou relative, le jeu est égal. Concrètement, le président de l’Assemblée nationale sera désigné par la session parlementaire. S’il est élu avec une voix de différence, il ne peut pas ne pas tenir compte des 82 voix de l’opposition», soutient l’analyste politique.
«Bby n’a pas la majorité mécanique pour tout imposer comme avant. Le problème reste entier !»
Selon toujours Mamadou Sy Albert, l’opposition aura aussi son mot à dire dans la composition du bureau de l’Assemblée nationale surtout pour les commissions. «Donc c’est un partage des voix qui est la meilleure solution. Parce que Bby n’a pas la majorité mécanique pour tout imposer comme avant. Le problème reste entier ! Les Sénégalais veulent une Assemblée qui a le pouvoir législatif et Yaw-Wallu ne va pas céder sur cette question. Les députés de l’opposition vont tout faire pour que l’Assemblée retrouve ses prérogatives. Maintenant Bby ne pourra pas s’opposer à la volonté de contrôle de l’Assemblée, c’est la même chose pour les commissions pour les enquêtes parlementaires», a-t-il indiqué.
«Le groupe parlementaire Bby sera confronté à de nombreux amendements de la part des députés de l’opposition»
L’autre point sur lequel l’opposition pourra mener la vie dure à la coalition Bby concerne le vote de budget. D’après l’analyste politique, en dépit de sa majorité absolue, le groupe parlementaire Bby sera confronté à de nombreux amendements de la part des députés de l’opposition. Face à cette situation, Mamadou Sy Albert estime qu’il est nécessaire pour le camp du pouvoir de travailler avec l’inter coalition pour mettre en place une gouvernance concertée.
«Si Bby ne joue pas la concertation, on va vers des blocages. La coalition du pouvoir ne doit pas chercher ces blocages parce que cette législature est au moins pour deux ans. Et quel que soit le vainqueur de la présidentielle en 2024, l’Assemblée pourra continuer avec la gestion concertée ou tout simplement dissoudre le parlement s’il y a trop de conflits. Comme il y a tellement de contentieux au Sénégal, notamment sur le code électoral, le parrainage, le processus électoral, l’Assemblée a du boulot. Et s’il y a une concertation, il y a de forte chance que le pouvoir et l’opposition s’entendent sur beaucoup de questions», explique-t-il.
Revenant sur le ralliement de Pape Diop qui a permis à la coalition au pouvoir d’obtenir la majorité absolue, le politologue pense que cette démarche ne fera que renforcer les hostilités entre les deux camps. «Il faut éviter ce que Pape Diop a fait. Même s’il est sincère, tout le monde va croire à une transhumance et à l’argent. Et si cet esprit de marchandage persiste, Bby va continuer d’acheter des députés de Wallu et de Yaw. Cet engrenage doit être évité parce que ça va créer la suspicion», dira-t-il.
Saly Sagne (Actusen.sn)