Si les victoires de Yaw à Dakar, Pikine, Guédiawaye, Thiès, Diourbel et Ziguinchor étaient plus ou moins attendues, peu pouvaient prévoir la déroute du camp présidentiel dans des villes comme Louga ou Saint-Louis lors de ces législatives
Les revers enregistrés par la Coalition Benno dans la majorité des grandes villes du pays font juste écho aux résultats enregistrés durant les Locales. Si les causes en sont nombreuses, les silences et ambiguïtés du président Macky Sall sur bien de sujets ont pu aussi lui porter préjudice.
Hier soir, comme les premières tendances se précisaient, l’Assemblée nationale est partie pour se parer sur une grande partie, des couleurs de l’Inter-coalition Yewwi-Wallu. Les projections de certains spécialistes électoraux sur les plateaux de radios et télés, dessinaient une très forte poussée de ces deux coalitions, tandis que la Coalition Benno du Président Macky Sall semble subir une grosse déroute jusque dans les lieux qui lui semblaient définitivement acquis. Au point que certains prédisaient même une éventuelle cohabitation. Un résultat que rien ne semblait présager pourtant.
Si les victoires de Yaw à Dakar, Pikine, Guédiawaye, Thiès, Diourbel et Ziguinchor étaient plus ou moins attendues, dans la logique de leurs succès lors des Locales, peu pouvaient prévoir la déroute des partisans de Macky Sall dans des villes comme Louga ou Saint-Louis. Le plus inattendu est même la défaite des ténors de la majorité présidentielle -on ne devrait bientôt plus utiliser ce terme, semble-t-il- dans leurs propres bureaux de vote. Amadou Ba aux Parcelles Assainies, Mame Boye Diao à Kolda, Aminata Touré à Kaolack, Mansour Faye, entre autres, ont essuyé des revers qui pourraient s’assimiler à un rejet de la part des électeurs.
Hier soir, on pouvait sentir que les alliés des deux grandes coalitions de l’opposition avaient renforcé leur présence en termes de sièges à l’Assemblée. Les questions qui se posent maintenant sont de savoir ce qu’elles voudront faire de leur nouvelle force. Pour cela, il faudrait que leurs victoires ne les grisent pas, ce qui n’est pas donné.
Néanmoins, si le président Macky Sall a été fortement ébranlé, la Constitution lui garantit un certain nombre de leviers sur lesquels il pourrait jouer, pour sinon rester le maître du jeu, du moins ne pas s’en faire totalement sortir.
Il lui faudra nécessairement prendre l’initiative sur beaucoup de choses où il a pendant longtemps entretenu l’ambiguïté. Or, comme disait le Cardinal de Retz, on ne sort de l’ambiguïté qu’à son détriment. Plusieurs personnes dans son parti et son entourage ont bénéficié d’une impunité qui a pu révulser l’opinion, sans que l’on l’entende s’exprimer. Pire, il en a même maintenu certains dans le gouvernement, en dépit de tout bon sens.
Sa réticence à nommer un Premier ministre alors que le poste venait d’être rétabli, n’a pas été comprise, alors que le pays traverse, à l’instar de bien d’autres dans le monde, une crise alimentaire assez sévère. Conséquence, tous les effets des hausses des prix des denrées alimentaires lui sont imputés, alors qu’il fait de grands efforts pour les atténuer !
De même, le silence sur une éventuelle troisième candidature à la Présidentielle a joué comme le prétexte à vouloir éliminer certains opposants politiques, même ceux sur les têtes desquels reposent de très graves imputations pénales.
Mais la politique est un miroir de la vie. Il est certain que rien ne pouvait durer indéfiniment. Macky Sall a déjà eu l’opportunité à plusieurs reprises de montrer sa capacité à rebondir et son flair politique. La nouvelle configuration politique qui se dresse lui donne une nouvelle occasion de faire montre de ses talents.
Mohamed Gueye