Récemment des cas de noyades sont notés au Sénégal, particulièrement dans la banlieue dakaroise. Sur la plage « magic land », près de Soumbédioune, les visiteurs sont conscients de cette situation mais veulent, également profiter de cette période de fortes chaleurs, et se ruent vers la plage.
« Je fais attention, bien que la peur nous retienne d’aller plus loin… », assure cet élève de terminale, Abdou Aziz Diop. Venu se baigner à la plage en cette période d’été, short et t-shirt bleus, il discute avec ses amis sur un ton taquin. Abdou dit « respecter les règles des maîtres-nageurs, à la lettre ». Devant la mer limitée par de grandes roches sur une longueur de plus de trente mètres, une forte odeur de poissons exposés et de la fraîcheur se dégagent.
La présence des maîtres-nageurs le rassure. « Je pense qu’ils (les maitres-nageurs) sont là pour nous surveiller. Mais je vois qu’ils ne peuvent pas contrôler tout le monde qui vient à la plage. Mais j’avoue qu’ils fournissent beaucoup d’efforts pour la sécurité des baigneurs », affirme-t-il, avec assurance. Les cas de noyades notées récemment ces dernières semaines, ne sont pas ignorés à « magic land » (plage magique). Les gens viennent se baigner néanmoins non sans pression.
Sous le regard des maitres-nageurs…
Il fait presque 19 heures, le vent frais de la mer de Soumbédioune nous accueille. Plus nous avançons, la brise manifeste ses effets. La vue est large. Maurice Niane vient à peine de sortir de l’eau. Envahi par la fraîcheur, il grelotte. S’échauffant les mains entrecroisées derrière son dos, il demande de la cigarette à son ami qui fume à coté « taalal ma benn » (allumes-moi un mégot). Il expulse la fumée et lance « les parents doivent interdire aux enfants d’aller à la plage. C’est un danger. Même si cette plage (magic land) est autorisée, il faut toujours veiller sur eux ».
Maurice trouve le problème chez les enfants et indexe « leur manque d’attention ». « Je me baigne pendant quelques temps mais j’ai toujours en tête que les cas de noyade deviennent plus récurrents en ces temps de vacances », précise-t-il, la voix calme. Poursuivant sous les rires et la musique d’un parc à coté, « heureusement qu’il y a des maîtres-nageurs. Ils font leur travail comme cela se doit. Il n’y a rien à craindre ici », rassure-t-il, avec son sous-vêtement bleu et sa culotte rouge mouillés.
La plage commence, peu à peu, à se vider. Certains commencent à quitter les lieux. Le visage de l’espace s’assombrit. Les rires et les rigolades baissent de volumes. Le crépuscule s’annonce. Nous sommes à quelques minutes de 20 heures, Lamine Camara est toujours dans l’eau. L’originaire de la Guinée Conakry continue sa baignade. Quelques instants plus tard, il abandonne ses amis. Il sort carrément et se dirige vers son ami, assis près d’une cabane.
De teint clair, les mains sur la ceinture, debout, Lamine n’a aucune crainte « Je vois des gens même plus jeunes que moi en train de se baigner aisément dans l’eau. Pour moi, ce n’est pas un problème. C’est juste pour le plaisir », déclare le jeune homme de 25 ans. Sur les cas de noyade surtout en période vacances, il observe un moment son ami comme s’il venait d’entendre l’information. « J’ai entendu les différents cas de noyade mais je ne crains rien. Les maîtres-nageurs sont là et veillent sur nous. Je n’ai pas peur, je sais me baigner », répond-t-il fièrement. Le résidant de liberté 6 considère ces cas de noyade comme des « personnes malchanceuses ».
Médoune Mboup est maitre-nageur. Trouvé dans une cabane, torse-nu, il vient juste de sortir de l’eau. « Nous veillons sur la sécurité des baigneurs. Pour l’instant, nous n’avons enregistré pas d’incidents majeurs. Nous accompagnons toutes les personnes venues se baigner », déclare-t-il une serviette grise autour de la taille. Médoune pense que le problème des noyades vient souvent des baigneurs. Selon lui, les plus jeunes vont plus loin et dépassent même les limites fixées.
« La noyade, une responsabilité partagée »
« Parfois s’il y a danger, leurs camarades attendent assez longtemps pour appeler aux secours. Le sauvetage devient trop tard. Bien que nous veillons à la sécurité de tous, parfois certaines choses nous échappent », constate le maître-nageur.
Trouvé assis sur une roche à quelques pas, s’appuyant sur sa jambe droite, Ousmane Sène ne vient pas se baigner mais veut admirer l’environnement, dit-il souriant, pour oublier ses soucis. Le natif de Fatick, teint noir et habillé en t-shirt blanc, considère que les jeunes doivent observer plus de vigilance sur les plages. « J’ai eu écho des cas de noyade, surtout en période de vacances, mais les jeunes doivent prendre en considération l’interdiction de certaines plages à Dakar. Cependant, poursuit-t-il sur un accent plus grave, la responsabilité est partagée. Il y a celle des parents et également la responsabilité de l’Etat ».
En ces débuts de vacances, les plages restent les principaux lieux d’attraction. Entretenant ses cabanes qu’il loue aux visiteurs, Ibrahima Diallo fonce directement vers les jeunes. « Avant de venir, il faut prendre ses précautions. Pour se baigner, faut d’abord savoir ce que l’on fait. Sans ces préalables, c’est juste se suicider », argumente-t-il, désolé. Torse-nu, s’adossant sur une chaise bleue, il poursuit : « nous veillons sur tous ceux qui viennent se baigner. Pendant ces quelques moments de baignade, nous devenons, en quelque sorte, leurs responsables », rappelle-t-il, avant d’appeler à plus de vigilance aux adeptes des plages en ces périodes.