Ibrahima Hamidou Dème : « on ne doit pas tordre le cou a la loi pour satisfaire les grandes coalitions »

par pierre Dieme

De nos jours, plusieurs décisions de justice qui ont un rapport avec la politique sont souvent contestées par une certaine catégorie de personnes. Invité du Jury du Dimanche, l’ancien juge Ibrahima Hamidou Dème, par ailleurs membre de la coalition AAR Sénégal, a tenté d’expliquer cet état de fait. Le prétexte c’est les listes validées ou invalidées par les différentes commissions en charge de l’organisation des élections législatives du 31 juillet 2022.

Sur une question de savoir est-ce que le juge constitutionnel doit tenir compte de ce qu’on appelle la paix sociale au moment de rendre sa décision ? Il a répondu : « la première considération c’est quand on a parlé de paix sociale, moi j’ai été étonné. Parce que je n’ai vu nulle part une crise et je ne peux pas voir une crise naître de l’application effective de la loi. Il n’y a pas eu de crise. On était dans un processus électoral. Certes il y’a des personnes qui pensent qu’il serait difficile de faire une élection sans que les listes des deux plus grandes entités, la totalité de leurs listes ne soient pas présentes. Je parle de la totalité de listes parce qu’il faut comprendre que la liste nationale n’est composée que de 53 députés. C’est même moins d’un tiers des députés. Il y’a 112 autres députés qui sont dans la liste départementale », a-t-il soutenu.

Avant de poursuivre : « donc, une coalition peut ne pas se présenter dans la liste proportionnelle nationale, mais avoir la majorité à l’assemblée nationale. Rien ne s’y oppose. D’autre part, même si ces entités politiques n’étaient pas complètement exclues de ces élections-là, je ne vois pas en quoi le non-respect des dispositions légales par une entité politique et ce non-respect est manifeste nous le constatons tous, cela pourrait amener une crise ? Je ne le vois pas. Parce que seule la loi protège. Seule l’application de la loi protège ».

Pour revenir à la question, il a déclaré maintenant, les juges doivent dans leur décision tenir compte de certains paramètres. « On ne s’est jamais plaint de l’application manifestement donc incompréhensible de la loi. On a toujours reproché le conseil constitutionnel de se déclarer incompétent, mais quand le conseil constitutionnel se prononce toujours au fond ce sont des décisions qui sont motivées en droit. Alors qu’en l’espèce, nous sommes étonnés. Parce qu’avant cela, il y’a eu l’intervention de certaines personnalités de la société civile qui ont plaidé pour la recevabilité de toutes les listes. C’est à ce moment que dans notre coalition, qu’on s’est dit qu’il faudra qu’on intervienne pour mettre les points sur les « i ». Pour demander l’application de la loi pour tous ».

Selon donc l’ancien juge : « On ne doit pas tordre le cou à la loi pour satisfaire les grandes coalitions. C’est très grave et très dangereux de croire qu’on ne peut pas faire une élection sans Benno et Yewwi. Notre justice est certes imparfaite, mais le Sénégal est jusque-là un État de droit. On critique notre justice à juste titre. Le Sénégal est jusque-là une démocratie avec ses difficultés. Mais les institutions marchent ».

Cheikh Moussa SARR

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