Libération des Thiantacounes : Le coup de grâce aux familles des victimes 

par pierre Dieme

Depuis plusieurs mois, voire plusieurs années, les grâces présidentielles accordées à une certaine catégorie de détenus créent de vives polémiques. Car, parmi eux, des personnes condamnées pour crimes de sang font partie de la longue liste des détenus appelés à humer de nouveau l’air de la liberté.  

A la veille de chaque évènement comme la célébration de l’accession à la souveraineté internationale du Sénégal, la fête du nouvel an ou encore les fêtes de Korité et de Tabaski, suivant ses prérogatives, le Président de la République ne manque jamais l’occasion de gracier des centaines, plusieurs centaines de détenus. La majorité d’entre eux, suite à leur condamnation pour des délits qui sont loin de ceux qui entrent dans le registre des crimes (de sang par exemple), sont mis sur la liste des détenus à gracier. Il faut rappeler que la grâce présidentielle est une prérogative personnelle du chef de l’Etat.

Ainsi, si le président de la République n’a pas le pouvoir d’effacer une condamnation, comme c’est le cas pour l’amnistie, il peut toutefois réduire ou remplacer la peine. C’est le cas de Karim Wade qui avait été condamné à six ans de prison et 138 milliards francs CFA d’amende par la Cour de répression de l’enrichissement illicite. Par la suite, il avait pu bénéficier d’une grâce présidentielle au même titre que certains de ces co-accusés tels que Bibo Bourgi et Alioune Samba Diassé. Ils avaient tous été condamnés pour enrichissement illicite. Il en est de même pour Khalifa Sall, qui avait également bénéficié d’une grâce présidentielle à la suite de sa condamnation pour cinq ans pour détournement de deniers publics dans le cadre de l’affaire dite de la caisse d’avance de la ville de Dakar.

Pour ces grâces présidentielles comme pour la majorité, aucune polémique, aucune contestation n’occupe la plus publique. Mais, ce n’est malheureusement pas le cas dans certaines situations. Et pour cause, des grâces présidentielles ont effectivement fini par créer de vives tensions. C’est le cas par exemple du trafiquant de faux médicaments Amadou Woury Diallo. Il faut dire qu’il avait obtenu la grâce présidentielle alors qu’il avait été condamné à 5 ans de prison, suite à l’affaire de la cargaison de médicaments chargée en Guinée-Bissau et acheminée à Touba pour une valeur d’un milliard 300 millions. Une mesure qu’avait fortement dénoncé l’ordre des pharmaciens du Sénégal, avant qu’il ne soit à nouveau condamné…mais par contumace. Que dire de ce détenu gracié et qui avait lâchement assassiné l’étudiante congolaise Lotaly Mollet, aux HLM Grand Yoff. Au finish, le débat tournait autour d’une erreur commise sur le nom.  

LIBERES APRES DES CRIMES DE SANG … ? 

Sur la même lancée et par rapport aux grâces présidentielles accordées à une catégorie de détenus, le débat continue de se poser. Les contestations sont vivaces et permanentes. Des questions sont posées. Certains se demandent quelles sont les mains influentes qui ont pu faire libérer de tels individus condamnés à des peines de plus de dix pour réclusion criminelle. En tout cas, parmi  les 824 prisonniers libérés à la veille de la fête de l’indépendance, figurent les meurtriers de Médinatoul Salam. Il faut rappeler que Cheikh Faye, chambellan du défunt Guide Cheikh Béthio Thioune ainsi les autres codétenus étaient reconnus coupables suite à un procès qui a suivi l’affaire  Ababacar Diagne et Bara Sow. Ces deux thiantacounes avaient été sauvagement tués et enterrés en catimini dans la forêt de Keur Samba Laobé, près de Mbour. Les personnes graciées par le Président Macky Sall sont Mamadou Guèye, Aliou Diallo, Mouhamed Sène, Moussa Dièye,  Adama Sow, Aly Diouf, Aly Diouf, Momar Talla Diop, Serigne Khadim Seck, Abdoulaye Diouf, et Cheikh Faye. Ce qui a fini de créer de vives polémiques pour ne pas dire de vives contestations. La famille de Ababacar Diagne étant monté au créneau pour ruer dans les brancards. Sa mère comme son épouse ont dénoncé une telle décision concernant la libération de personnes accusées, jugées et condamnées dans leur meurtre de leur enfant et époux. Une occasion pour s’interroger sur la pertinence de certaines grâces présidentielles accordées à des criminels. Tout en faisant remarquer que selon l’article 47 de la Constitution, «le Président de la République a le droit de faire grâce», il faut surtout indiquer que l’administration pénitentiaire, le Ministre de la justice et le Directeur des affaires criminelles et des grâces y jouent un rôle incontournable. Fort heureusement, selon la loi au Sénégal, «toute personne peut bénéficier de grâce si toutes les voies de recours soient épuisées. Autrement dit, que la personne soit condamnée définitivement et ne puisse pas faire appel de sa décision. 

Oumar WADE

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