L’interdiction des listes parallèles décidée par le président Macky Sall, au sein de la coalition Benno Bokk Yaakaar (Bby) pour les élections prochaines législatives va-t-elle passer comme lettre à la poste ? En tout cas, pour le politologue Moussa DIAW, certains responsables de la mouvance présidentielle risquent de prendre le contre-pied du chef de l’État.
Lors de son déplacement dans la région de Tambacounda où il devait prendre part à la cérémonie officielle du Daaka de Médina Gounass, le Président Macky Sall a annoncé sa décision d’interdire les listes parallèles au sein de Benno Bokk Yaakar (BBY) lors des prochaines élections législatives. Cependant, ce qui s’est passé au sein de la coalition au pouvoir aux dernières locales poussent beaucoup d’observateurs de la scène politique à s’interroger sur la matérialisation d’une telle demande.
Selon le Pr Moussa Diaw, enseignant-chercheur en sciences politiques, la tâche s’annonce difficile pour le patron de l’Alliance pour la République (Apr). «Ce n’est pas sûr que les responsables de Bby suivent cette directive, parce qu’il avait fait la même demande au début avec les élections locales. Il les avait mis en garde contre toute liste parallèle, cela n’a pas empêché certains responsables de l’Apr qui n’ont pas été investis officiellement dans les listes par la coalition de dresser leurs listes parallèles. A l’époque, on s’attendait à des sanctions, mais rien n’a été fait. Et c’est par la suite, qu’au cours d’une intervention à Paris, auprès de diaspora, qu’il avait dit que c’est lui-même qui avait autorisé certaines listes parallèles. Alors, ça, c’est une contradiction énorme. Ou bien, il est intransigeant à l’encontre de tous ceux qui seraient tentés de faire une liste parallèle ou bien il leur autorise à faire des listes parallèles. On ne comprend plus. Donc, c’est ce double langage-là qui est incompréhensible», explique-t-il.
D’après l’universitaire, les choses risquent d’être compliquées pour le locataire du Palais, du fait de la non structuration de sa formation politique. «Pourquoi les leaders n’écoutent pas les directives du parti ? Eh bien, c’est parce que le parti n’a simplement été structuré. Il n’y a jamais eu de congrès pour procéder à une restructuration du parti et désigner les responsables des départements, avec des hiérarchies. C’est comme ça qu’on saurait qui est responsable de l’Apr dans tel ou tel département, le numéro un, le numéro deux, le numéro trois. Comme ça, on n’aurait aucun problème au niveau du respect des directives du parti. Mais, le parti n’est pas structuré, peut-être c’est volontaire ou le Président n’a pas eu le temps, parce qu’il aurait pu structurer son parti. Et le résultat du manque de structuration de ce parti est que les responsables se disputent les positions du pouvoir, le rapprochement avec le Président. Et cela montre un laisser-aller qui, aujourd’hui, crée des problèmes, parce que si même le Président interdit les listes parallèles, il est évident qu’il y aura des gens qui vont outrepasser cette décision. Maintenant, c’est à lui de voir comment procéder», indique le Pr Moussa Diaw, joint au téléphone par «L’As».
Poursuivant, l’enseignant-chercheur en sciences politiques affirme : «Récemment, il a désigné des gens pour faire de la réconciliation, de la concertation afin de réunir les responsables dans les départements. Certains ont réussi, d’autres n’ont pas réussi. D’autres rencontres se sont terminées par un fiasco. Maintenant, c’est au Président Macky Sall d’être intransigeant et vigilant par rapport à ceux qui seraient tentés de dresser des listes parallèles. Ce n’est pas du tout facile, parce que le contexte n’est pas du tout favorable et il ne faut pas procéder à des sanctions, parce que cela risque de se retourner contre lui».