Passées les bornes, y’a plus de limites

par pierre Dieme

« L’Ous-Tâche » Lamine Sall n’a pas seulement insulté la communauté chrétienne du Sénégal. Il a insulté gravement tous les Sénégalais qui vivent en harmonie dans notre pays, et qui donnent un exemple d’œcuménisme rare dans le monde d’aujourd’hui

« Le drame profond de notre pays demeure dans le fait glorieusement assumé et revendiqué que la plupart des gens ne comprennent pas ce…qu’ils savent ». Aphorisme JPC

Ibn Rochd dit Averroès a écrit cette absolue vérité qui nous enseigne que « chaque classe doit croire selon son degré d’intelligence, et ce serait une faute pour l’homme du peuple de vouloir raisonner comme un philosophe, de même que ce serait une faute pour un philosophe de se contenter de la foi d’un homme du peuple ».  

Les Sénégalais sont ahuris et ont été choqués par les propos irresponsables et incendiaires tenus sur les antennes d’une chaîne de télévision sénégalaise majeure, Walfadjiri Tv en cette triste occurrence, par comment dire, la « Sale Lamigne » ou le « Pâle Samine (guide) » c’est selon, pour désigner l’Imam Lamine Sall, sinistre Ayatollah plutôt « Aya-touly » de notre si cher dialogue Islamo-chrétien.

Ce récidiviste de la provocation à la haine religieuse, qui avait déjà proféré ces inepties loufoques et dangereuses sur un plateau de la 2STV, le 17 février dernier, a pu encore une fois déverser sa haine des catholiques de notre cher Sénégal, lors de la populaire émission de Walfadjiri, Dine Ak Diamono, lancée il a des années par le très regretté Sidy Lamine Niasse, en bavant ces mots inouïs et puants, que je cite, une pince-à-linge vissée sur mes narines : « Quand on est capable d’écouter chaque semaine des gens qui proclament que Dieu a un fils, qui sont des catholiques, qui ne sont pas des croyants, « des Jullit », qui chaque dimanche, dans notre Sénégal, n’ont rien à envier à la franc-maçonnerie, du fait que tout ce qui n’est pas Islam est mécréant… Si on peut accepter que des gens qui ne sont pas des croyants, puissent vivre au Sénégal, et que chaque dimanche, ils aient le droit de prier, à ce moment-là on doit accepter les francs-maçons et les homosexuels ». Une fois que vous avez lu ce passage, il convient d’aller refaire vos ablutions.

Ces outrances inadmissibles sont avant tout une insulte grave à la mémoire et à l’endroit de Sidy Lamine Niasse, qui dès l’origine de la radio, puis de sa télévision, a choisi Jamm, de Julien Jouga et de la chorale de Saint Joseph, avec Doudou Ndiaye Rose, pour en faire le charriot, l’indicatif de ses sessions d’information, et l’identité sonore de son média.

Dire cette ineptie crasse au moment du Magal de Serigne Fallou, dont les enfants ont été les seuls autorisés à assister à l’enterrement de Senghor au cimetière de Bel-Air, signe des excellentes relations entre ces deux hommes exceptionnels, est un signe d’obscurantisme absolu.

« L’Ous-Tâche » Lamine Sall n’a pas seulement insulté la communauté chrétienne du Sénégal. Il a insulté gravement, de par la vulgarité de son propos, tous les Sénégalais qui vivent en paix et en harmonie dans notre pays, et qui donnent un exemple d’œcuménisme rare dans le monde d’aujourd’hui.

Celui à qui il faut tirer les oreilles, c’est le présentateur de l’émission, qui il faut le reconnaître, a bien essayé quoique bien mollement, d’endiguer la furie de son invité, mais qui a négligé de se désolidariser et de ses propos et de son agressivité envers une communauté qu’il ne connait pas. Mais comment s’en étonner car de nombreux musulmans n’ont ni étudié ni compris les sourates 3 et 19 du Coran, ni et c’est moins pardonnable, la pensée de Serigne Cheikh Ahmadou Bamba sur Marie. Or cet imam raisonne, ou plutôt « résonne » comme un ignorant déguisé en philosophe. Ne disposant que d’une seule idée qui d’ailleurs n’est pas de lui, il l’étale comme l’on le fait du beurre en période de pénurie. Mais il n’est pas fautif, d’abord, il est comme beaucoup de personnes qui savent réciter des pages entières et des prières issues des textes sacrés sans en comprendre un traître mot, ne connaissant leur religion que par ouï-dire.

Le problème est qu’un Imam ignare peut être invité à une heure de grande écoute sur une télé nationale, et que trop d’ignares justement arrivent à être invités sur des plateaux à force d’esbrouffes et de compromissions coupables.

D’improbables et autoproclamés experts ou spécialistes sont couramment invités à délivrer leurs avis sur d’importantes problématiques de société qui devraient être traités sérieusement. Pour les questions théologiques auxquelles les croyants de notre pays sont confrontés, l’Imam Lamine Sall n’est juste que le « triste bouffon du chapelet, du Sidiada et du Satala réunis », et cela doit cesser !  C’est ce nivellement par le « fond du panier », qui est en train de pornographiser notre société.

Il est temps, parce la plupart des gens ne comprennent pas ce qu’ils… savent, que ceux qui savent parlent et que ceux qui ne savent pas, se taisent !

Il est souhaitable, que face à de tels agissements et débordements de langage, les autorités religieuses les plus hautes de notre pays, signalent à leurs fidèles que les attitudes de ces extrémistes sont inacceptables, et les réprouvent, sauf à faire imaginer qu’elles pourraient être enclines à les valider ? Not in our name ! Pas « en notre nom » ! C’est simple. Évidence…biblique.

Ma chronique n’est pas le lieu où l’exégète que je ne suis pas, va vous faire cours sur « La Sainte Trinité », mais c’est mon espace de liberté, à commencer par celle de croire en ce que je veux, comme stipulé par l’article 1er de notre Constitution en ces termes : « La République du Sénégal est laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la Loi de tous les citoyens, sans distinction d’origine, de race, de sexe et de religion. Elle respecte toutes les croyances ».

Une plainte collective va donc être déposée auprès du Procureur de la République, le ministre de l’Intérieur aurait convoqué l’Imam Alioune Sall pour des « explications », lui-même s’est excusé penaud mais sans proposer plus d’intelligence dans ses murmures gênés et contorsionnés, et la communauté catholique, attend de voir la suite qui va être donnée à ce scandale, scandale qui aurait dû être évité par une gestion professionnelle de la situation.

Émission en direct ou en différé ? D’abord, quand on ne sait pas faire du direct on s’en abstient définitivement sauf si c’est tristement et sournoisement volontaire, question que l’on est en droit de se poser, lorsqu’on découvre que ce jeudi, l’émission « Dine Ak Diamono » avait été enregistrée, et que la diatribe de l’Imam Lamine Sall n’avait pas échappé à l’animateur qui n’avait pas su lui couper la chique et lui signifier que ces mots ne pouvaient être aboyés sur son plateau.

Heureusement, nos institutions fonctionnent, à l’instar du Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA) qui a mis en demeure la chaîne privée Walf TV d’arrêter ses « manquements graves » au cahier des charges des médias audiovisuels et de présenter ses excuses à la communauté catholique, pour ces propos de nature à « disséminer la haine ou à susciter la division ».

Dans notre Sénégal, qui sent le gaz tout de même, le rôle des médias est d’importance capitale, qui doit leur rappeler que c’est à partir de simples microphones, que l’horreur s’est répandue à travers le Rwanda. Nos médias ont l’impérieuse obligation d’éviter de provoquer une confrontation entre les religions, les confréries ou les communautés, et de se garder de diffuser des propos incitant à l’intolérance, à la stigmatisation, à l’exclusion et à la marginalisation.

Ils doivent favoriser ce singulier dialogue islamo-chrétien, dont je dois admettre que son évocation est plutôt récente… Il allait de soi, du temps où Monseigneur Hyacinthe Thiandoum, entretenait avec Serigne Seydou Nourou Tall des rapports exceptionnels de fraternité en Dieu, au point de lui céder la Caravansérail qui appartenait à l’église, pour qu’avec sa communauté religieuse, il puisse ériger sa grande mosquée, on ne parlait pas à tout bout de champ le dialogue islamo-chrétien. C’était le Sénégal des élégances électives, pas celui du « Ok, on dialogue. Mais ferme-la » …

Il semblerait que la parole divine et les messages divins soient reconnaissables par le fait qu’ils nous rassemblent, et que souvent ceux des hommes nous divisent. Le premier des blasphèmes n’est-il pas de clamer « Dieu m’a dit » ? Qui parmi nous a son Skype ?

Le muezzin qu’il me plaît parfois d’écouter, psalmodie avec le groupe Saïan Supa Crew, et nous interroge : « Au nom de quoi ? »

« Au nom de quoi, au nom de qui, dans quel livre est-il écrit « tu devras nuire à ton prochain, semer la foi par les cris » ?

Dieu, Le Miséricordieux… Prends pitié de moi… Amen.

Jean Pierre Corréa 

You may also like

Web TV

Articles récentes

@2024 – tous droit réserver.