Air Macky, APR et désormais «Renfort». L’ancien maire de Guédiawaye voudrait-il succéder à son frère à la présidence de la République ?
Déboulonné par le « revueur » de presse vedette du groupe Dmédia, Ahmed Aïdara, Aliou Sall a décidé, le samedi 26 février dernier, de se renforcer en créant un mouvement dénommé Rencontre nationale des forces républicaines pour le travail (Renfort). L’ancien maire de Guédiawaye voudrait-il succéder à son frère à la présidence de la République ?
Au premier tour de l’élection présidentielle de 2012, Aliou Sall se la coulait douce à l’ambassade du Sénégal en Chine où il avait été nommé par le président Abdoulaye Wade, adversaire de son frère. Dès la publication des résultats du premier tour, il quitte daredare la Chine pour soutenir son frère qui devait faire face à son « bienfaiteur » » Abdoulaye Wade au second tour. « Aliou Sall avait abandonné son frère Macky Sall pour se la couler douce en Chine. Ce, au moment où Mansour Faye et Adama Faye implantaient l’Apr respectivement à Saint-Louis et Grand-Yoff. C’est une des raisons qui font d’ailleurs que la belle famille de Macky Sall ne le digère pas. Il a attendu qu’on gagne pour venir se bousculer », cogne un apériste de la première heure. Après la victoire de son frère, Aliou Sall crée aussitôt un mouvement dénommé Action Initiative Républicaine (Air) Macky. Un mouvement pour « soutenir » les actions de son président de la République de frère qu’il considère comme l’homme idéal pour diriger le Sénégal. « La mise en place de ce mouvement était stratégique pour lui. C’était une manière de montrer à son frère et ses plus proches collaborateurs qu’il était disposé à travailler loyalement à son service. C’était un clin d’œil », souligne ce grand responsable du parti au pouvoir. Mais ce mouvement ne durera que le temps d’une rose. En 2013, Aliou Sall décide de se jeter enfin dans le marigot de l’Alliance pour la République et de militer à Guédiawaye. « Nous n’avons jamais été tout à fait loin de l’Apr. En plus d’être frère du président de la République, nous sommes persuadés que Macky est l’homme qu’il faut. C’est pourquoi nous lui apportons notre soutien à travers des initiatives de développement », se défendait Aliou Sall. Désormais membre de l’Apr et de la coalition Benno Book Yaakar, le frangin est désigné pour porter le capitanat de la coalition au pouvoir aux élections locales. C’était en 2014. Il gagne avec le concours d’autres responsables de la coalition au pouvoir dont Malick Gakou qui lui avait laissé le chemin libre.
Aliou manœuvre pour « imposer » les membres de Air Macky…
Élu maire de Guédiawaye, le journaliste semble prendre des ailes. En avril 2015, des responsables de l’Alliance Pour la République, notamment Lat Diop, l’alors Directeur de l’investissement, et l’ancien député Seydina Fall dit Boughazeli, n’avaient pas perdu du temps pour porter s’attaquer à leur coordonnateur départemental, Aliou Sall, qu’ils accusaient de vouloir imposer les membres de son mouvement Air Macky dans les différentes coordinations communales de Guédiawaye. « L’Alliance pour la République est dans une léthargie totale à Guédiawaye. Les structures sont en lambeaux et Aliou Sall est devenu invisible (…) Il a eu ce qu’il voulait. Devenir le maire de la ville et rester dans ses affaires. Il nous a même tourné le dos, nous qui sommes les militants de la première heure. Ça fait un moment que les instances du parti ne se sont pas réunies… Aliou Sall a démantelé le parti. Il veut légitimer les coordonnateurs de son mouvement «Air Macky», qu’il veut mettre à la tête des différentes coordinations communales. Nous ne l’accepterons pas. Nous lui demandons de laisser notre parti et de retourner dans son Fatick natal. Nous n’avons plus besoin de lui », dénonçaient bec et ongles ces responsables de l’Apr, qui n’avaient pas hésité à interpeller le président du parti, Macky Sall, à propos des agissements de son frère.
Un frère « encombrant »
En 2018, Aliou Sall est cité dans des deals pétroliers. Un dossier qui aura tenu en haleine tout le peuple. Le président de la République en avait payé les frais attaqué qu’il était à cause des accusations portées sur son frère. Par deux fois d’ailleurs, le Premier ministre d’alors, Mahamad Boun Abdallah Dionne, avait dû monter au front pour défendre le frangin du Président. Un frère singulièrement maladroit dans ses dénégations. «Je n’ai aucun franc dans un compte bancaire à l’étranger, en dehors de celui que j’avais en France à la Bnp, alors que j’étudiais là-bas, où il n’y a, je crois bien, pas plus que 14 euros ou celui que j’avais ouvert dans la Bank of China où, selon mes souvenirs, il n’y a que 500 euros soit environ 350 000 F CFA. Voilà les seuls comptes bancaires que j’ai à l’étranger. Je n’ai ni argent, ni appartement, ni maison à l’étranger», se défendait l’ancien journaliste. Son camarade de parti Mame Mbaye Niang, proche de la Première dame, semblait, lui, vouloir l’enfoncer davantage. Il n’a raté aucune occasion pour le flinguer. « Aliou Sall était chef du Bureau économique à l’ambassade de Chine. Au même moment, moi, j’ai perdu mes responsabilités à l’aéroport de Dakar. D’autres cadres ont perdu leurs responsabilités dans l’administration de par leur proximité avec le président. Et pendant ce temps-là, Aliou Sall est resté chef du Bureau économique à l’Ambassade de Chine. Et c’est lui qui a amené Petro-Tim au Sénégal avec Karim Wade. A quel moment avez-vous entendu parler d’Aliou Sall à l’APR ? C’est au deuxième tour avec Air Macky », martelait l’alors ministre de la Jeunesse.
« Certains m’ont suggéré en privé d’envisager de succéder un jour à Macky Sall… »
Dans un entretien accordé à l’hebdomadaire Jeune Afrique le 25 juin 2018, Aliou Sall révélait que certains, dans son propre camp, vont jusqu’à lui suggérer de briguer la succession de son frère en 2024, au terme d’un second mandat qu’ils considèrent comme acquis. Un scénario qu’il disait écarter tout en assurant qu’on n’a pas fini d’entendre parler de lui. « Certains me l’ont suggéré en privé. J’affirme ici que cela ne m’intéresse pas et que je n’y songe pas. Par contre, je continuerai à faire de la politique. Quand je vois l’opportunisme de certains leaders, je me dis qu’on n’a pas le droit de laisser faire ces guignols. Comme il m’est arrivé de le dire un jour, par défi, ce que l’on m’a reproché jusqu’en haut lieu, en politique, hormis le poste de président, je ne m’interdis rien ! », disait Aliou Sall. Avec sa décision de lancer, le samedi 26 février dernier, un mouvement dénommé Rencontre nationale des forces républicaines pour le travail (Renfort) celui qui a été déboulonné par le revueur de presse vedette du groupe Dmédia, Ahmed Aïdara, n’a-t-il pas changé entretemps d’idée pour vouloir aller briguer les suffrages des Sénégalais lors de la présidentielle de 2024 ? Ce afin de succéder à son grand-frère de président de la République ? Un scénario Poutine-Medvedev version Macky-Aliou. Rien n’est à écarter…
Bassirou DIENG