Sécurité et démocratie en Afrique: Le Mali et la Centrafrique, deux cas d’école

par pierre Dieme

Les militaires français se sont retirés de Tombouctou hier, dans le cadre du processus de l’allègement de la présence des soldats français dans ce pays. Ils seront remplacés par des militaires maliens ce qui accentue considérablement la récupération de sa souveraineté par le régime de Bamako sur l’étendue du territoire du pays. Une démarche en Sécurité et démocratie à encourager pour des raisons que nous allons invoquer.
En réalité, le Mali est, pour l’Afrique de l’Ouest, ce qui est la Centrafrique pour l’Afrique centrale. Ces deux pays symbolisent, tous les deux, le malaise d’une Afrique qui se cherche et qui tente désespérément de trouver une nouvelle voie après 50 ans d’une indépendance négociée et incomplète. Ils totalisent l’ensemble des problèmes de l’Afrique : insécurité, partition de facto du territoire, etc. Si le Président Touadera a été bien élu, le Colonel Assimi Goïta est arrivé au pouvoir grâce à un coup de force. N’empêche, les deux pays se ressemblent beaucoup ne serait-ce que par le fait que leurs dirigeants tentent de s’affranchir avec difficultés des enjeux géopolitiques internationaux et des pressions de groupes internes y compris armés qui défient le gouvernement central. Or, si les contradictions au Mali et Centrafrique ne sont pas levées d’une façon significative, il sera difficile de régler les problèmes sur le continent. La preuve!

La situation au Mali affecte dangereusement la paix au Sahel avec l’insécurité chez ses voisins notamment le Burkina Faso et le Niger. Et en RCA, les mêmes contradictions sont notées autour du pays avec le Tchad et le Soudan qui sont aussi affectés par ce qu’y passe. D’ailleurs, certains chefs rebelles centrafricains sont originaires de pays voisins. Ce qui complique gravement la situation. En clair, une étude sérieuse de la situation dans ces deux pays qui sont des cas d’école, peut aider des institutions comme l’Union africaine à trouver des solutions pérennes pour tout le continent.

Or, dans ces pays, la France qui ne s’est pas complétement retiré, a allégé son dispositif de présence à tous les niveaux. Toutefois, nous avons remarqué que par d’autres stratégies, ne serait-ce que par la communication, elle tente de contrer l’arrivée et l’influence d’autres puissances. Or, si la France, encore très influente dans la zone n’est pas avec le gouvernement central, va-t-elle lui laisser les coudées franches pour dérouler tout son programme ? C’est toute la question car la France avec l’opération Sangaris en RCA et Serval puis Barkane au Mali, estime qu’elle a un mot à dire et sa partition à jouer dans des pays où elle est intervenue militairement pour rétablir l’ordre.

Or, ce sont deux pays où le gouvernement central a du mal à contrôler la majorité du territoire national. Et ce sont deux pays où les nouveaux dirigeants font un clin d’œil à la Russie, ce qui ne plaît pas naturellement auxquels Français. Manifestement donc ce sont les cas centrafricains et maliens qui inquiètent le plus les français mais aussi toute l’Afrique mais sans doute pas pour les mêmes raisons. C’est pourquoi, le règlement des conflits en Afrique passe par une analyse exhaustive des enjeux géopolitiques c’est à dire des formes de partenariat avec les autres pays.

Car, à chaque fois qu’un pays africain essaie de s’affranchir de la tutelle de grandes puissances, soit son pouvoir central perd une bonne partie du contrôle de sa souveraineté sur le territoire national, soit ses dirigeants actuels perdent le pouvoir central. Et cela se passe également dans les pays où des ressources minières importantes existent.

Sans encourager les coups d’État militaires et sans accuser un quelconque pays de tous les maux de l’Afrique, nous estimons que ceux qui veulent aider le continent doivent commencer par éviter toute ingérence dans la gestion des affaires internes. Et que les Nations-Unies encadrent les processus démocratiques et la mise en place d’institutions solides et crédibles. C’est la seule voie de sortie de crise. Car les groupes qu’ils soient terroristes ou indépendantistes profitent largement des divergences entre grandes puissances sur le sol africain pour s’armer, s’équiper et défier le pouvoir central.

Il est heureux alors que Tombouctou revienne au pouvoir central de Bamako. Mais ce n’est pas suffisant. Le processus de désengagement militaire doit s’accompagner d’un allègement de l’influence économique, diplomatique, politique et culturelle des grandes puissances, seul gage de la stabilité de ces régions, donc de l’Afrique.

Grosso modo, tant que les pays africains seront sous tutelle, ils connaîtront difficilement la paix et auront du mal à se développer.

Assane Samb

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