Campagne de commercialisation arachidière 2021-2022 , producteurs et operateurs, dans l’expectative !

par pierre Dieme

De Diourbel à Ziguinchor, en passant par Kaolack et le Fouladou, l’aspiration à un prix-plancher plus conséquent est la chose la plus partagée par les producteurs, opérateurs et stockeurs. Même si l’on reconnait que l’Etat consente des efforts

La campagne de commercialisation arachidière 2021-2022 n’est pas partie pour être un long fleuve tranquille pour les acteurs du milieu. Pour cause, le prix de 250 F CFa fixé par l’Etat pour le kilogramme d’arachide, n’agrée pas totalement ces derniers. De Diourbel à Ziguinchor, en passant par Kaolack et le Fouladou, l’aspiration à un prix-plancher plus conséquent est la chose la plus partagée par les producteurs, opérateurs et stockeurs. Même si l’on reconnait que l’Etat consente des efforts.

DIOURBEL/FIXATION DU PRIX DU KILOGRAMME D’ARACHIDE A 250 FRS : LE OUI…MAIS DES PRODUCTEURS AGRICOLES

Les avis sont partagés par rapport à la fixation du kg d’arachide au producteur fixé à 250 Frs. Si certains applaudissent par rapport à ce prix, d’autres par contre soutiennent le contraire. Ces derniers estiment qu’il est impensable de vendre le kilogramme d’arachide à moins de 300 frs.

Les producteurs agricoles sont partagés sur le prix du kilogramme d’arachide à 250 frs. Si certains producteurs sont en phase avec l’Etat sur ce prix, d’autres pensent que le marché parallèle leur offre plus que le prix fixe par le Conseil national interprofessionnel de l’arachide (Cenia). Le Secrétaire général de l’association des producteurs d’arachide du département de Diourbel Moussa Amy Dieng, par ailleurs producteur agricole de Keur Laye dans la commune de Gade escale, se réjouit de ce prix fixé à temps. Selon lui, cela n’était pas évident car dans le marché mondial, le prix du kg de l’arachide n’est pas élevé. « L’Etat a consenti des efforts en fixant ce prix. Si l’Etat n’avait pas homologué ce prix, les gens allaient brader leur arachide à 200 à 210 frs ».

Par contre, il conteste les chiffres avancés par le ministère de l’Agriculture en ce qui concerne la production qui parle d’un chiffre de 1 000 000 tonnes d’arachide au Sénégal. Il s’agit selon lui de statistiques erronées. Ibrahima Ndiaye, un autre producteur agricole de la zone de Ngohe déclare : « l’Etat a fait des efforts par rapport à ce qui se passait d’habitude mais il reste encore car on n’achète pas le kg d’arachide à son réel prix. Le paysan travaille pendant 6 mois et brade sa production en moins de 2 mois. Ce qu’il gagne de sa production est très faible. L’Etat doit accompagner les producteurs agricoles en subventionnant le prix afin que les étrangers ne puissent s’accaparer de toute notre production pour la transformer et pour nous la revendre ». Et de poursuivre : « Nous pensons que cela n’est pas bon pour l’économie du pays et pour une société comme la Sonacos SA. Une telle situation n’arrange pas les producteurs qui ont rencontré ces dernières années des problèmes de semences ». Ainsi, il propose à la place de 250 frs 300 à 350frs le kg d’arachide.

Pour Cheikh Ndjigal, chef de village de Ndjigal, soutient pour sa part que le prix de 250 Frs le kg n’est pas bénéfique parce « c’est le même prix qu’on retrouve au marché hebdomadaire du dimanche de Ndindy. Nous allons écouler notre production avant même le démarrage de la campagne de commercialisation de l’arachide. Nous pensons qu’il sera impossible de collecter de l’arachide à ce prix au niveau du marché de Ndindy. Il y a des commerçants qui viennent de Touba pour acheter à ce prix dans notre localité. C’est nous qui paierons les peaux cassées parce qu’ils vont nous revendre cette arachide à 1000 frs le Kg d’arachide de coques. Il appartient à l’Etat de nous soutenir en proposant des prix préférentiels car nous avons besoin de l’argent alors que nous ne pouvons que vendre notre production pour satisfaire nos besoins alimentaires ». Et de conclure : « Nous voulons que le prix de l’arachide soit fixé à 350 voire 400 frs parce que nous risquons d’écouler notre production avant le coup d’envoi de la campagne de commercialisation ».

KAOLACK : LES PRODUCTEURS ET OPERATEURS EXPRIMENT LEUR VOLONTE A AVOIR PLUS

En Conseil des ministres réuni en sa séance hebdomadaire du mercredi 17 novembre dernier, le gouvernement du Sénégal, contrairement à la volonté du Comité interprofessionnel de l’arachide (Cnia) qui exprimait un prix de 270 frs le kilo, a finalement retenu les 250 frs comme prix de base. Une décision du gouvernement qui n’a pas tardé à susciter de nombreuses réactions autant chez les producteurs d’arachide, les opérateurs, petits spéculateurs et autres exportateurs de graines vers les marchés extérieurs. Si, à la sortie de la réunion ministérielle, un soulagement général s’est manifesté au sein des paysans et les organisations qui les mobilisent, dans les entités d’opérateurs c’est une appréciation qui est totalement en porte-à-faux. Car, pour les opérateurs, ce prix devrait faire l’objet d’une hausse à 270 frs pour mieux favoriser les intérêts des uns et des autres parmi les acteurs. Surtout les producteurs qui seront confrontés, sans peut-être le savoir, à faire un rajout de 20.000 frs à la tonne pour se procurer prochainement de l’engrais et 55.000 Frs à la tonne de semence d’arachide. Ces chiffres sont en effet sortis de la dernière rencontre du Cnia qui précédait l’introduction de son rapport auprès du gouvernement. Ainsi, au courant de l’année précédente, le même prix a été infligé aux producteurs. En ces moments de la commercialisation, le producteur cédait 6000 frs pour s’offrir une tonne d’engrais et 175.000 F d’apport pour une tonne d’arachide.

Contrairement à cette année où il est obligé de verser 230.000 frs. Ce qui, du reste, correspond à une hausse de 55.000 frs. Des mouvements certes, mais qui justifient la décision du Cnia de proposer cette année le prix de 270 Frs au kilogramme d’arachide. À cela s’ajoutent les difficultés auxquelles les producteurs ont été confrontés pendant la dernière saison hivernale. Une situation qui fait que dans certaines localités du pays, les rendements ont été bons mais mauvais dans la majeure partie des contrées. C’est pour dire que sur les quatre (4) vagues de semis exploitées la saison précédente, c’est seule la première et la seconde qui ont produit des résultats. C’est aujourd’hui l’exemple dans le Nord du pays où les producteurs de manière générale n’ont quasiment pas eu de rendement. Face au marché extérieur par contre, les opérateurs somment l’Etat de privilégier les sociétés nationales en matière de collecte. Autrement dit, leur offrir les quantités nécessaires fixées dans leurs prévisions avant d’ouvrir les modalités d’exportation. Ceci, pour payer les efforts des acteurs nationaux ayant été à l’origine de toutes les opérations aboutissant à la production souvent obtenue au Sénégal. Car, pensent les opérateurs, les plupart des subventions viennent du contribuable et en aucun cas ne peuvent profiter plus à des étrangers.

ZIGUINCHOR : PAYSANS ET PRODUCTEURS DEÇUS ET SURPRIS DU PRIX DU KILO FIXE

La campagne de commercialisation arachidière qui démarre les prochains jours risque d’être très agitée dans la partie sud du pays. Le prix de 250 francs Cfa fixé n’agrée pas les paysans et producteurs de la région de Ziguinchor qui expriment leur grosse déception face à ce prix du kilogramme. Donner beaucoup plus de valeur à la production arachidière; c’est le slogan brandi par la plupart des producteurs de la région à l’image de Malamine Sané, Président de l’Association des jeunes agriculteurs des Kalounayes (AJAK) : « Ça a été une véritable surprise. Je pense qu’on doit donner aujourd’hui beaucoup plus de valeur à la production arachidière. Pour labourer un hectare, il y a plusieurs facteurs qui entrent en jeu ; l’engrais ; le labour et autres qui sont tous payants. Donc seule une valorisation de l’arachide peut fixer nos jeunes», plaide l’agriculteur. Des paysans qui affichent déception après le prix du kilo fixé à 250 francs CFA. Pape Arona Diédhiou, le Président de l’entente Diouloulou ne cache pas aussi sa déception. Et lorsqu’il se prononce sur ce prix, c’est pour lancer ces propos : « je pense qu’il y a de quoi le revoir compte tenu des difficultés. Il y a aussi le marché parallèle avec ses prix. Maintenant, si on doit reconduire le prix de l’année dernière, cela n’arrange pas le producteur. Il faut que l’Etat revoie ce prix vu les difficultés que nous rencontrons», lance M. Diédhiou qui plaide pour une hausse du prix. Un prix qui est également rejeté par les opérateurs privés stockeurs de la région qui s’étaient d’ailleurs fait remarquer l’année dernière. En attendant, c’est sur fond d’inquiétudes que se prépare la campagne de commercialisation arachidière dans la zone sud du pays.

FOULADOU : LES PRODUCTEURS APPROUVENT MAIS RECLAMENT PLUS

L’annonce du prix du kilogramme d’arachide dope les producteurs. Ils sont déjà au champ pour déterrer les graines. Petite visite sur le terrain et discussion avec des producteurs du département de Médina Yéro Foulah, nouveau bassin arachidier du pays.

Le prix plancher de 250F le kg de l’arachide a fini de doper les producteurs au Fouladou. Ici, une production record est attendue, la région va sans nul doute occuper la première place en termes de production d’arachide. Avec, en tête le département de Médina Yéro Foulah où nous avons trouvé Samba dans son village de Hamdallaye Moussa Molo. Il est en train de déterrer son vaste périmètre arachidier avec une paire de bœufs attelée à une charrue. Encore des techniques traditionnelles demandant beaucoup d’efforts physiques.

La mécanisation est encore très timide à certains stades dans la chaine de production. « Déterrer les arachides, c’est difficile avec la traction animale. Mais c’est mieux qu’il y a quelques années auparavant où il fallait utiliser (Dibonn en pulaar) une petite houe pointue pour en faire. Mais l’espoir est permis d’arriver à des tracteurs qui peuvent faire plusieurs hectares par jour. Nous aurions aimé avoir 500F au moins pour le kg mais nous applaudissons car si les Chinois viennent, le problème des paysans va être réglé. Il faut protéger les paysans au lieu d’enrichir des industriels ». Samba est clair : « Beaucoup d’efforts sont perceptibles dans le secteur agricole mais il y a des choix à faire pour mieux protéger les producteurs qui n’ont point de syndicat.

Dans ce nouveau bassin arachidier qu’est le département de Médina Yéro Foulah, toutes les journées se ressemblent pour les paysans. La course est effrénée pour récupérer les graines dans le sol. Un travail fastidieux et lent qui se complique de jour en jour avec la disparition de l’humidité du sol. A Bellel Naoudé, autre village de la commune de Koulinto, Abdou S, cultivateur de son état, accueille aussi très bien le prix au producteur mais souhaite que les Chinois puissent installer des unités de transformation dans un département comme le Medina Yéro Foulah. « Il parait qu’ils sont très intelligents. Les Chinois peuvent nous aider avec des unités de transformation et aussi pourquoi pas de conditionnement du foin pour mieux valoriser les résidus agricoles. Nos autorités devront négocier aussi dans ce sens pour plus d’attractivité de l’agriculture ».

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