Les Meuniers stoppent la production: le Sénégal sans farine et bientôt sans pain

par pierre Dieme

Le Sénégal est à court de farine, au moment où ces lignes sont publiées. Les sept (7) Meuniers industriels du pays ont en effet décidé d’arrêter totalement leurs machines jusqu’à nouvel ordre. Par cette fermeture, ils entendent protester contre le jeu de yoyo des autorités. C’est donc une pénurie de pain qui guettent irrémédiablement le Sénégal dans les prochains jours.

Les Sérères du Sénégal ont du souci à se faire. La baguette de pain tant prisée par cette communauté risque de disparaitre des kiosques dans les jours à venir. Du moins, si l’Etat ne règle pas rapidement la grave crise qui sévit au niveau de la filière farinière nationale.

Les sept (7) Meuniers (GMD, NMA, FKS, OLAM, SEDIMA, MDS, BASMALA) du Sénégal, réunis au sein de l’Association des meuniers industriels du Sénégal (AMIS) avaient annoncé la couleur depuis le 14 septembre, puis le 02 novembre pour exiger une application de la vérité des prix sur le sac de 50 kg de farine. Mais si, en septembre, ils voulaient que le prix de ce sac soit porté à 18.500 frs — alors que le décret du 14 janvier 2021 imposait un prix de vente à 16 600 F par sac sachant que le prix du blé était de 270 euros par tonne —, aujourd’hui, ils estiment que le prix raisonnable attendu est désormais de 19 193 frs soit environ 323 euros.

Le 02 novembre, les meuniers avaient annoncé un premier plan de réduction de la production nationale qui tourne autour de 3500 tonnes par jour pour un besoin national de farine de 1450 tonnes par jour et une production de plus 8 000 000 baguettes par jour.

« Après ce premier acte, on attendait, ce mercredi, un signal fort du président de la République et de son gouvernement lors du Conseil des ministres, mais nous avons été déçus parce que le sujet n’a même pas été évoqué. C’est comme si l’Etat se foutait éperdument de la situation cruciale de l’industrie meunière du Sénégal », peste Pape Abdoulaye Djigal de l’AMIS. Qui affirme qu’ « il est clair que nous allons vers la crise de la filière. Nos dirigeants jouent avec le feu et nous allons vers un arbitrage populaire ».

Un arrêt total de la production annoncé
Dans un document publié jeudi, l’AMIS hausse le ton. Car si, mardi dernier, le 02 novembre, il était question d’un arrêt de trois jours (mardi, mercredi et jeudi), on parle désormais d’un arrêt total de la production. « A ce jour, les alertes, les propositions et notre disposition à trouver une solution adaptée sont restées sans effet. De sorte que le prix homologué du sac de farine de 50 kg ne permet pas une reprise d’activité et de commercialisation de la part de l’ensemble des Meuniers Industriels du Sénégal. C’est avec un profond regret et une grande désolation que nous vous annonçons le maintien de l’arrêt jusqu’à nouvel ordre de production nationale de farine

 » indique Claude Demba Diop, le président de l’AMIS.

Avec beaucoup de désolation dans la voix, il estime que « la crise de la filière que nous redoutions semble à présent inéluctable. La crise sociale que nous évitions nous a rejoint et le chômage technique sera annoncé dans les prochains jours. Il est attendu la mise en place de la dernière structure des prix de la farine réalisée en septembre 2021 sous le contrôle du Ministère du Commerce et du Ministère des Finances. Dans tous les pays du monde, les gouvernants ont réagi et dans notre pays il est urgent de sauver 1350 emplois directs et 15 000 indirects, de viabiliser notre modèle industriel et social, de préserver notre autonomie en farine depuis plus de 60 ans. L’arrêt de nos installations se poursuivra jusqu’à ce qu’une réponse assurant la survie des meuniers soit clairement apportée » assure Claude Demba Diop.

Les meuniers pensent qu’il est à présent urgent d’appliquer la structure des prix validée en Comité de Suivi des Prix présidé par le ministère des Finances. Soit une farine à 19 193 FCFA par sac en complément de la renonciation totale de la TVA et des droits de douane sur le blé. « Nous demeurons convaincus que seule une industrie forte et dynamique peut apporter du développement, de l’emploi, du pouvoir d’achat et des recettes fiscales nécessaires au devenir du Sénégal. La destinée et l’avenir de la filière sont à présent entre les mains de nos autorités » conclut le document.

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