Entendre des taux de croissance à deux chiffres à venir, n’est pas ce qui fait oublier aux Sénégalais leurs difficultés. C’est du moins l’avis de l’économiste Meïssa Babou.
Dans son rapport sur les perspectives régionales en Afrique subsaharienne, publié ce mois, le Fmi prévoit un taux de croissance de 10,8 % en 2023 pour le Sénégal. Ce qui le place parmi les économies les plus dynamiques en termes de croissance. Mais pour Meïssa Babou, économiste, enseignant à l’université de Dakar, le taux de croissance ne règle pas les problèmes urgents des Sénégalais. «Ce que nous vivons avec la facture d’électricité, les taxes et les impôts, ce sont des difficultés que le Sénégalais n’a pas à régler avec un taux de croissance», dit-il. Cette croissance ne produit pas d’emploi, ajoute-t-il. A son avis, c’est une considération qui ne fait que le business de l’Etat central surtout au niveau des cabinets de notation.
Pour Meïssa Babou, il faut s’engager dans une véritable politique de développement au niveau de l’agriculture, de la pêche et de l’élevage. Il faut, poursuit-il, qu’on soit dans les niveaux de dépenses d’électricité, parce que les factures sont vraiment chères. «Que l’Etat puisse avoir une politique énergétique, qui est un peu plus douce, parce que nous sommes fatigués», suggère Meïssa Babou, ajoutant que les priorités sont l’éducation et la santé. «Quel investissement ont-ils fait pour l’école sénégalaise ou les malades. Ce sont ces créneaux qui ne sont pas investis. L’Etat est en train de faire des routes et des ponts, des investissements de prestige. Il faut revenir sur terre, faire une réorientation politique qui est tournée vers un développement endogène
Poursuivant, Meïssa Babou affirme que le Fmi se projette en 2023 avec le pétrole et le gaz. Mais, selon lui, les Sénégalais ont fini par comprendre que cette croissance ne produit pas d’emploi. Au niveau microéconomique, dit-il, il y a non seulement le chômage, mais aussi des tensions galopantes intérieures avec des facteurs endogènes comme l’augmentation des taxes, des impôts aussi bien sur les personnes physiques que sur les personnes morales. «Tout ce qui a alimenté le budget de 5 000 milliards, ce sont des chiffres qui ne sont là que pour le marketing de l’Etat, mais qui n’engagent pas le citoyen lambda qui ne voit pas la queue du diable. Ça n’a aucun sens pour le peuple sénégalais», souligne Meïssa Babou.
Emile DASYLVA