Marché locatif à Dakar : la «jungle des loyers»

par Dakar Matin

Cautions élevées pouvant atteindre l’équivalent de deux ans de loyer, augmentations intempestives des frais de location, ruptures unilatérales de contrat… À Dakar, les locataires sont à la merci des propriétaires. Les loyers explosent, un contrôle s’impose !

En 2014, l’Assemblée nationale du Sénégal avait voté une loi portant sur la baisse des loyers à usage d’habitation. Une baisse de 29% pour les loyers inférieurs à 150.000 F CFA, 14% pour ceux compris entre 150.000 F CFA et 500.000 F CFA, à 4% pour ceux supérieurs à 500.000 F CFA. 7 ans après, le constat est alarmant. Le contraste est saisissant. Le loyer à Dakar a explosé. La loi n’a pas été suivie de l’effet escompté. Car pour contourner cette règle, les propriétaires expulsent leurs locataires en affirmant qu’ils occuperont eux-mêmes leurs appartements, puis ils les remettent en location à des prix plus élevés.

Par exemple, un appartement deux chambres + salon+ cuisine + deux toilettes- qui était loué à 150 000 francs CFA par mois est maintenant loué à 200 voire 250 000. L’afflux d’expatriés participe à la flambée des prix dans certains secteurs de la capitale.

Le profil des locataires

Avec une superficie de 550 m2, soit moins de 0,3% de la superficie du Sénégal, la région de Dakar loge la moitié des locataires du pays. Une situation qui exacerbe la lancinante équation du logement dans la capitale. L’Agence Nationale de la Statistique et de Démographie (ANSD) a mené une Etude Monographique sur les Services Immobiliers du Logement à Dakar. La coordinatrice de l’étude, Astou Dakono Ndiaye, dévoile les résultats de leur enquête riche en enseignements.

Sur le mode d’acquisition des logements à Dakar. Et ils se sont rendu compte que 42,8 % des logements de la région ont été hérités, 32,4 % ont été construits, 20,9 % ont été achetés clés en main et les 3,9% sont issus de donation.

La plupart des propriétaires de logements mis en location sont des retraités avec un taux de 39,6%. 18% des propriétaires sont du secteur informel hors commerce et 17% sont des commerçants. Les autres propriétaires sont de l’administration publique. Mais quelle est la catégorie socioprofessionnelle des clients ? Les locataires sont généralement de la profession libérale informelle avec un taux de 26,2 %. Ceux de la profession libérale formelle représentent un taux de 24 % et les employés du privé représentent 19,6%. Les locataires âgés entre 35 et 44 ans représentent un taux de 29 % et ceux âgés entre 45 et 54 ans se retrouvent avec un taux de 26 %. En clair, plus de la moitié des locataires sont âgés entre 35 et 54 ans.

Les enquêteurs de l’ANSD ont dressé le profil des courtiers qui sont la croix de transmission entre l’offre et la demande de logements. Ils renseignent que les courtiers sont généralement des hommes qui ont atteint le niveau du secondaire et ils sont essentiellement des Sénégalais.

Les résultats de l’étude montrent que les agences immobilières Sénégal sont constituées en Société Unipersonnelle (SUARL) avec un taux de 39,6%. Les SARL représentent 35,1% des agences immobilières Sénégal, les GIE 11,7%, les Sociétés Anonymes (SA) 7,2% et les Sociétés civiles immobilières Sénégal 6,3 %.

Il manque 150.000 logements à Dakar

Implantée sur une étroite péninsule de 550 km2 (0,3% du territoire national), Dakar abrite 3,7 millions d’habitants, soit près du quart de la population sénégalaise, estimée à 16 millions d’habitants. Sous la pression conjuguée d’une très forte croissance démographique, de l’exode rural et de la présence dans un pays réputé pour sa stabilité politique de nombreuses organisations internationales, Dakar s’est hérissée de grues et les loyers se sont envolés. Il manque 150.000 logements rien qu’à Dakar, selon le gouvernement.

Le tribunal de Dakar a prononcé 5.079 avis d’expulsion

De novembre 2018 à octobre 2019, le tribunal de Dakar a prononcé 5.079 avis d’expulsion, contre 463 avis contraires, selon des documents obtenus par l’AFP. En justice, les locataires ont peu de chances de gagner, car de nombreux baux sont informels. Et beaucoup renoncent à se présenter devant les tribunaux.

La solution semble passer par la construction de plus de logements sociaux. Le gouvernement prévoit d’en construire 100.000 en cinq ans dans le pays, dont une partie dans la région de Dakar. Pour le moment, 28 000 logements sont en cours de construction en périphérie de Dakar et à l’intérieur du pays, et 53 000 autres devraient suivre grâce à des investissements du Qatar et des Emirats arabes unis.

M.BA

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