Ne pouvant s’octroyer des pouvoirs exorbitants à l’image des chefs d’état du Sénégal, du Congo ou d’autres pays africains où les présidents sont de vrais monarques,Umaru Embalò n’a de cesse de vouloir dissoudre l’assemblée nationale depuis que la Cedeao l’a installé à la tête de la Guinée Bissau. Aujourd’hui, dans l’impossibilité de légiférer dans certains domaines comme l’exploitation des ressources naturelles qui appartient souverainement à l’assemblée nationale mais également, pour annihiler la force du Premier ministre et du président du parlement qui sont ses soutiens, Umaru Embalò fait dans la menace.
Passées les premières bisbilles d’avec le Premier ministre Nuno Nabiam Gomes à la suite de querelles portant sur les prérogatives de chaque responsable, Umaru Embalò indésirable au Madem G-15 qui avait porté sa candidature à la présidentielle de décembre 2019, fait feu de tout bois pour restreindre la force de l’assemblée nationale dirigée par Cipriano Cassamà, du PAIGC et, dans la même lancée, réduire fortement l’implication du chef du gouvernement issu de la majorité parlementaire.
Après plusieurs tentatives infructueuses, le « général » qui a été rencontré le chef des putschistes à Conakry, semble être sous le charme de l’étendue des pouvoirs du Colonel Doumbouya, le tombeur du président Alpha Condé. Ces premiers mots sur le tarmac de l’aéroport Oswaldo Vieira ont été « Maintenant j’ai la possibilité de dissoudre le parlement ». Umaru Embalò admet la possibilité de dissoudre le Parlement parce que l’Assemblée nationale populaire aurait dû commencer en mai débat sur la révision constitutionnelle, mais le point a été retiré de l’ordre du jour.
« Je vous le dis, l’UDIB (ancienne salle de cinéma de Bissau) a fermé. Le site des films ne fonctionne plus, je ne fréquente pas les salles de théâtre. Dorénavant, les jours de l’assemblée sont comptés. Et cela signifie que je peux dissoudre le Parlement aujourd’hui, demain, le mois prochain ou l’année prochaine. La dissolution du Parlement est entre mes mains et cela ne me prendra même pas une seconde », a déclaré le « général »qui s’exprimait en créole.
Dès son installation en février 2020, Umaru Embalò avait agité une révision constitutionnelle dans laquelle le président de la République disposerait de pouvoirs plus étendus. A l’époque, Ismaïla Madior Fall, le ministre d’état et Conseiller juridique de Macky Sall s’était déplacé à Bissau pour lui tailler une Constitution sur mesure. Une révision rejetée par ses alliés du moment, Braima Camarà, Cipriano Cassamà et Nuno Nabiam
Umaro Sissoco Embaló qui s’adressait après son retour d’une visite de quelques heures en Guinée-Conakry voisine, mettait la pression sur ses alliés en prévision de la nouvelle session législative de l’Assemblée nationale populaire de Guinée-Bissau démarre le 04 novembre et se termine le 15 décembre. Car, dans l’ordre du jour de cette session, parmi les 20 points prévus, il n’a été nulle part mentionné le projet de révision Constitutionnelle, d’où la colère du « général » qui avait obtenu des promesses fermes de ses alliés.
« La vérité c’est qu’ils me donnent des raisons de dissoudre le Parlement. Ils me donnent la raison. C’est comme le chat qui a faim et quelqu’un a décidé de lui mettre la merguez dans le cou. Le parlement dit qu’il y a crise politique et je prends note de tout ce qu’on dit », a-t-il affirmé
Très en colère face aux députés, Umaru Embalò dira « Le Parlement doit savoir que le président Umaro Sissoco Embaló n’est pas n’importe qui et qu’il ne permettra pas de désordre en Guinée-Bissau. Les députés
En décembre 2020, « le général » avait également admis la possibilité de dissoudre le parlement à la suite de critiques venant des députés, mais a fini par reculer après que le Conseil d’État ait recommandé à l’unanimité de continuer l’effort de recherche de solutions par un dialogue inclusif.
Le Parlement de Guinée-Bissau aurait dû entamer en mai le débat sur le projet de révision constitutionnelle, mais le point a été retiré de l’ordre du jour après que les dirigeants parlementaires de tous les groupes aient posé la question de savoir si le sujet devait être débattu de manière appropriée dans la forme où il a été proposé ou pas. Les députés ont dit Non
Ce que Umaru Embalò ignore, ce qui est en soit tout à fait normal, l’initiative de la révision Constitutionnelle revient au Parlement. C’est ce que les députés lui ont rappelé et qui ne semble pas lui plaire. Car, depuis février 2020, tous les engagements pris par le « général » sans l’aval de l’assemblée nationale, n’ont pas force de loi en Guinée Bissau.
En effet, selon l’avocat Luis Vaz Martin, ancien président de la Ligue des droits humains, « d’après la Constitution actuelle, l’initiative de révision de la Constitution incombe au Parlement et les propositions de révision doivent être adoptées à la majorité des deux tiers des députés constituant l’Assemblée nationale populaire, soit 68 des 102 parlementaires ».
L’année dernière, Umaru Embalò avait mis la charrue avant les bœufs en constituant une commission pour soumettre une proposition de révision de la constitution au Parlement, mais en parallèle, l’Assemblée nationale populaire (ANP) avait un avant-projet dans le même sens.
En juillet dernier, le président en exercice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et le chef de l’État du Ghana, Nana Akufo-Addo, a annoncé l’envoi d’experts de cette organisation en Guinée-Bissau pour assister à la révision constitutionnelle.
Cheikh Saadbou DIARRA